Carcinomes cutanés métastatiques

Quel bénéfice avec l’immunothérapie ?

Publié le 20/11/2020
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Lors des derniers congrès de l’ASCO et de l’ESMO, des études essentielles ont confirmé les bénéfices obtenus avec les anti-PD1 dans les carcinomes épidermoïdes et basocellulaires métastatiques. Quels résultats retenir ?
Les carcinomes épidermoïdes cutanés métastatiques ou localement avancés sont rares mais graves

Les carcinomes épidermoïdes cutanés métastatiques ou localement avancés sont rares mais graves
Crédit photo : phanie

Parmi les cancers cutanés les plus fréquents, les carcinomes épidermoïdes cutanés (CEC) possèdent des formes métastatiques ou localement avancées rares, mais graves de par le peu d’options thérapeutiques disponibles ou efficaces à long terme.

Les anti-PD1 efficaces dans les carcinomes épidermoïdes

En octobre 2019, le cemiplimab obtient une ATU, puis une AMM conditionnelle en septembre 2020. Il sera indiqué en monothérapie pour le traitement de patients adultes atteints d’un CEC métastatique ou localement avancé, non-candidats à une chirurgie ou une radiothérapie curative. L’étude pivotale de phase 2 1 540 a permis l’accession à ce traitement. En effet, elle montrait que près de 50 % des patients présentaient une réponse objective au traitement et que 4 à 17 % avaient une réponse complète. Le taux de survie sans progression (SSP) à 12 mois atteignait de 45 à 53 % et la survie globale (SG) à 12 mois près de 80 %. L’actualisation de ces données à trois ans, présentées à l’ASCO 2020 (1), montre que les réponses complètes sont obtenues plutôt tardivement avec un délai moyen de 11,2 mois et que près de 70 % des patients répondeurs le sont toujours à 24 mois. La SSP à 24 mois était de 44,2 %, la SG de 73,3 %. Ces chiffres sont quasiment comparables à ceux obtenus à 12 mois. La tolérance de ce traitement est moins bonne que les autres anti-PD1, avec 48,7 % de toxicités de grade ≥ 3.

Ainsi, nous disposons désormais d’un traitement dont l’efficacité est remarquable et durable. La tolérance de ce traitement est acceptable, malgré un profil de tolérance un peu moins bon qu’avec les autres anti-PD1.

D’autres anti-PD1 ont aussi été testés dans cette indication : le pembrolizumab dans les essais CARSKIN et KEYNOTE-629 ainsi que le nivolumab dans l’étude CA209-9JC. Les résultats préliminaires montrent des taux de réponse objective sous pembrolizumab de 34 à 39 %, alors qu’avec le nivolumab ils atteignent 54,5 % de répondeurs à un an. Le nivolumab rejoint ainsi le cémiplimab avec un meilleur profil de tolérance, seulement 21 % de toxicité de grade ≥ 3. Néanmoins, ces essais ne peuvent évidemment pas être comparés entre eux.

Le cemiplimab a aussi été testé sur 36 patients en première ligne thérapeutique dans les CEC localement avancés. Après deux injections, le taux de réponse était de 72,2 % et 16 % des patients ont pu recevoir ensuite un traitement chirurgical ou par radiothérapie. Ces résultats ouvrent la voie à des essais en traitement néoadjuvant dans cette indication (2). De plus, un essai est en cours de recrutement pour évaluer l’efficacité en adjuvant du cemiplimab versus la radiothérapie pour les CEC à haut risque de récidive.

Carcinomes basocellulaires : IVH ou anti-PD1 ?

Le carcinome basocellulaire (CBC) est quant à lui le plus fréquent des cancers cutanés. Les formes graves, localement avancées, métastatiques ou récidivantes sont beaucoup plus rares. Les inhibiteurs de la voie de Hedgehog (IVH), vismodegib ou sonidegib, permettent une réponse chez près de 40 % des patients. Cependant, la tolérance n’est pas toujours bonne et conduit à des arrêts de traitement. Les récidives à l’arrêt sont fréquentes.

Présentée à l’ESMO, une étude de phase 2 étudiait la réponse au cemiplimab chez les patients atteints d’un CBC intolérants aux IVH, en progression ou stables après neuf mois de traitement par IVH (3). Le taux de réponse objective était de 31 %, avec 6 % de réponses complètes et 48,8 % de stabilisations. La réponse était maintenue à 12 mois chez 85,5 % des patients. Ces réponses étaient indépendantes de l’expression du PD-L1. Ainsi, les anti-PD1 apparaissent comme une voie thérapeutique intéressante pour le CBC métastatique ou localement avancé non opérable.

Hôpital Saint-Joseph (Paris)
(1) Rischin D. et al. ASCO 2020, abstract 10018
(2) Lynn Atlas J. et al. ASCO 2020, abstract 10065
(3) Stratigos A.J. et al. ESMO 2020, Abstract LBA-47

Dr Élodie Poirier

Source : lequotidiendumedecin.fr