C’est en avril 2020 que les autorités sanitaires ont décidé de faire passer de 7 à 9 semaines d’aménorrhée (SA) le délai légal pour réaliser une IVG médicamenteuse en ville. L’objectif était alors, au tout début du confinement, d’éviter au maximum les déplacements et le recours aux établissements, où sont aujourd’hui réalisés les trois-quarts des IVG médicamenteuses, contre un quart au domicile. En établissements, ce délai de 9 SA était déjà en vigueur. Aujourd’hui, c’est donc aussi le cas pour les IVG à domicile.
Au départ dérogatoire et transitoire, cet allongement du délai en ville est désormais pérennisé. « L’objectif est de répondre à plusieurs enjeux : réduire le délai d’accès à l’IVG médicamenteuse, élargir l’offre de soin, qui doit être possible en ville comme à l’hôpital, mais aussi alléger la charge des établissements de santé, qui doivent pouvoir se concentrer sur les IVG chirurgicales », indique la Haute autorité de santé (HAS).
Les IVG médicamenteuses peuvent être réalisées par un médecin ou une sage-femme, dans le cadre d’une activité en cabinet de ville, dans un centre d’éducation et de planning familial (CPEF) ou dans un centre de santé. « Le médecin doit obligatoirement avoir passé une convention avec un établissement de santé autorisé pour réaliser cette activité », précise le Pr Aubert Agostini, responsable gynécologie à l’hôpital de la Conception à Marseille. Dans ses recommandations, la HAS indique que l’accès à l’IVG doit être simple et rapide : chaque femme doit obtenir un rendez-vous dans les 5 jours suivant son appel. Les deux consultations médicales préalables à l’IVG peuvent se faire en présentiel ou en téléconsultation, avec l’accord de la femme et si le médecin ou la sage-femme l’estiment possible. « La réalisation d’une échographie avant l’IVG médicamenteuse est très conseillée sans être obligatoire. On sait que, parfois, notamment en raison de contraintes géographiques, l’accès à l’échographie peut être très difficile. Et il ne faut pas que cela puisse faire courir à la femme le risque de dépasser le délai légal », indique le Pr Agostini.
L’IVG médicamenteuse se fait via un protocole établi par la HAS et facilement consultable en ligne. « En résumé, pour les femmes qui sont à moins de 7 SA : soit mifépristone 600 mg VO puis, de 24 à 48 h plus tard, misoprostol 400 µg VO ; soit mifépristone 200 mg VO puis, de 24 à 48 h plus tard, misoprostol 400 µg par voie transmuqueuse orale ou sublinguale (hors AMM) », indique la HAS. Entre 7 et 9 SA, le protocole est le suivant : mifépristone 200 mg VO puis, de 24 à 48 h plus tard, misoprostol 800 μg par voie transmuqueuse orale ou sublinguale (hors AMM). « Il ne faut pas administrer le misoprostol par voie vaginale », souligne le Pr Agostini. L’utilisation du géméprost n’est pas recommandée en raison de ses effets secondaires.
Des recommandations personnalisées
La durée de l’arrêt de travail est variable selon les situations. « En général, on donne entre 3 et 4 jours. Mais on voit certaines femmes, très impliquées au niveau professionnel, qui s’arrangent pour démarrer la prise de médicaments au début du week-end pour ne pas prendre un seul jour d’arrêt. Le médecin doit toutefois avertir les patientes que 3 à 4 jours peuvent être nécessaires. Il faut aussi tenir du contexte socio-économique et des conditions de vie de la patiente à domicile », explique le Pr Agostini.
Une IVG médicamenteuse peut entraîner la survenue de saignements et surtout de douleurs pouvant être éprouvantes. « Il faut donc que le médecin prescrive en amont des antalgiques de palier 1 ou 2, que la patiente devra avoir à disposition lors de l’IVG. La convention signée par le médecin prévoit qu’elle puisse joindre 24h/24 un service d’urgence d’un établissement en cas de besoin », précise le Pr Agostini.
Dès la première consultation, le médecin doit informer la femme la nécessité d’une visite de contrôle entre le 14e et le 21e jour post-IVG. « Il faut s’assurer que l’expulsion a bien eu lieu. En effet, il est possible que, malgré la prise de médicaments, la grossesse se poursuive sans que la femme ne s’en rende compte, et qu’elle se trouve alors hors délai pour une IVG chirurgicale », explique le Pr Agostini. Pour s’assurer de l’arrêt de la grossesse, le médecin peut prescrire un HCG.
Pour le Pr Agostini, ce passage de 7 à 9 SA devrait se faire sans problème particulier. « On a l’expérience et le recul des pays scandinaves et anglo-saxons. Il faut simplement être attentif à une bonne prise en charge de la douleur, qui peut être un peu plus forte à ce terme », souligne le Pr Agostini.
Entretien avec le Pr Aubert Agostini, responsable gynécologie à l’hôpital de la Conception à Marseille
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024