PENDANT CINQ ANS, une vingtaine de bénévoles de l’association « Les amis du Pr Lejeune » ont constitué un énorme dossier : 500 articles et publications scientifiques, multiples correspondances professionnelles et privées, comptes-rendus d’auditions de témoins, en tout 15 000 feuillets qui ont été scellés dans 12 caisses et acheminés au Vatican par le postulateur, l’abbé bénédictin de Saint Wandrille. Le R-P Jean-Charles Nault résume : « Médecin et chercheur, fondateur de la génétique moderne, le Pr Lejeune s’est dépensé sans compter pour ses malades, mobilisé par cette sentence du Christ, "Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait" (...) En ces temps où la société moderne remet en question les certitudes les plus fondamentales concernant la personne humaine, il demeure un témoin passionné et courageux de la vérité et de la charité. »
Pas d’obstacle insurmontable.
Le dossier réuni en France, qui atteste « une réputation de sainteté » non seulement en France, mais en Europe et en Amérique, n’a rencontré « aucun obstacle insurmontable » et va donc maintenant être analysé par la congrégation pour la cause des saints (rédaction d’une synthèse, dite « positio », examen de l’« héroïcité des vertus »), avant d’être soumis au pape. Ce dossier Lejeune met en évidence l’importance scientifique des travaux du généticien, avec la découverte, en 1958, des causes de ce que l’on appelait alors le « mongolisme », son engagement « au service de la vie », et son attachement à établir qu’il n’y a pas de contradiction entre la science et la foi.
A sa mort, en 1994, le pape Jean-Paul II rendait déjà hommage au « charisme particulier » de son « frère Jérôme », saluant « l’usage de sa profonde connaissance de la vie et de ses secrets pour le vrai bien de l’homme », ses actions en tant que «défenseur ardent de la vie, spécialement de la vie des enfants à naître, (...) souvent menacée ».
En avril dernier, une cérémonie officielle a été célébrée solennellement à la cathédrale de Paris, pour marquer « un premier pas vers la béatification ». Quelques réticences s’expriment cependant, qui avaient déjà été perçues lors de l’ouverture de la procédure, il y a cinq ans, le promoteur de la cause des saints à Paris avait affirmé la volonté de l’archevêché de « ne pas se laisser prendre par le lobbying des milieux extrémistes anti-avortement » (Le Quotidien du 26 mars 2007). « Mais M. Lejeune ne s’est jamais enchaîné lui-même au grille des hôpitaux », avait protesté la présidente de l’association de ses amis, Maïté Varaut. « Les engagements du Pr Lejeune pour toute forme de vie humaine et contre l’avortement, ajoute Aude Dugast, vice-postulatrice, n’ont rien à voir avec les commandos anti-IVG qui ont été créés d’ailleurs après la mort du Professeur ».
Des médecins circonspects.
Des médecins catholiques expriment cependant leur circonspection. Président de la FEMC (Fédération européenne des médecins catholiques), le Dr François Blin souligne « le remarquable travail de prise en charge des enfants trisomiques effectué par la Fondation Jérôme Lejeune, reconnue aussi pour ses travaux dans les domaines de la recherche génétique et de la bioéthique », mais il déplore « les méthodes de combat anti IVG adoptées par des gens qui se réclament de Jérôme Lejeune ».
Au demeurant, la revendication de la paternité de la découverte du chromosome supplémentaire sur la paire 21 fait elle-même question. L’équipe du Pr Court Brown (Université d’Edimbourg) aurait été la première au monde dans cette voie, selon le Pr André Boué (U Inserm 73)*.
Au final, il appartiendra au pape de dire si « le serviteur de Dieu Jérôme Lejeune » doit être vénéré comme un bienheureux. Un miracle, avec une guérison « instantanée, complète et définitive », devra alors être reconnu. Dans cette perspective, le texte d’une « invocation » a reçu l’approbation ecclésiastique du cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris**.
*http://www.vjf.cnrs.fr/histrecmed/entretiens/boue/boue.html
**« Dieu qui as créé l’homme à Ton image et l’as destiné à partager Ta Gloire, nous Te rendons grâce pour avoir fait don àTon Eglise du Professeur Jérôme Lejeune, éminent Serviteur de la Vie. Il a su mettre son immense intelligence et sa foi profonde au service de la défense de la vie humaine, tout spécialement de la vie à naître, dans le souci inlassable de soigner et guérir. Témoin passionné de la vérité et de la charité, il a su réconcilier, aux yeux du monde contemporain, la foi et la raison. Par son intercession, accorde-nous, selon Ta volonté, les grâces que nous implorons, dans l’espérance qu’il compte bientôt au nombre de Tes saints ».
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024