EN 2005, une société française de biotechnologie, IntegraGen, annonce, avec un fort soutien médiatique, la mise prochaine sur le marché d’un « test génétique de diagnostic de l’autisme ». Bertrand Jordan qui connaît parfaitement la génétique mais aussi le fonctionnement des sociétés de biotechnologie, surpris et choqué par cette annonce pour le moins prématurée, s’agissant d’une pathologie aussi complexe que l’autisme, décide d’enquêter et de démêler pour le non spécialiste les interférences entre chercheurs, entreprises de biotechnologie, cliniciens, familles de malades et leurs intérêts respectifs pas toujours confluents. L’autisme (ou plutôt les autismes) se prête parfaitement à l’analyse des vicissitudes de ces recherches génétiques destinées au diagnostic et au pronostic des maladies psychiatriques. L’exemple de cette affection, dont plus personne ne conteste aujourd’hui qu’elle est organique, ni même qu’elle est sous tendue par des variants génétiques, est en effet l’exemple même du sujet sensible : du fait de sa gravité, du handicap qu’elle génère, du drame chronique dans lequel elle plonge les parents, du manque de structures de prise en charge de ces enfants, de l’absence de traitement curatif disponible. Mais aussi du fait des polémiques passionnelles entre tenants de différentes approches « classiques » (psychanalytiques, comportementales) mais aussi fantaisistes voire charlatanesques et de la conception longtemps tenace que ce trouble était largement lié à une faillite parentale. Le paradigme donc du sujet complexe, de la maladie face à laquelle cette nouvelle « médecine génomique » se trouve manifestement en défaut alors que les composantes génétiques de l’affection sont peu contestables. Bertrand Jordan ne se prétend pas spécialiste de l’autisme. Son bref résumé de l’affection, de son épidémiologie et de ses principaux symptômes permet simplement au lecteur béotien de comprendre toute la difficulté de mettre au point des tests dans les maladies psychiatriques en général et dans l’autisme en particulier, de réfléchir aux enjeux, attentes (à qui les appliquer et pourquoi ?) et risques (faux positifs et faux négatifs) de ces tests. Un test génétique d’aide au diagnostic ou à la décision thérapeutique n’est pas exclu a priori, nous dit-il, mais « encore faudrait-il bien se souvenir que ce que révélerait une telle analyse serait une vulnérabilité et non un destin : les vrais jumeaux qui présentent une concordance de 90 % n’auraient peut-être été autistes ni l’un ni l’autre si, par exemple, la grossesse de leur mère s’était passée différemment ». Un ouvrage où bon sens, savoir et expérience se combinent avec talent pour se faire une idée juste sur un sujet très polémique.
Bertrand Jordan, Autisme, le gène introuvable - De la science au business, Seuil, 220 pages, 18 euros.
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