En dépit de sa taille relativement modeste, la 6e conférence internationale des maladies génétiques hébergée par l'association émiratie des maladies génétiques, est le lieu idéal pour saisir l'ampleur du défi que représente pour les Emirats, la prise en charge des maladies génétiques.
La forte prévalence de ses pathologies est en partie liée à la démographie très particulière du pays : ses 9,3 millions d'habitants comptent 85 % d'étrangers, dont beaucoup d'Indiens, de Pakistanais, de Philippins et de Népalais. Chez les 15 % de nationaux, « 60 % des mariages sont consanguins, un taux très important même pour la région », explique le Dr Andoni Urtizberea, ancien directeur scientifique du Téléthon et grand habitué des Émirats.
Conséquence : des taux records de maladies génétiques, et plus précisément de déficit en G6PD, de thalassémies et d'anémies falciformes. Historiquement, les mutations responsables des hémopathies héréditaires « ont été favorisées car elles confèrent une protection contre le paludisme, explique le Dr Maryam Matar, directrice de l'association Émirat contre les maladies génétiques, et organisatrice de la conférence. Nous avons aussi des prévalences importantes d'hypercholestérolémie familiale, de syndromes de l'X fragile… En tout, 220 maladies génétiques différentes sont répertoriées dans notre population. Le nombre de variants responsables des maladies du sang est plus nombreux chez nous qu'en Chine où la population est plus de 1 000 fois plus nombreuse. »
Plus de la moitié des enfants porteurs d'une mutation
Dans les Émirats Arabe Unis, les thalassémies touchent 2 % des naissances chaque année, et seulement 51,1 % des enfants ne sont porteurs d'aucune mutation. Jusqu'à l'année dernière, on ignorait même le sous type majoritaire des thalassémies diagnostiquées dans les Émirats. Il aura fallu attendre les résultats d'une analyse génétique lancée en 2006 et qui confirmamit la variété des mutations à l'origine de l'hémopathie plus importante dans les Émirats Arabes Unis que n'importe où ailleurs : 66 mutations différentes contre 42 dans l'ensemble de l'Europe de l'Est, 35 en Turquie ou 32 dans l'Asie du Sud Est.
Les travaux du centre de génétique de Dubaï ont permis de démontrer que 48,9 % de la population est porteuse d'au moins une mutation sur un allèle des gènes α1 et α2 codant pour les chaînes α de l'hémoglobine. Au total, l'α-thalassémie représente 60 % des patients émiratis. Elle est donc majoritaire, comme en Europe, tandis que la ß-thalassémie est majoritaire en Asie du Sud Est.
Le conseil prémarital obligatoire
Passer ce premier constat, les autorités sanitaires ont tenté d'agir en s'inspirant de l'initiative de Chypre qui est parvenue à éradiquer la thalassémie. Le gouvernement chypriote avait fait passer une loi, en association avec le clergé orthodoxe, imposant une analyse génétique avant le mariage. Si les deux parents sont porteurs d'un variant responsable de la maladie, tout mariage religieux leur était inerdit et l'éventuel traitement des enfants nés de leur union n'était pas pris en charge. Sans aller jusqu'à cette extrémité, la loi sur le conseil prémarital mise en place aux Émirats en 2005, impose une prise de sang et le séquençage des gènes identifiés dans le déficit en G6PD, en anémie falciforme et dans la thalassémie, ainsi qu'un dépistage du VIH et les hépatites.
« Nous ne pouvons pas forcer les gens à ne pas se marier, explique le Dr Matar, mais nous pouvons leur proposer des témoignages de familles de malades qui culpabilisent beaucoup. Une autre possibilité encore peu explorée est le recours à la procréation médicale assistée. » Si les parents insistent, il leur est demandé de procéder à un prélèvement des villosités choriales lors des 12 premières semaines de grossesse, car c'est le seul moment où l'avortement peut être autorisé sous certaines conditions très strictes : la décision est prise par une commission médicale et religieuse à laquelle participent les parents. Ces conditions pourraient être assouplies, selon le Dr Erol Baysal des autorités sanitaires de Dubaï, le cheik Khalifa ben Zayed Al Nahyane « est favorable à une ouverture le débat et nous espérons qu'il pourrait y avoir une modification des lois dans les années qui viennent ». Le Dr Matar est moins optimiste sur la question et préfère « ne pas s'engager sur ce débat ».
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