LE POLYMORPHISME génétique correspond aux variations de la séquence nucléotidique d’un gène. Les polymorphismes les plus fréquents sont dus à un seul nucléotide (SNP : single nucleotide polymorphism). Ils désignent la variation d’une seule paire de bases du génome d’un individu. Plusieurs millions de SNP ont été identifiés dans le génome humain. La plupart n’ont aucune traduction phénotypique. Certains, cependant, peuvent avoir un retentissement sur la sévérité d’une maladie ou sur la susceptibilité aux traitements.
Le récepteur bêta-adrénergique est composé de 413 acides aminés (1). Il est codé par un gène de petite taille qui est l’objet de plusieurs polymorphismes. Ces mutations qui peuvent être hétérozygotes ou homozygotes, ne semblent pas plus fréquentes chez les sujets asthmatiques que chez les sujets normaux et ne sont donc pas causales dans la maladie (2). La mutation la plus fréquente concerne l’acide aminé en position 16 qui peut être, soit de la glycine, soit de l’arginine. Elle pourrait jouer un rôle dans la sévérité d’un asthme. Ainsi, le génotype homozygote 16 arg/arg serait associé à une plus grande hyperréactivité bronchique (3) et à une plus grande sensibilité aux effets néfastes du tabac (4) que le génotype 16 gly/gly. Dans un article récent (5), une analyse génétique a été effectuée chez des enfants admis en unité de soins intensifs pour une exacerbation sévère d’asthme entre 2002 et 2005. Elle a montré que, bien que tous les enfants avaient un score d’asthme identique à l’admission, la durée d’hospitalisation, la durée de traitement et le besoin en bêta-2 mimétiques (IV) a été moindre chez les enfants ayant un génotype 16 gly/gly (n = 13) que chez ceux ayant un génotype 16 arg/arg (n = 8) ou 16 arg/gly (n = 16), confirmant une différence de sévérité de l’asthme en fonction du génotype.
Qu’en est-il de la réponse aux bêta-2 mimétiques ?
L’étude BARGE (Beta-Adrenergic Response by Genotype), publiée en 2004, a montré, sous salbutamol, une amélioration des patients ayant le génotype 16 gly/gly alors que ceux ayant le génotype 16 arg/arg avaient tendance à s’aggraver (6). Il semblait donc que le polymorphisme pouvait avoir un retentissement sur la sensibilité au traitement par bêta-2 mimétique d’action rapide. En accord avec ces résultats,Taylor et coll. (7) ont constaté, dans une analyse rétrospective de 115 sujets asthmatiques, que les patients homozygotes 16 arg/arg présentaient plus d’exacerbations pendant un traitement chronique par salbutamol que les patients arg/gly et gly/gly.
Un travail publié en 2007 a apporté une réponse différente (8). Cet article relate deux études dans lesquelles différents schémas thérapeutiques associant un bêta-2 mimétique de longue durée d’action et un corticoïde inhalé (salmétérol/fluticasone : n = 2250 ; formotérol/budésonide : n = 405) ont été administrés à des asthmatiques pendant 6 à 7 mois. Le nombre d’exacerbations, la nécessité de recourir à des cures courtes de corticoïdes par voie orale et les autres paramètres respiratoires n’ont pas différé, que les patients aient un génotype gly/gly, gly/arg ou arg/arg.
Ces résultats ont été confirmés par Wechsler en 2009 (9). Dans une étude multicentrique randomisée en double aveugle contre placebo réalisée chez des asthmatiques modérés : 42 patients 16 arg/arg et 45 patients 16 gly/gly ont été appariés. Pendant 4 mois, ils ont reçu, soit du salmétérol, soit un placebo ainsi qu’une dose fixe de béclométasone. Le débit de pointe (DEP) mesuré le matin chez tous les patients n’a pas varié pas en fonction du génotype. Il en a été de même pour le nombre d’exacerbations et la symptomatologie. Quel que soit le génotype, l’amélioration de la fonction respiratoire a été supérieure quand le bêta-2 mimétique de longue durée d’action était ajouté au corticoïde inhalé (salmétérol contre placebo).
Ces résultats conduisent le Pr A.B. Tonnel à conclure : « Si la première étude (6) était inquiétante, les deux autres sont rassurantes (8, 9). Nous pouvons continuer à traiter nos asthmatiques par les associations d’un bêta-2 mimétique de longue durée d’action à un corticoïde, comme le préconisent les recommandations ; il n’y a nul besoin d’étudier leurs caractéristiques génétiques avant de décider du traitement. »
D’après un entretien avec le Pr André-Bernard Tonnel (Lille).
(1) Johnson M. Am J Respir Crit Care Med 1998;158(5 Pt 3):S146-53.
(2) Reihsaus E, et al. Am J Respir Cell Mol Biol 1993;8:334-9.
(3) Zhang G, et al. Pediatr Pulmonol 2006;41:1233-41.
(4) Wang C, et al. Pediatrics 2008;122:e107-14.
(5) Carroll CL, et al. Chest 2009;135:1186-1192
(6) Israel E, et al. Lancet 2004;364:1505-12.
(7) Taylor DR, et al. Thorax 2000;55:762-7.
(8) Bleecker ER, et al. Lancet 2007;370:2118-25.
(9) Wechsler ME, et al. Lancet 2009;374:1754-64.
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