Avec une incidence estimée à 1/500 naissances dans la population générale dans sa forme hétérozygote (HF-he) – peut-être même 2 fois plus élevée selon des données récentes – l’hypercholestérolémie familiale (HF) est l’une des maladies héréditaires autosomiques dominantes les plus fréquentes. Pourtant, elle demeure trop largement ignorée par les médecins, même les cardiologues ! Non traitée, ou insuffisamment prise en charge, cette maladie augmente considérablement le risque cardiovasculaire (RCV), par rapport à la population générale : d’un facteur de 13 en ce qui concerne la coronaropathie précoce.
Une confusion avec l’hypercholestérolémie polygénique commune
Quelles sont les connaissances des médecins français en ce domaine ? Une étude de l’institut BVA Santé a été réalisée à cette intention. 495 médecins représentatifs (100 cardiologues, 100 endocrinologues/diabétologues, 95 gynécologues et 200 médecins généralistes), qui devaient avoir au moins un patient diagnostiqué pour HFhe dans leur patientèle (en tout 579 fiches), ont été interrogés en 2015.
Parmi les médecins ayant participé, le premier constat est qu’il existe une forte confusion entre l’hypercholestérolémie polygénique commune et l’hypercholestérolémie monogénique (HFhe). Seuls 1/3 des médecins déclarent vraiment connaître la différence entre les deux.
En ce qui concerne surrisque CV des sujets porteurs d’une HFhe, parmi les cardiologues, seuls 18 % citent un surrisque supérieur à un facteur 10 (ils sont 9 % pour les non-cardiologues).
Pourtant, l’ignorance dans le domaine de la HFhe est loin d’être majoritaire, 3/4 de tous les médecins sondés déclarent connaître les traitements indiqués, et un peu plus de la moitié les examens nécessaires au diagnostic et les signes cliniques. Ainsi la présence de xanthomes, élément clé du diagnostic, était citée par 44 % des cardiologues et 35 % des non-cardiologues.
Une fréquence sous-estimée
Pour ce qui concerne le dépistage, 4 % des cardiologues l’effectuaient systématiquement en cascade et 5,6 % des non-cardiologues. Ainsi, la prévalence de l’HFhe est assez largement sous-estimée : elle est perçue en moyenne autour de 1/1 000 par les cardiologues. Seuls 6 % en donnant une estimation correcte, entre 1/300 et 1/500, et 8,6 % des non-cardiologues.
Une transmission familiale à prendre en charge
Seuls 1/4 connaissaient la nécessité d’un dépistage familial. Lorsqu’un parent est atteint d’HFhe, le risque de transmission (50 %), était connu de 60 % des cardiologues comme des non-cardiologues.
Concernant l’âge adéquat de dépistage d’une HFhe, les cardiologues l’estimaient à 9,3 ans et les non-cardiologues à 8 ans. Ils étaient aussi d’accord sur l’âge de mise en route du traitement : 11 à 12 ans. Mais 13 % estimaient tout de même qu’il fallait attendre l’âge 15 ans voire plus pour diagnostiquer, et un peu moins de 40 % considéraient que la mise en route du traitement était possible à 15 ans et plus.
Au total, la grande majorité des médecins (80 %) expriment le besoin d’une formation spécifique en ce domaine, puisque 1/3 d’entre eux, y compris les cardiologues, estiment être mal ou très mal informés sur la prise en charge de cette pathologie.
Pour un programme national
Des lacunes similaires sont rapportées dans nombre de pays développés, même ceux ayant une politique de prévention et dépistage, volontiers citée en exemple, comme la Grande-Bretagne.
La CNAM-TS, souhaitant désormais jouer un rôle d’acteur et pas uniquement de payeur, devrait peut-être s’emparer de cette question, en partenariat avec les sociétés savantes (cardiologues, endocrinologues, lipidologues) et les représentants de la médecine de premier recours.
Professeur Émérite Université Grenoble-Alpes, Grenoble
J.Ferrières et al. Hypercholestérolémie familiale : un risque cardiovasculaire largement sous-estimé. Annales de Cardiologie et d'Angéiologie. Available online 31 May 2017
http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0003392817300598#!
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