Les anti-TNF ont révolutionné la prise en charge des MICI, mais leur coût est élevé. Ainsi, à l’expiration de leur brevet, sont apparus les biosimilaires dont les propriétés physico-chimiques et biologiques sont similaires au médicament de référence. Approuvés pour les mêmes indications que le princeps, leur efficacité et sécurité doivent être équivalentes. Si leur non-infériorité vis-à-vis du médicament référent est confirmée dans l’une des indications, leur efficacité peut être extrapolée à l’ensemble des indications du princeps.
L'infliximab en premier
Le premier biosimilaire (CT-P13) apparu en 2015 dans les MICI est celui de l’infliximab princeps. « Sa biosimilarité avait été établie sur la base d’études pharmacologiques et cliniques menées en rhumatologie (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante) et a été extrapolée au MICI, d'où un accueil très prudent avec notamment une inquiétude sur l’immunogénicité et un scepticisme concernant l’interchangeabilité, explique la Pr Vered Abitbol (Hôpital Cochin). Depuis, l’efficacité et la tolérance des biosimilaires de l'infliximab (CT-P13 et les autres) ont été largement démontrées dans de nombreuses études ».
Une méta-analyse récente (1) portant sur 32 études (3 464 patients atteints de MICI) a notamment confirmé que le CT-P13 était aussi efficace et bien toléré que l’infliximab princeps chez des patients naïfs, mais aussi en cas de switch.
Quant à l’immunogénicité croisée CT-P13 et princeps, elle a été évaluée dans une étude portant sur les sérums de 125 patients atteints de MICI (2). « Les résultats montrent que les anticorps anti-infliximab princeps reconnaissent et inhibent CT-P13 de façon similaire suggérant une immunogénicité similaire ».
Une interchangeabilité confirmée
La première expérience française de switch systématique de l’infliximab princeps à son biosimilaire a été réalisée à l’hôpital Cochin (3). Dans cette étude observationnelle prospective, tous les patients adultes (n = 260) souffrant de polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante ou MICI et recevant un traitement d’entretien avec l’infliximab princeps, ont été systématiquement traités par le biosimilaire.
Aucun changement concernant l’efficacité, la tolérance ou l’immunogénicité n’a été observé. Une autre étude observationnelle, sur trois ans, a évalué l’immunogénicité chez des patients atteints de maladies inflammatoires chroniques et ayant subi des switchs successifs avec différents biosimilaires d'infliximab (CT-P13, SB2) (4). Là encore, l’immunogénicité n’a pas été modifiée.
De nombreux biosimilaires d'adalimumab
« Les biosimilaires d'adalimumab sont apparus en octobre 2018, à l’expiration du brevet de l’Humira, le médicament le plus lucratif au monde avec des ventes qui dépassaient 18,4 milliards de dollars en 2017 , déclare la Pr Abitbol. Différentes mesures incitant à la prescription des biosimilaires ont été prises. Le plan biosimilaires 2018-2022 a fixé un objectif de 80 % de prescriptions en 2022. Depuis 2018, six biosimilaires d'adalimumab sont disponibles et leur pénétration est bonne. Deux autres devraient arriver fin 2021. Lequel prescrire ? Si tous ont la même efficacité, ils peuvent être différents par leurs excipients ou leur présentation (stylo, seringue pré-remplie…) ».
Améliorer l'acceptabilité des patients
Dans l’étude de switch menée à Cochin dans un cadre de pratique clinique réel, la persistance globale sous CT-P13 était de 85 % à la troisième perfusion et de 77 % à 8,5 mois (3). De plus, la majorité des cas d’arrêts (80 %) l’ont été en raison d’une inefficacité ressentie sans preuve objective de récidive inflammatoire (absence de modification des paramètres : CRP, gonflement des articulations…), ce qui suggère un effet nocebo responsable de l’arrêt de traitement après switch.
« L’enjeu actuel est donc de prévenir cet effet nocebo. Cela passe par une bonne information des soignants et communication avec les patients, souligne la Pr Abitbol. Médecins et pharmaciens jouent un rôle important dans le transfert de confiance des patients envers les biosimilaires. Des séances d’éducation thérapeutique peuvent aussi aider à cette mise en confiance ».
(1) Ebada M. et al. An updated systematic review and meta-analysis about the safety and efficacy of infliximab biosimilar, CT-P13, for patients with inflammatory bowel disease. Int J. Colorectal Dis. 2019 (10) : 1633-52.
(2) Ben-Horin S et al. Cross-immunogenicity : antibodies to infliximab in Remicade – treated patients with IBD similarly recognise the biosimilar Remsima. Gut 2016(7) :1132-8.
(3) Avouac J. et al. Systematic switch from innovator infliximab to biosimilar infliximab in inflammatory chronic diseasess in daily clinical practice : the experience of Cochin University Hospital, Paris, France. Semin Arthritis Rheum 2018 ;47(5) :741-48.
(4) Lauret A. et al. Effects of successive switches to different biosimilars infliximab on immunogenicity in chronic inflammatory diseases in daily clinical practice. Semin Arthritis Rheum 2020 ;50 (6) : 1449-56.
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