L’Afssaps précise les recommandations de suivi des patients traités par Mediator, qu’elle avait émises il y a 1 an lors de la suspension d’AMM du benfluorex. Différentes données, en particulier une étude de la CNAM rendue fin septembre à l’autorité sanitaire, ont apporté un éclairage nouveau sur l’impact de la molécule dans la survenue de valvulopathies. « Il est apparu que le risque de développer une valvulopathie augmente après 3 mois de traitement, explique Jean Marimbert, Directeur général de l’Afssaps. Il est clair également que le risque est maximal dans les deux premières années d’utilisation et persistent deux ans après son arrêt avant de rejoindre le niveau d’une population non exposée». Ce sont ces données « dynamiques» sur la survenue des lésions valvulaires qui ont permis à l’Afssaps d’ajuster ses recommandations de 2009. Elles stipulaient alors que, par mesure de précaution, les patients traités quelles que soient la dose et l’ancienneté de l’exposition étaient invités à consulter un médecin sans urgence.
Lettres au prescripteur et aux patients
Désormais, il est conseillé aux patients ayant pris du benfluorex pendant une période d’au moins 3 mois au cours des quatre dernières années de commercialisation (entre 2006 et 2009) de consulter leur médecin traitant afin qu’il recherche à l’interrogatoire et l’examen clinique tout signe évocateur d’une atteinte valvulaire. Si c’est le cas (souffle cardiaque, essoufflement à l’effort) ou s’il existe une simple suspicion, le patient doit être adressé à un médecin spécialisé cardiologue pour la réalisation d’une échocardiographie. D’après les recommandations les plus récentes, il est inutile de prescrire une antibioprophylaxie systématique lors de soins dentaires ou de procédure invasive pour les valvulopathies non opérées. Pour diffuser l’information, l’Afssaps a prévu d’envoyer une lettre aux prescripteurs mais également de charger la CNAM d’envoyer un courrier aux patients traités entre novembre 2008 et novembre 2009 (compte tenu du délai légal de 2 ans de conservation des données nominatives).
Changement d’échelle début 2009
« Sur les 300 000 patients traités suivis sur une période de 4 ans et demi par la CNAM, il y a eu 597 hospitalisations pour insuffisance valvulaire, 64 décès dont 46 secondaires à la valvulopathie. On peut tenir pour certain qu’une centaine de décès sont dus au benfluorex sur cette période, et, par extrapolation, au moins 500 au cours des trente dernières années depuis sa commercialisation », affirme Jean Marimbert. Alors pourquoi ne pas avoir réagi plus tôt ? « Il a fallu attendre la déclaration du 2e cas français fin 2008 par le Dr Irène Frachon à Brest pour que le tableau se dessine, explique Jean Marimbert. Avant, il n’y avait pas matière à se prononcer faute de données robustes de pharmacovigilance». Tout s’est accéléré en effet. Une série de cas venant de Brest, d’Amiens et d’autres sites hospitaliers est apparue : 42 cas entre janvier et novembre 2009. Dix-neuf autres sont apparus après la suspension d’AMM. Aucun pays européen n’a réagi auparavant. Pour le Portugal en 2003, c’est le laboratoire Servier qui n’avait souhaité à l’époque reconduire le renouvellement quinquennal. Quant aux États-Unis, le médicament n’y a jamais été commercialisé. « Si la décision avait été prise avant 2009, elle aurait jugée non recevable», se défend le Directeur Général de l’Afssaps.
Comment expliquer que la pharmacovigilance n’ait rien vu venir ? La parenté avec des anorexigènes retirés du marché pour effet indésirable grave comme l’isoméride en 1996 est connue depuis toujours. « Les molécules n’appartiennent pas à la même classe pharmacologique, précise Jean Marimbert. D’ailleurs, il s’agit bien de situations différentes. Alors que l’isoméride augmente le risque d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), il s’agit de valvulopathies pour le benfluorex». Des enseignements ont été tirés en pharmacovigilance. L’Afssaps propose d’étendre la notification spontanée aux patients, comme elle l’avait fait l’année dernière pour la grippe, et de développer la pharmaco-épidémiologie à l’aide des bases de données existantes, comme la Cnam, l’Insee et le PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information).
Conférence de presse de l’Afssaps du 16 novembre 2010.
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