DE NOTRE CORRESPONDANTE
DEPUIS LA DÉCOUVERTE en 1941 par Huggins et coll. de la dépendance androgénique du cancer de la prostate, la suppression androgénique (ou hormonothérapie) est devenu le traitement standard du cancer prostatique métastasé, et son indication s’est ensuite étendue au stade non métastasé (localement avancé ou rechute).
Toutefois la suppression androgénique a des effets secondaires pouvant retentir sur la qualité de vie : bouffées de chaleur, diminution de la libido, gynécomastie, insomnie, gain de poids, aggravation du diabète, perte de masse musculaire et ostéoporose.
Des essais de phase II et III pont montré qu’une administration intermittente de la suppression androgénique a pour avantage de réduire les effets secondaires et de retarder l’hormonorésistance. Afin d’évaluer son effet sur la survie globale, une étude randomisée suffisamment large et prolongée était nécessaire.
Cancer localisé.
L’essai international de phase III du groupe du NCIC (National Cancer Institute of Canada) a donc été initié en 1999 et ses résultats sont maintenant publiés dans le « New England Journal of Medicine ».
« Nous savions depuis le milieu des années 1990 que la suppression androgénique pouvait être utilisée de façon intermittente pour traiter le cancer prostatique récurrent, mais nous ne savions pas jusqu’ici que les hommes ne sacrifiaient pas leur durée de vie dans l’espoir d’une meilleure qualité de vie », explique au « Quotidien » le Dr Juanita Crook (British Columbia Cancer Agency, Canada).
L’étude randomisée porte sur 1 386 patients et leur suivi moyen est de sept ans. Ces hommes avaient un cancer de la prostate localisé et présentaient une rechute biologique (attestée par une remontée du PSA au-dessus de 3 ng/dl) plus d’un an après une radiothérapie (primaire ou de rattrapage).
Ils ont été stratifiés en fonction de plusieurs facteurs : prostatectomie radicale ou non, radiothérapie il y a plus de trois ans ou moins de trois ans, taux initial du PSA inférieur ou supérieur à 15 ng/dl, administration antérieure de suppression androgénique.
Les 1386 patients ont été randomisés de façon à recevoir : l’HT continue (agoniste de la LH-RH plus antiandrogène non stéroidien ou orchidectomie) ou l’HT intermittente (cycles thérapeutiques de huit mois, avec les périodes sans médicament déterminées par le taux du PSA).
Les résultats montrent qu’après un suivi moyen de sept ans, il n’apparaît aucune différence significative de survie entre les deux groupes. Le nombre de décès est de 268 dans le groupe HT intermittente, contre 256 dans le groupe HT continue. La survie globale moyenne est respectivement de 8,8 ans et 9,1 ans dans les groupes HT intermittente et HT continue (le rapport de risque pour le décès est de 1,02; IC 95% : 0,86 à 1,21).
Bouffées de chaleur, libido, symptômes urinaires.
L’HT intermittente semble procurer un avantage sur certains facteurs de qualité de vie, avec des améliorations significatives sur les bouffées de chaleur, la libido et les symptômes urinaires, et une tendance vers une amélioration de la fatigue.
Si la différence de qualité de vie n’est pas aussi profonde qu’on pourrait l’espérer, toute l’étendue des différences pourrait ne pas avoir été capturée vu que l’évaluation était effectuée a intervalles réguliers, sans considération pour la phase on ou off du traitement.
« Les patients sous thérapie intermittente doivent être surveillés avec soin et le schéma d’administration des médicaments ainsi que les " congés de médicaments " ne doivent pas être arbitraires et devraient suivre le modèle procuré par cette étude », souligne le Dr Crook.
En outre, ajoute-t-elle, ces résultats ne doivent pas être extrapolés au cancer métastasé.
Enfin, l’étude n’a pas abordé la question de savoir quel est le moment optimal (ou le taux de PSA optimal) pour débuter l’hormonothérapie.
Crook et coll., New England Journal of Mediocine du 6 septembre 2012.
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