Maladie génétique fréquente, l'hypercholestérolémie familiale (HF) concerne entre 225 000 et 270 000 personnes en France. Aujourd’hui, seules 5 % d’entre elles sont dépistées. Face à ce constat, l’Association nationale des HF (Anhet.f) estime que le dépistage pédiatrique précoce de ce trouble métabolique devrait être systématique en France et met tout en œuvre pour inciter les pouvoirs publics à agir en ce sens.
La situation est en effet préoccupante, car, en l'absence de diagnostic et de traitement, les enfants porteurs de la forme la plus grave de la maladie (homozygote) peuvent être victimes d'un accident neurocardiovasculaire fatal avant 12 ans. Et ceux atteints de la forme la plus fréquente (hétérozygote) risquent, quant à eux, de présenter un accident vasculaire cérébral (AVC) ou un infarctus du myocarde avant 50 ans, voire 30 ans.
Améliorer l'interrogatoire clinique
Le dépistage de l'HF est pourtant simple et peu coûteux : une prise de sang, effectuée avant le troisième anniversaire de chaque enfant, permettrait d'éviter 6 500 accidents cardiaques aigus chaque année. Or, en France, plus de 90 % des personnes présentant une HF ignorent qu'elles sont atteintes de cette maladie et ne sont donc pas traitées.
Rechercher les familles à risque apparaît ainsi comme une nécessité. Il existe deux formes d’hypercholestérolémie : monogénique et polygénique. Tout l’enjeu de l’interrogatoire clinique du patient est de rechercher la dimension monogénique de la maladie. « La forme familiale monogénique relève de la mutation d’un gène chez un individu. L’enfant d’un parent atteint de cette forme monogénique a un risque sur deux d’hériter de cette forme familiale de l’HF », souligne la Pr Catherine Boileau, cheffe de service du département de génétique de l’hôpital Bichat.
L’autre forme d’hypercholestérolémie, celle dite polygénique, n’est pas héréditaire. Chez un individu, il existe des variations de l’ADN sur différents gènes dans l’organisme. « Les protéines synthétisées à partir de ces gènes variants ne vont pas avoir une efficacité optimale et donc le métabolisme du cholestérol ne sera pas efficace. L'individu va avoir tendance à développer un cholestérol élevé, aggravé par un environnement permissif : sédentarité, mauvaise hygiène diététique… », précise la Pr Boileau, qui est par ailleurs lauréate du Grand Prix scientifique de la Fondation Lefoulon-Delalande de 2018 pour avoir codécouvert le rôle du gène PCSK9 dans le métabolisme du cholestérol.
Des traitements efficaces
Le taux de LDL-C d’une personne atteinte d’HF peut être ramené au niveau des valeurs habituelles par la prise de médicaments dès la plus tendre enfance. Chez les enfants, les statines peuvent être prescrites dès l’âge de huit ans. Et une nouvelle génération de médicaments à base d’inhibiteurs de la protéine PCSK9 (injections sous-cutanées), nouvelle classe d’hypolipémiants, est également très efficace.
« Or, en France, les anti-PCSK9 ne sont prescrits qu’en prévention secondaire (après un accident cardiovasculaire), et sont seulement dans ce cas remboursés par la sécurité sociale », déplore le Pr Éric Bruckert, chef de service endocrinologie et prévention cardiovasculaire (hôpital de la Pitié Salpêtrière/Sorbonne Université à Paris). Une situation « regrettable », alors « qu'il y a des cas critiques pour lesquels les anti-PCSK9 devraient être également prescrits, estime-t-il. Il s’agit des malades traités par statines et ézétimibe conservant des taux de cholestérol très élevés et une atteinte vasculaire sévère, mais qui n’ont pas eu d’accident cardiaque. Ou encore, des malades pour qui il y a une contre-indication majeure à prescrire des statines comme les myopathes atteints d’HF. »
L'HF reste largement sous-diagnostiquée et sous-traitée. Une étude menée par la Fédération française de cardiologie auprès d’un panel de 495 médecins (cardiologues, endocrinologues/diabétologues, gynécologues, médecins généralistes) en 2018 révèle « une large sous-estimation du risque cardiovasculaire des patients atteints de HF et une forte inertie thérapeutique dans leur prise en charge ». Renforcer la formation des médecins au dépistage et à la prise en charge de cette maladie est donc indispensable.
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