LORSQU’UNE PRÉDISPOSITION familiale au cancer du sein est suspectée chez une patiente, l’attitude la plus appropriée consiste à proposer à cette dernière d’explorer cette éventuelle prédisposition dans le cadre d’une consultation d’oncogénétique. En France, il existe près d’une centaine de consultations de ce type, établies dans les Centres de lutte contre le cancer, dans certains centres hospitalo-universitaires, mais aussi dans des établissements hospitaliers privés et des centres hospitaliers généraux.
Toute femme peut consulter de sa propre initiative, mais, le plus souvent, la patiente est adressée par son médecin traitant, son gynécologue ou, dans certains cas, par un cancérologue. Il est, en effet, souhaitable qu’elle se rende à la consultation en étant pleinement informée de ses implications potentielles aussi bien quant à son déroulement – car les données recueillies pourront conduire à lui proposer un test génétique – qu’en termes de prise en charge ultérieure dans l’éventualité où le test serait positif.
La patiente doit donc avoir été sensibilisée à ces différents aspects, sachant que, dès lors que le risque de cancer du sein héréditaire viendrait à être confirmé, cela pourrait avoir d’importantes conséquences psychologiques pour la femme elle-même, mais aussi pour ses proches. Il n’est pas rare, en effet, qu’une femme qui compte, dans sa famille, plusieurs membres ayant développé un cancer du sein ou qui a elle-même été traitée pour une telle tumeur consulte moins à des fins personnelles que pour connaître le risque encouru par sa fille.
Le facteur le plus prédictif.
Il importe que le médecin qui décide de proposer une consultation d’oncogénétique à sa patiente ait de solides éléments lui faisant suspecter une prédisposition héréditaire à la maladie. Ces éléments peuvent être l’existence, dans la famille de cette femme, de plusieurs cas de cancers intéressant des organes génétiquement liés, à savoir le sein et l’ovaire. Il peut également s’agir de facteurs individuels, tes que la survenue, chez l’intéressée, d’un cancer du sein bilatéral ou d’une tumeur mammaire et d’un cancer de l’ovaire. Toutefois, le facteur le plus prédictif d’un risque génétique est l’âge d’apparition d’un cancer : la probabilité de mise en évidence d’une anomalie génétique est nettement plus élevée lorsque la recherche est effectuée chez une femme qui a développé un cancer du sein entre l’âge de 25 et 30 ans que lorsqu’elle concerne une patiente dont la famille compte cinq cas de cancers du sein survenus après l’âge de 70 ans.
Une enquête génétique longue et complexe.
La consultation vise donc, dans un premier temps, à réunir les informations qui permettront de déterminer s’il existe une agrégation de facteurs familiaux et/ou personnels fortement en faveur de l’existence d’une prédisposition héréditaire au cancer du sein. Ces données sont directement recueillies auprès de la patiente.
Lorsque l’enquête ainsi menée met en évidence un risque significatif, un test génétique est proposé à la patiente afin de confirmer ou d’infirmer la prédisposition héréditaire, après s’être assuré que l’intéressée a bien compris les avantages, mais aussi les inconvénients de cette recherche. En effet, les résultats présentent des incertitudes et les conséquences sont importantes tant pour la femme elle-même que pour sa descendance, cela que le test soit positif ou négatif. C’est pourquoi la consultation est parfois complétée d’un entretien avec un psychologue.
Le test génétique.
L’examen consiste à rechercher, dans un prélèvement sanguin, la présence d’une éventuelle mutation affectant l’un des deux gènes, BRCA1 et BRCA2, connus pour fortement augmenter le risque de cancer du sein ou de l’ovaire.
Contrairement aux analyses génétiques pratiquées portant sur une tumeur et qui visent à étudier les gènes de cette tumeur afin de prédire, entre autre, son degré de malignité et sa sensibilité au traitement, le test réalisé à l’issue de la consultation d’oncogénétique consiste à analyser l’ADN des lymphocytes de la patiente afin d’examiner les propres gènes de cette dernière.
Ce test génétique est de réalisation délicate, de sorte que ses résultats ne sont disponibles que plusieurs semaines, voire plusieurs mois après le prélèvement sanguin. Les résultats sont exclusivement communiqués à la patiente ayant fait l’objet du test, lors d'une consultation personnalisée. Cette personne a seule la faculté d’informer ensuite ses proches des conclusions de la recherche.
Quelles options en cas de risque génétique ?
Si le test est négatif, on admet généralement que la patiente n’encourt pas un risque plus élevé que celui de la population générale. Il existe toutefois des causes d’erreur, de sorte qu’il est préférable d’évaluer ce que l’on appelle le « risque résiduel » après un test négatif. En revanche, lorsque le test a mis en évidence une mutation prédisposant au cancer du sein, plusieurs attitudes sont possibles, la décision étant prise par le médecin en concertation avec l’intéressée.
Les options visant à prévenir le développement de la maladie sont de deux ordres : la prévention médicamenteuse, fondée sur l’administration d’un anti-estrogène dans le cadre d’un essai « thérapeutique », et la prévention chirurgicale, qui implique l’ablation des deux seins. L’intervention doit être parfaitement expliquée à la patiente en insistant sur ses conséquences bénéfiques, mais aussi sur ses inconvénients. Un délai de réflexion et un entretien avec un psychothérapeute spécialisé sont indispensables. Lorsqu’une telle mastectomie préventive est réalisée, une reconstruction mammaire immédiate est proposée à la patiente. L’intervention ne doit pas être envisagée chez une femme âgée de moins de 30 ans.
L’autre option possible est celle du dépistage précoce. Celui-ci consiste à pratiquer un examen clinique des seins deux ou trois fois par an à partir l’âge de 20 ans, puis tous les ans à partir de 30 ans, cet examen étant complété d’une mammographie et, éventuellement, d’une échographie et d’une IRM si cela est jugé utile. L'auto-examen des seins n’est pas conseillé.
* D’après un entretien avec le Pr François Eisinger, département d’oncogénétique, Institut Paoli-Calmette, Marseille.
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