Rappelons que l’étude Fourier a porté sur 27 000 patients, en prévention secondaire (80 % d’IDM et 20 % d’AVC), dont 11 000 diabétiques de type 2. Ces patients ont reçu soit de l’evolocumab (Repatha, Amgen), soit un placebo.
Au terme de 2,2 ans, on observe une réduction significative du critère composite MACE, critère principal de l'étude (– 17 %; HR = 0,83 ; p = 0,0008 chez les diabétiques contre – 13 % ; HR = 0,87 ; p = 0,0052 chez les non diabétiques).
Le Dr Bertrand Cariou (Nantes) insiste sur un enseignement important de cette étude : le bénéfice cardiovasculaire, sans risque spécifique, s’observe sans effet seuil, même si le taux de LDL atteint 0,1 g/L.
Pas d’effet délétère sur le contrôle glycémique
Par ailleurs, on n’a pas enregistré d’accroissement de l’incidence de diabète chez les non-diabétiques, y compris chez les prédiabétiques (environ 10 000 patients). Il n’y a pas non plus de perturbation du contrôle glycémique chez les diabétiques de type 2.
Certes, reconnaît Bertrand Cariou, l’étude n’a duré que 2,2 ans, mais le suivi en ouvert de la cohorte de patients devrait nous rassurer complètement. « À Nantes, plus de 150 patients reçoivent un anti-PCSK9 depuis plus de 6 ans et la tolérance, notamment glycémique, est restée excellente », souligne-t-il.
Cette réassurance était particulièrement importante car des études génétiques ont établi une association entre déficit en PCSK9 et un risque accru de diabète de type 2 ainsi qu'un difficile contrôle glycémique chez les diabétiques. « Il faut savoir que les anti-PCSK9 ne bloquent que le PCSK9 circulant et pas au niveau cellulaire, ce qui peut expliquer cette absence d’effet délétère », explique le Dr Cariou.
Une diminution de la mortalité totale dans Odyssey
Il y a quelques jours, la présentation au congrès de l’American College of Cardiology (ACC) d’Odyssey Outcomes, réalisée avec l’alirocumab (Praluent, Sanofi Aventis), a complété les démonstrations des anti-PCSK9. Cette étude a porté sur 18 000 patients (30 % de diabétiques) présentant un syndrome coronaire aigu, avec un recul de 3 ans.
Pour ce qui est du MACE, les résultats d’Odyssey confirment ceux de l’étude Fourier (qui concernait, rappelons-le, des patients présentant une maladie coronaire stabilisée), avec une réduction de 15 % du MACE (p = 0,0003) dans la population globale. Tout comme dans l’étude Fourier, la mortalité cardiovasculaire n’est pas réduite de manière significative (2,2 % vs 2,3 % ; p = 0,38). À l’inverse, la mortalité globale a été significativement réduite (3,5 % vs 4,1 % ; p = 0,026), ce qui n’avait pas été le cas avec Fourier. Les résultats de sousgroupes de patients diabétiques n’ont pour l’instant pas été présentés.
La tolérance a été bonne, en particulier en ce qui concerne l’apparition de nouveaux diabète (9,6 %, vs 10,1 % sous placebo). Odyssey met aussi en évidence un bénéfice particulièrement marqué quand le taux de LDL est initialement supérieur à 100 mg/dL, en particulier sur les critères de MACE, mortalité cardiovasculaire et totale, bien que le taux de LDL à l’inclusion ne soit pas un critère confondant significatif.
Après cette présentation, Sanofi a annoncé sa volonté de proposer une réévaluation du prix de sa molécule, sur la base d’une étude du rapport coût-bénéfice chez les patients à risque élevé, dont le taux de LDL est supérieur à 100 mg/dL.
Des études complémentaires
À côté de ces deux grands essais, le Dr Cariou tient à en mentionner d’autres, de moindre envergure et de plus courte durée (6 mois) mais précisant les effets des anti-PCSK9. Deux seront présentés lors du congrès de la SFD (qui débutera demain le 20 mars), l’un montrant que l’efficacité est équivalente chez les diabétiques (de type 1 et 2) sous insuline, l’autre révélant que, dans les hyperlipidémies mixtes, l’action des anti-PCSK9 ne s’exerce que sur le LDL-cholestérol.
D'autres pistes génétiques
Le duel alirocumab-evolocumab va-t-il être troublé par l'intrusion de l’inclisiran (Alnylam), ARN interférent qui bloque l’expression du gène PCSK9 au niveau hépatique ? L’intérêt principal de cette molécule serait de permettre une injection (sous-cutanée) tous les 3 ou 6 mois, alors que les spécialités disponibles, en nécessitent 12 à 56 à l'année.
A priori, le fait que le blocage survienne spécifiquement au niveau des cellules hépatiques (épargnant les cellules β) suggère que la tolérance glycémique sera satisfaisante. Plusieurs études de phase III (programme Orion), en cours, permettront de préciser la place de l’inclisiran.
À plus long terme, des essais de phase II vont préciser l’innocuité et l’efficacité d’un vaccin anti-PCSK9. Mais cela est une autre histoire.
Le problème du coût
Tous ces travaux témoignent de l’intérêt de la diabétologie pour les anti-PCSK9, avec des démonstrations de plus en plus nombreuses et concordantes. Mais, conclut le Dr Cariou, tous les diabétologues ont conscience du problème du coût, actuellement très élevé, de ces produits. Un paramètre qui sera sûrement déterminant pour leurs indications futures.
Entretien avec le Dr Bertrand Cariou (Nantes)
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