LA DYSTROPHIE CORNÉENNE de Fuchs (DCF) est une pathologie primitive de l’endothélium cornéen (rapportée pour la première fois par Ernst Fuchs en 1910), caractérisée par la formation de « gouttes » (cornea guttata) visibles sous l’endothélium cornéen en microscopie spéculaire à l’examen clinique de la cornée en ophtalmologie. Une perte de cellules endothéliales avec des dépôts extracellulaires d’un matériel anormal s’observent au microscope.
Il s’agit d’une pathologie ubiquitaire. La prévalence des gouttes en pathologie spéculaire est élevée et va, suivant les études, de 5 à 7 % au-delà de 40 ans. Quand la maladie est évoluée, la cornée gonfle et perd sa transparence car les cellules endothéliales résiduelles ne sont pas suffisantes pour maintenir la cornée en état. Toutefois, les gouttes ne s’aggravent pas toutes par une évolution vers l’œdème cornéen. Le terme de dystrophie de Fuchs est utilisé lorsque la cornea guttata évolue vers l’œdème.
L’œdème cornéen.
« L’œdème cornéen qui est associé à la DCF peut progresser après la chirurgie de la cataracte. Il représente l’indication la plus fréquente des greffes de cornée », expliquent les auteurs. L’enthousiasme pour la chirurgie réfractive se réduit chez les patients à haut risque de DCF.
La DCF est parfois associée à une anomalie génétique, qui peut être à l’origine des formes précoces (rares) comme des formes classiques qui apparaissent avec l’âge. L’origine génétique est toutefois rare.
En fait, expliquent les auteurs, « les études de liaison génétique ont identifié de multiples loci associés à des formes communes liées à l’âge. Toutefois, les variations génétiques contribuant à la DCF parmi ces loci n’ont pas été identifiées. Nous avons réalisé une étude d’association à l’échelle du génome entier, pour rechercher des loci plus contributifs. »
L’étude d’association du génome entier a été réalisée en utilisant 130 cas de DCF et 260 témoins. Le résultat a été répliqué dans une série indépendante.
Des allèles du gène de facteur de transcription 4 (TCF4) codant un membre de la famille des protéines E (E2-2) ont été associés à la DCF typique. L’association montre que leur présence est assortie d’un risque multiplié par 30 de présenter une DCF chez les personnes possédant les deux copies des variants (homozygotes) et par 5,5 chez les sujets présentant un seul gène. La protéine E2-2 codée par TCF4 pourrait être un contributeur majeur de la DCF. E2-2 et un membre d’une famille de facteurs de transcription qui sont impliqués dans la croissance cellulaire et la différenciation. E2-2 est exprimée dans la cornée en développement.
Il y a deux régions au moins du locus TCF4 qui ont été associées de manière indépendante avec la DCF. Toutefois, « on ne sait pas précisément quelle variation génétique dans cette région explique les associations observées. Il est possible que le risque soit déterminé par des variants non codants, et qui influent indirectement sur l’expression de E2-2. »
Par ailleurs, « les allèles du gène codant le récepteur de type G de la tyrosine phosphatase (PTPRG) ont été associés avec la DCF, mais cette association n’atteint pas la significativité à l’échelle du génome entier. »
La famille des tyrosines phosphatases.
PTPRG appartient à la famille des tyrosines phosphatases, qui régulent un vaste champ des fonctions cellulaires : croissance, différenciation, mobilité, adhésion…
Ces découvertes suggèrent différents mécanismes pathogénétiques. L’un d’entre eux pourrait être une réduction du nombre des cellules endothéliales au cours de la sénescence, avec un défaut de prolifération ou de migration.
Un autre mécanisme hypothétique pourrait être un accroissement du stress cellulaire à cause d’un développement anormal de la membrane basale, d’une régulation anormale des canaux ioniques, ou d’une sénescence prématurée.
« En conclusion, nos découvertes suggèrent qu’une variation génétique du locus TCF4 contribue de manière substantielle au risque de DCF. La présence des haplotypes du risque est relativement basse, mais la présence des cas haplotypes confère un risque élevé de DCF. »
Keith Baratz et coll. The New England Journal of Medicine, 363 ; 11, 9 septembre 2010, p. 1016-1023 et commentaire p. 1072-1075.
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