L'Office européen des brevets (OEB) a finalement adopté, ce mercredi 5 octobre, une position intermédiaire dans le conflit qui oppose Médecin du monde et d'autres associations au laboratoire Gilead au sujet de la légalité du brevet du Sovaldi.
Ce médicament indiqué dans le traitement de l'hépatite C, au cœur de tous les débats sur les prix des nouveaux traitements de l'hépatite C, est toujours protégé par un brevet, mais pas son principe actif, le sofosbuvir. « Le brevet a été maintenu sous une forme modifiée. Le sofosbuvir comme revendiqué dans la version du brevet délivrée n'est plus contenu dans la présente forme du brevet, mais les autres composantes le sont », explique au « Quotidien » Rainer Osterwalder, le porte-parole de l'OEB.
Cette décision pour le moins paradoxale est justifiée par l'OEB qui estime que l'application de demande de brevet du sofosbuvir était très large et ne correspond pas à la molécule qui est actuellement sur le marché. Plusieurs phases de développement sont en effet intervenues entre-temps.
Un brevet fragilisé mais toujours valide
Le brevet européen sera donc amendé en conséquence. Pour Médecin du monde, cette décision est une demi-victoire. L'ONG avait en effet déposé 11 motifs de contestation du brevet du sofosbuvir rassemblés en 5 ou 6 grandes décisions par le jury de l'OEB, et l'absence de conformité n'était qu'une question mineure de fond de cette liste. La question de fond concernait le « manque d’activité inventive ». Au bout de 2 jours de débats, l'OEB a finalement donné raison au laboratoire sur ce point.
« Cela prouve néanmoins que les bases du brevet de Gilead ne sont pas aussi solides que cela, affirme au « Quotidien » Olivier Maguet, responsable de la mission « prix des médicaments » à MDM. « Nous sommes dans un flou juridique qui ne sera tranché que le jour où il y aura un contentieux entre Gilead et un laboratoire souhaitant commercialiser une spécialité contenant du sofosbuvir. »
Pour Médecin du monde, ce jugement prouve qu'il existe « une perversion du principe de brevetabilité ». « Nous voudrions demander aux régulateurs s'il accepte de payer un prix facial de 41 000 euros sur la base d'un brevet bancal », interroge Olivier Maguet. Pour Tahir Amin, de l'Initiative pour les médicaments, l'accès et le savoir (I-MAK), « cette décision va dans le sens du combat mené au niveau mondial pour dénoncer le détournement par les laboratoires pharmaceutiques de l’esprit et les principes de la brevetabilité. Des pays comme la Chine, l’Ukraine et l’Égypte ont été clairs en rejetant pleinement les demandes de brevet de Gilead sur le sofosbuvir ».
Une décision sans conséquence, selon Gilead
Cette analyse n'est évidemment pas partagée par Nick Francis, le responsable de la communication de Gilead présent lors des délibérations. « Personne ne pourra commercialiser de sofosbuvir en Europe car notre brevet est toujours valide, et cette décision n'aura donc pas de conséquence, affirme-t-il au « Quotidien ». Nous accueillons favorablement la confirmation de l'Office européen des brevets que notre revendication sur le sofosbuvir est en ligne avec la loi européenne sur la propriété intellectuelle. »
La décision rendue aujourd'hui peut être contestée en deuxième instance devant une chambre de recours de l'OEB.
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