Comment expliquer la prédisposition observée au sein de certaines familles à développer plusieurs maladies auto-immunes (MAI) ? Ce trait héréditaire est-il dû à des facteurs de risque génétiques pléiotropes ou à l’inverse indépendants et multiples ? Des généticiens américains publient dans « Nature Communications » des éléments en faveur d’une hérédité partagée parmi 9 MAI à début pédiatrique.
Selon l’équipe dirigée par le Pr Hakon Hakanarson de l’hôpital pédiatrique de Philadelphia, les MAI ont des « tableaux génétiques » qui se chevauchent, ce qui semble expliquer la co-transmission de certaines d’entre elles chez un même individu ou dans une même famille. Pour le Pr Hakanarson, l’auteur principal : « Ces résultats aident à comprendre la composante génétique de ces maladies et comment elles sont génétiquement liées entre elles (...)». Les MAI sont des maladies polygéniques fréquentes, concernant 7 à 10 % de la population de l’hémisphère Nord, dont les traitements restent assez limités.
Neuf maladies auto-immunes au crible
Particularité de cette étude chez l’enfant par rapport à ce qui a été précédemment constaté chez l’adulte, le poids de l’hérédité joue un rôle plus fort dans leur survenue. « Ceci fait sens sur le plan biologique, explique le Pr Hakanarson, parce que les enfants ont été moins exposés aux facteurs environnementaux que les adultes pour en avoir un effet ». Chez l’adulte, des facteurs précipitant la survenue de MAI, comme les infections virales ou certaines prises médicamenteuses, ont été identifiés dans le DT1, le LED ou la maladie cœliaque.
Dans cette étude pangénomique sur les polymorphismes, les chercheurs ont exploité les données fournies par plus de 20 hôpitaux américains chez plus de 5 000 patients non apparentés ayant au moins une MAI.
Les résultats ont été comparés à ceux de 36 000 témoins sains. Neuf MAI ayant débuté dans l’enfance ont été examinées : diabète de type 1 (DT1), maladie cœliaque, arthrite juvénile idiopathique (AJI), maladie de Crohn (MC), recto-colite hémorragique (RCH), le lupus érythémateux disséminé (LED), le déficit immunitaire commun variable (DICV), le psoriasis et les spondylarthropathies (SP).
Vers une médecine de précision
La part de l’hérédité liée aux polymorphismes était la plus forte pour le DT1, l’AJI et la maladie cœliaque, et la plus faible pour les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), la MC et la RCH. Ce dernier résultat, obtenu malgré une taille d’échantillon bien plus importante, suggère que « les facteurs environnementaux jouent un rôle bien plus important dans l’étiologie de la maladie », indiquent les auteurs. Ce résultat est concordant avec « le rôle clef du microbiome intestinal et de la flore fécale dans la survenue et la sévérité des MICIs », précisent-ils plus loin. D’ailleurs, les MICI à début dans l’enfance se développent après la puberté. Quant au LED, la part de l’hérédité était faible, ce qui va dans le sens de la responsabilité de facteurs environnementaux et épigénétiques mise en lumière dans plusieurs études.
A contrario et de façon étonnante, l’hérédité s’est révélée forte dans l’AJI, dont la présentation clinique est pourtant très hétérogène avec 7 sous-types décrits. La MC et la RCH étaient fortement associées, et juste après vient le couple DICV et AJI. Quelques associations négatives ont aussi été observées, comme LED-MC, SP-MC, psoriasis-RCH et psoriasis et DT1. Si le complexe majeur d’histocompatibilié (CMH) a une contribution majeure dans l’hérédité spécifique à la maladie, en particulier pour le DT1 et l’AJI, ces molécules du système de reconnaisance du soi sont très peu impliquées dans la co-transmission en « paires ». Pour le Pr Hakanarson, l’ensemble des résultats permettra de mettre au point des outils prédictifs chez les sujets à risque mais aussi de développer de nouvelles thérapies pour des sous-groupes de patients parmi plusieurs MAI, qui partagent « les mêmes variants génétiques (...). C’est le fondement de la médecine de précision ».
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