La tempête médiatique qui s’est attaquée aux statines est encore vivace, dans l’esprit des patients comme des médecins. La remise en cause de l’utilité de cette classe thérapeutique et la promotion de son caractère dangereux sur certains sites Internet et ouvrages tels que « La Vérité sur le cholestérol » du Pr Philippe Even continue de causer du tort aux patients.
Exemple frappant : une étude récente de l’European Heart Journal (1) réalisée au Danemark, suggère une corrélation temporelle entre la publication d’informations défavorables aux statines dans les médias grand public et le non-renouvellement d’une première ordonnance. Cette non-observance étant responsable de l’augmentation récente du nombre d’infarctus du myocarde au sein de la population danoise. « Les conséquences de la mauvaise presse des statines ne sont pas anodines : elles conduisent des patients à arrêter leur traitement, y compris des personnes en prévention secondaire ou à très haut risque vasculaire. Certains patients ayant des formes sévères d’hypercholestérolémies familiales refusent, désormais, d’être mises sous statines », souligne le Pr Éric Bruckert, chef du service d’endocrinologie et prévention des maladies cardiovasculaires au groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière (Paris).
Comme les antihypertenseurs, les statines font l’objet d’une importante littérature internationale. Toutes les études d’intervention menées sur cette classe thérapeutique montrent une diminution des événements cardiovasculaires. Leurs résultats sont, par ailleurs, similaires quels que soient la population et le sponsor de l’étude, y compris lorsque ce dernier est indépendant de l’industrie pharmaceutique. « Ces données – qui sont consistantes et cohérentes dans tous les pays – ont été regroupées par des méta-analyses de la revue Cochrane, qui confirment la diminution de la morbidité cardiovasculaire sous statines. Quelques extrémistes remettent en cause ces données scientifiques, de façon non fondée, et font plus de bruit que les 6 000 cardiologues qui prescrivent les statines au quotidien. Par ailleurs, certains sites internet reprennent ce discours anti-statines et en profitent pour vendre des produits dont l’efficacité contre le cholestérol n’a pas été démontrée », regrette le Pr Bruckert.
Des effets secondaires et risques mineurs
Parmi les effets secondaires des statines, les crampes et douleurs musculaires restent le principal problème en pratique clinique. En effet, peu d’études se sont penchées sur les effets secondaires musculaires de cette classe de médicaments, bien qu’elle soit utilisée depuis 30 ans. « Le mécanisme exact de ces effets secondaires musculaires n’est pas compris et l’identification des patients à risque n’est pas bien faite. On estime qu’environ 5 % des patients qui prennent des statines ont des effets secondaires musculaires. Pour la grande majorité, les troubles restent mineurs (fatigabilité, courbatures supportables…). Mais 1 % des patients ont des effets secondaires musculaires qui les empêchent de poursuivre leur traitement. Néanmoins, avec la médiatisation des discours anti-statines, les patients sont de plus en plus nombreux à se plaindre de douleurs musculaires », indique le Pr Bruckert.
Concernant le risque de diabète induit par la prise de statines – sujet hautement médiatisé – il s’avère mineur, de faible ampleur. « Les statines engendrent une petite augmentation de la glycémie (+ 0,1 % d’hémoglobine glyquée). Le risque de diabète concerne donc des personnes qui ont déjà une glycémie élevée. L’effet des statines sur la glycémie est négligeable par rapport à leurs bénéfices. La population diabétique bénéficie, d’ailleurs, particulièrement des statines en termes de prévention cardiovasculaire. Car, globalement, les statines sont plus efficaces que n’importe quel hypoglycémiant pour diminuer les événements cardiovasculaires », conclut le Pr Bruckert.
(1) Nielsen SF, et al. Eur Heart J. 2015 Dec 1. pii: ehv641
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