L’embolisation des fibromes utérins

Une procédure standardisée après plus de 20 ans de pratique

Publié le 22/05/2014
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Crédit photo : PHANIE

Cela fait un peu plus de 20 ans que la technique d’embolisation des fibromes a été mise au point par les équipes de gynécologie-obstétrique et de radiologie de l’hôpital Lariboisière à Paris. Les Prs Merland et Ravina avaient, à cette époque, observé qu’en traitant les lésions hémorragiques des fibromes par embolisation des artères qui les vascularisaient, les fibromes diminuaient de volume.

Aujourd’hui, la méthode est standardisée. Globalement, toutes les équipes reconnaissent les mêmes indications et appliquent la même technique. Il y a consensus sur le seuil de microparticules à injecter pour que les fibromes soient privés du sang des artères utérines. On utilise aujourd’hui des microsphères de diamètre allant de 500 à 700 µ pour éviter des phénomènes de nécrose ou le risque d’aménorrhée qui pourraient survenir avec des microsphères de diamètre inférieur.

« Cette injection se fait avec un cathéter d’angiographie classique (4F ou 5F), précise le Pr Jean-Michel Bartoli (Marseille), ou mieux grâce à un microcathéter qui permet de réaliser une embolisation sélective ou suprasélective de l’artère utérine ». Ceci permet d’éviter un certain nombre d’effets collatéraux et en particulier l’embolisation des branches ovariennes de l’artère utérine.

Une RCP est impérative

« Point essentiel, insiste le Pr Bartoli, la décision de la procédure d’embolisation doit être prise au cours d’une Réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) avec les gynécologues-obstétriciens et les radiologues. Le bilan doit être complet, avec notamment la réalisation d’une IRM pelvienne qui précise le nombre des myomes, leur topographie, leur taille exacte, leur vascularisation et la taille de l’utérus ».

L’indication d’une embolisation se pose en fonction de l’âge de la patiente, de ses souhaits et d’un éventuel désir d’enfant, de la localisation des myomes, de leur nombre et de leur volume. L’embolisation s’adresse aux patientes symptomatiques qui présentent des ménométrorragies invalidantes parfois associées à une anémie, une asthénie, des douleurs pelviennes et/ou encore des troubles des organes de voisinage, en particulier une dysurie.

« Tout fibrome qui se développe à l’intérieur de l’utérus est une très bonne indication à l’embolisation, explique le Pr Bartoli, et tout fibrome qui se développe en dehors représente une contre-indication ou une indication relative nécessitant une embolisation et une intervention complémentaire, généralement une myomectomie. Si le diamètre est supérieur à 80 mm,notre équipe propose soit une myomectomie soit, s’il y a plusieurs myomes, un protocole radiochirurgical qui associe embolisation et myomectomie des plus volumineux myomes. Le fibrome simple unique de petite taille n’est généralement pas une indication d’embolisation. Quand les fibromes sont multiples et qu’un ou deux d’entre eux se développent en dehors de l’utérus, on peut proposer le protocole radiochirurgical avec embolisation pour les myomes développés dans la paroi et une myomectomie dans les 48 heures suivantes pour les myomes à développement sous-séreux ».

La décision de la procédure dépend également de l’âge de la patiente. Si elle est âgée de plus de 35 ans ou si elle n’a pas de désir de grossesse, l’embolisation est une bonne indication, en fonction, bien sûr, de la localisation des myomes. Si elle a moins de 35 ans et un désir de grossesse, il faut peser les avantages respectifs de la myomectomie et de l’embolisation. S’il s’agit d’un fibrome unique, la myomectomie est indiquée dans la plupart des cas. Si les fibromes sont multiples, une embolisation peut être proposée avec une surveillance attentive en post-procédure immédiate.

Quand l’indication est bien posée, les résultats sur la symptomatologie clinique sont superposables à ceux de la myomectomie (› 95 %). Sur le plan anatomique, il y a diminution du volume utérin global et du volume des myomes de l’ordre de 40 à 50 % durant les 6 à 8 premiers mois. Le contrôle se fait par une nouvelle IRM ou par écho-doppler avant un an. « Si les myomes sont restés vascularisés, on peut être amenés à pratiquer une nouvelle embolisation (5 % des cas), précise le Pr Bartoli. Quant à la symptomatologie douloureuse, elle est variable selon les patientes. Chaque structure a ses protocoles antalgiques. Dans notre équipe, on applique systématiquement une PCA (analgésie contrôlée par la patiente) ».

Les résultats de l’embolisation, en termes d’état général, de qualité de vie, de reprise de la vie socioprofessionnelle sont identiques, voire légèrement meilleurs que ceux de la myomectomie. En outre, il n’y a pas de différence significative entre embolisation et myomectomie sur l’aménorrhée depuis la standardisation de la technique d’embolisation. Le taux de grossesse après embolisation ou myomectomie varie entre 25 et 45 % selon les études mais « on a l’impression, souligne le Pr Bartoli, qu’avec l’embolisation il y a peut-être un petit risque supplémentaire d’accouchement prématuré. Des études sont nécessaires pour confirmer ».

Entretien avec le Pr Jean-Michel Bartoli, chef du service de radiologie, hôpital de la Timone, Marseille

Dr Brigitte Martin

Source : Bilan spécialistes