« Cette découverte nous montre une autre façon de voir la maladie et ouvre la possibilité de nouvelles options thérapeutiques, ce qui pourrait considérablement soulager le fardeau de la maladie de Crohn, explique le Dr James Lee (université de Cambridge, Royaume-Uni), premier signataire de l’étude publiée dans la revue Nature Genetics. De plus, les données indiquent que certains de ces gènes de pronostic seront communs à d’autres maladies auto-inflammatoires, et par conséquent cette approche pourrait permettre d’améliorer le traitement d’un certain nombre de maladies. »
Le génome de plus de 2 700 patients
La maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI), dépend à la fois de facteurs génétiques, environnementaux et microbiens. Son évolution par poussées est imprévisible et très variable d’un patient à l’autre, allant d’une maladie légère peu évolutive à une maladie invalidante nécessitant immunosuppresseurs et chirurgie. Les études génétiques ont permis d’identifier plus de 170 variations génétiques communes qui majorent le risque de développer la maladie de Crohn, mais ces variants de susceptibilité ne semblent pas influencer le pronostic. Et pourtant, les études familiales plaident bien pour l’existence de facteurs génétiques contribuant au pronostic.
Afin de découvrir ces facteurs génétiques, Lee et coll. ont analysé le génome de plus de 2 700 patients atteints de la maladie de Crohn, sélectionnés parce qu’ils présentaient une maladie indolente (bon pronostic) ou très agressive (mauvais pronostic). Les patients au pronostic intermédiaire étaient exclus.
En comparant l’ADN de ces patients, l’équipe a pu identifier 4 variants significativement liés au pronostic, et de façon surprenante ils ne sont pas liés au risque de développer la maladie. En examinant l’ensemble des variants connus pour conférer une susceptibilité à la maladie de Crohn, l’équipe a confirmé qu’ils n’influencent aucunement le pronostic de la maladie.
« Ceci nous montre que l’architecture génétique de l’évolution de la maladie de Crohn est très distincte de celle de la susceptibilité à la maladie. En d’autres termes, les voies biologiques gouvernant la progression de la maladie pourraient être différentes de celles qui jouent un rôle dans la survenue de la maladie, précise le Pr Kenneth Smith qui a supervisé l’étude à l’université de Cambridge. Il faudra peut-être envisager de diriger de nouvelles thérapies vers des voies tout à fait différentes pour traiter une maladie établie. »
Le gène FOXO3
L'un des variants réside dans le gène FOXO3, connu pour contrôler une voie dépendante du TGF-beta1 qui limite la réponse inflammatoire dans les monocytes. Cette voie FOXO3-TNFalpha est aussi connue pour affecter la gravité de la polyarthrite rhumatoïde (PR). Un second variant reside en amont du gene IGFBP1, connu pour jouer un rôle dans l’immunité et la longévité, et le locus IGFBP1 est associé à une PR plus sévère. Un troisième variant, HLA-B*8.01, connu pour diminuer la réponse aux vaccins et l’activation des cellules T, est associé à une maladie de Crohn plus indolente. Enfin, le dernier variant réside dans le gene XACT, exprimé dans les intestins mais peu connu. Il reste à préciser comment ces variants influencent le pronostic. « Pour le variant FOXO3, nous avons déjà identifié le mécanisme (Cell 2013) et nous évaluons en préclinique des médicaments ciblant cette voie », confie au « Quotidien » le Dr Lee.
Ceci pourrait-il offrir un test pronostique pour mieux personnaliser le traitement ? Vu le faible effet de ces variants, les chercheurs explorent s’il est possible de développer un test pronostique incluant davantage de variants. Mais l’équipe a déjà développé, grâce à un précédent travail, un test pronostique pour la maladie de Crohn qui repose sur le dosage sanguin de l’expression d’un certain nombre de gènes, et l’évaluation clinique de ce test débutera cette année. « De façon intéressante, les voies biologiques qui sous-tendent cette signature pronostique d’expression génique (McKinney et coll., Nature 2015) pourraient être liées à des variants que nous venons d’identifier dans l’étude », note le Dr Lee.
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