LES ADOLESCENTS qui souffrent d’hypogonadisme hypogonadotrophique consultent pour absence ou retard de puberté. Âgés de 15 à 21 ans, les garçons ne sont toujours pas virilisés. Sur le plan hormonal, ils présentent une testostérone totale effondrée pour leur âge (dans 90 % des cas < 1 ng/ml) alors qu’elle est normalement comprise entre 3 et 9 ng/ml. Quant aux gonadotrophines LH et FSH, elles sont soit très basses, soit dans les limites de la « normale ». Chez les filles, âgées de 15 ans, le retard pubertaire se manifeste par une aménorrhée primaire. Sur le plan hormonal, elles présentent un œstradiol bas et des gonadotrophines LH et FSH, effondrées ou dans l’intervalle dit normal.
L’hypogonadisme hypogonadotrophique est à différencier du retard pubertaire simple, une autre situation assez fréquente chez le garçon, où la puberté survient spontanément vers l’âge de 16-18 ans au lieu de 13-14 ans. Quelqu’en soit sa cause, l’absence de développement pubertaire est mal tolérée psychiquement, du fait du regard des autres adolescents sur eux. C’est une entité que les médecins doivent connaître, l’erreur principale à éviter étant de banaliser cette situation. Attention également au piège diagnostic des patients qui peuvent présenter un certain degré de pilosité pubienne et axillaire, rassurant à tort les médecins ! En effet, peuvent avoir un hypogonadisme hypogonadotrophique, même sévère, des enfants avec une pilosité pubienne quasi normale mais avec un volume testiculaire pré-pubère. En effet, le premier signe de la puberté normale chez le garçon est l’augmentation du volume testiculaire (› 4 ml). D’où l’importance d’examiner les testicules et de connaître le volume testiculaire en fonction de l’âge. La présence des poils chez les sujets hypogonadiques s’explique par une conversion tissulaire des androgènes surrénaliens en testostérone et dihydrotestostérone. Les filles peuvent également avoir un développement mammaire et une pilosité pubienne quasiment normaux, associés à une aménorrhée primaire.
Chez un enfant de 15 ans, le résultat des dosages hormonaux permet de poser assez facilement le diagnostic.
Lorsque la testostérone est basse, inadaptée à l’âge, et que les gonadotrophines sont basses ou « normales », il peut s’agir d’un hypogonadisme hypogonadotrophique congénital ou d’un retard pubertaire simple. Dans la majorité des cas, il s’agit d’un retard pubertaire simple qui nécessite néanmoins l’avis d’un spécialiste pour le traitement de l’enfant.
Dans les autres cas, il s’agit d’un hypogonadisme hypogonadotrophique congénital.
L’interrogatoire recherche une absence de perception des odeurs (anosmie) car une absence congénitale d’odorat associée à un retard pubertaire signe un syndrome de Kallmann de De Morsier. C’est une maladie génétique, souvent familiale, qui peut être apparemment sporadique. Parfois, ce n’est pas l’enfant impubère lui-même qui présente l’anosmie, mais sa mère, un frère un oncle etc., la pénétrance des signes n’étant pas toujours complète. À l’hôpital Bicêtre, un interrogatoire sur les capacités olfactives est toujours mené et une olfactométrie systématiquement demandée, si l’olfaction est apparemment normale chez tous les patients qui présentent un retard pubertaire avec testostérone basse et gonadotrophines basses ou normales. En effet, autant une anosmie est assez facile à diagnostiquer (si on pense à le demander), autant ce n’est pas le cas pour une hyposmie, le patient n’ayant pas conscience de son déficit. Des tests semi-quantitatifs permettent alors d’évaluer l’odorat de ces patients. En cas d’hypogonadisme hypogonadotrophique congénital ou syndrome de Kallmann, des tests génétiques permettent de préciser les formes génétiques : forme autosomique dominante, forme autosomique récessive, forme liée à l’X, etc. Cette évaluation moléculaire est essentielle pour le conseil génétique.
Une dizaine de gènes de la maladie ont été découverts : KAL1 le premier, par une équipe française, dont la mutation est responsables de la forme liée à l’X ; FGFR1 dont la mutation est responsable de la forme autosomique dominante ; (WRD11 ?) le dernier, il y a quelques jours.
L’Institut Pasteur, l’hôpital Cochin et l’hôpital Bicêtre ont contribué à la découverte de quatre d’entre eux.
À côté du micropénis et de la cryptorchidie qui peuvent se voir dans toutes les causes d’hypogonadisme hypogonadotrophique congénital ou syndrome de Kallmann, d’autres signes, inconstants, peuvent se voir dans le syndrome de Kallmann, selon la forme génétique : une surdité, un ptôsis, des mouvements en miroir des membres supérieurs ou syncinésies controlatérales d’imitation, une fente labio-palatine (forme autosomique dominante ave FGFR1), un rein en fer à cheval ou une agénésie rénale unilatérale (surtout forme liée à l’X avec KAL1).
Lorsque l’odorat du patient est normal chez le propositus et sa famille, la maladie (dite non syndromique et normosmique) est plus rassurante que le syndrome de Kallmann, car elle est pratiquement toujours autosomique récessive. Il n’y a pas de transmission à la descendance, sauf en cas consanguinité. Dans ces formes normosmiques, trois des 5 gènes responsables ont été découverts à l’hôpital Bicêtre. Au total, 70 à 80 % des gènes responsables des hypogonadismes hypogonadotrophiques (12) ont été découverts en France ce qui est un joli succès pour notre pays.
Dès que le diagnostic est posé, un traitement hormonal est institué pour induire la puberté : testostérone pour les garçons, oestro-progestatifs pour les filles. Ultérieurement, le traitement de l’infertilité consiste en l’injection de gonadotrophines : FSH et hCG (avec 80 % de succès), de GnRH pulsatile à la pompe combinés parfois à une procréation médicale assistée.
D’après un entretien avec le Pr Jacques Young, hôpital de Bicêtre, le Kremlin-Bicêtre.
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