La recherche est rarement superflue. Même dans les pathologies fréquentes et bénignes qui posent peu de problèmes en routine. C’est ce que démontre une étude française multicentrique coordonnée par le Pr Jean-Marc Regimbeau du CHRU d’Amiens en apportant la preuve de l’inutilité des antibiotiques dans la période postopératoire d’une cholécystectomie réalisée pour cholécystite aiguë lithiasique non grave, ce qui représente 90 % des cas au total.
S’il existait des preuves de l’intérêt des antibiotiques en pré- et peropératoire, rien n’était validé en post-cholécystectomie. Le fait d’enlever le foyer infectieux pouvait changer la donne, toute l’originalité de ce travail est d’avoir osé poser la question.
« Pour faciliter les choses et obtenir des résultats rapidement, l’étude a été menée en ouvert et sans placebo, et ce sont ces principales limites, a concédé le Pr Regimbeau. Pour s’assurer que le critère principal a été bien évalué, 10 % des dossiers tirés au hasard ont été relus par 2 chirurgiens indépendants. Il n’y a eu désaccord que pour 2 cas seulement. » Entre mai 2010 et août 2012, l’étude publiée dans « JAMA » a inclus 414 patients ayant une forme de grade I (faible gravité) ou II (gravité modérée) de la classification de Tokyo. Le taux d’infections dans les 4 semaines postopératoires était statistiquement identique dans le groupe non traité et celui ayant continué le protocole antibiotique les 5 jours suivant la chirurgie, à savoir 2 g d’amoxicilline plus acide clavulanique 3 fois/jour. La sévérité des complications (score Clavien) s’est révélée comparable avec ou sans antibiotique.
Limiter la pression de sélection
Les avantages à abandonner les antibiotiques sont nombreux. « Les pratiques se simplifient, mais ce n’est pas tout, a expliqué le chirurgien. Sur le plan infectieux, cette mesure permet de diminuer la pression de sélection bactérienne et de limiter l’émergence d’une résistance aux antibiotiques. Il y a moins d’effets secondaires liés à la prise d’antibiotiques, moins d’infections gynécologiques et surtout moins de colites pseudo-membraneuses à Clostridium difficile. D’où des coûts moindres avec des économies générées à la fois sur le médicament et sur les soins des complications ».
L’étape suivante est de faire accepter le concept médical en pratique. « Nous nous apprêtons à mesurer son applicabilité dans 10 des 17 centres participants à distance de 1 à 2 ans de l’étude. Les réticences viennent surtout de la part des jeunes chirurgiens, qui sont encore absorbés par l’apprentissage du métier », relève le Pr Regimbeau. Près de 40 000 cholécystectomies sont réalisées pour cholécystites aiguës en France chaque année. Aux États-Unis, le phénomène concerne environ 20 % des 750 000 interventions, soit 150 000 patients par an. La cholécystectomie aiguë lithiasique est la 3e cause d’admission aux urgences chirurgicales.
JAMA, publié en ligne le 8 juillet2014
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