PAR LE Dr JEAN-PIERRE ESTEBE*
BIEN QUE les ultrasons permettent une parfaite localisation des organes ciblés, en tenant compte des variations anatomiques ou pathologiques, et bien que la preuve de leur efficacité soit aujourd’hui clairement établie en anesthésie-réanimation, aucune rémunération ne permet d’assumer le coût des consommables et l’amortissement du matériel.
La décision d’acheter ou de renouveler un échographe repose donc sur une analyse complexe qui doit tenir compte de nombreux facteurs. Généralement, l’achat se fonde sur des financements propres et donc pas toujours pérennes, ce qui peut avoir des conséquences sur la maintenance par les services biomédicaux.
– Le type de machine doit être adapté à son profil d’utilisation. En effet, il faudra définir si elle sera dédiée à une personne, à un type de procédure (anesthésie locorégionale, pose de voies veineuses centrales, évaluation cardiologique ou hémodynamique), à un service ou à un département (anesthésie ou orthopédie-rhumatologie, par exemple), voire même à un établissement (pool de machines). Des spécificités demandées découle le choix, comme un appareil aux fonctions spécifiquement bloquées pour l’anesthésie locorégionale, ou, exemple extrême, un analyseur de la réplétion vésicale (bladder scan) ou bien, au contraire, une machine polyvalente.
Le coût et l’encombrement seront bien sûr très différents.
– La miniaturisation a permis de mettre au point des appareils de très faible dimension (pocket-sized). Leur qualité, initialement limitée, est considérée désormais comme suffisante par les cardiologues ou les gynécologues pour leur pratique quotidienne. Ces évolutions technologiques permettent de ne plus amener le malade à la machine, mais la machine au malade d’où le terme proposé par certains de stéthoscope du XXIe siècle.
– Comme les écrans de télévision, ceux des échographes ont beaucoup progressé, parallèlement à l’amélioration du traitement du signal. Si pendant longtemps, il fallait avoir une expertise en mécanique des sons et gestion du signal, ces nouveaux écrans peuvent être utilisés par des quasi-profanes des harmoniques et autres phénomènes de distorsion du signal.
– Les paramètres réglables et affichables en fonction du choix de la cible à visualiser doivent être définis. Ainsi, l’évaluation d’une plaque d’athérome ne fera pas appel aux mêmes réglages que pour localiser un vaisseau dans le cadre de la pose d’une voie veineuse centrale ou périphérique.
– Afin d’éviter toutes impérities, il faut également connaître les recommandations éditées par les autres sociétés et tutelles. Ainsi, les effets adverses liés à l’utilisation des ultrasons doivent être connus et donc doivent être affichables et enregistrables comme l’indice thermique et mécanique. Les procédures doivent tendre à réduire la durée d’utilisation et conduire à un usage raisonné des fortes intensités et du temps d’exposition, comme lors de l’utilisation de l’effet Doppler. Cependant, il ne faut pas oublier que l’effet Doppler couleur, énergie ou pulsé, peut être utile pour la visualisation vasculaire et l’évaluation du tonus sympathique.
– L’enregistrement peut avoir une valeur didactique, mais aussi légale. Si pour le moment aucune recommandation claire n’a été faite pour l’anesthésie-réanimation, il ne faut pas oublier celles qui existent dans d’autres disciplines. La fonction de fixation de l’image ou d’enregistrement de façon rétrospective ou prospective peut permettre de documenter la localisation d’une aiguille.
– Le choix des sondes sera également déterminé en fonction des finalités proposées : sondes linéaires pour l’échographie locorégionale, sonde convexe pour une analyse plus en profondeur (évaluation du débit cardiaque, par exemple), mais aussi sonde plus étroite pour la pédiatrie et la prise en charge de patient obèse.
Prévoir les surcoûts.
La durée de vie de la sonde doit être fournie par le constructeur pour une utilisation « normale ». Bien sûr, un centre formateur aura plus de risque de voir celle-ci réduite. Lorsque l’échographe est utilisé pour réaliser un geste thérapeutique (ponction), le coût des consommables stériles et des procédures de décontamination doit être intégré dans le budget.
– Les évolutions technologiques doivent être également envisagées, comme les sondes 3D (ou 4D avec reconstruction immédiate) ou les systèmes de détection et de guidage de l’aiguille (système GPS, détection électromagnétique). Cependant, certaines approches engageront un surcoût du fait de l’utilisation d’aiguilles spéciales. En attendant la vulgarisation des sondes 3 ou 4D, le praticien doit savoir utiliser toutes les procédures pour améliorer son repérage : l’anisotropie (utilisation d’orientation ou angulation différente), le repérage ascendant et descendant et la rotation pour évaluer selon le petit axe et le grand axe lorsqu’il s’agit d’un organe allongé (muscle, tendon, nerf ou vaisseau). De façon à augmenter la qualité du repérage, certaines aiguilles sont rendues hyperéchogènes, mais peuvent avoir le défaut de leur qualité en masquant les structures anatomiques sous-jacentes.
– Pour certaines pratiques, le couplage avec des imageries existantes peut être envisagé, comme pour certaines approches diagnostiques ou thérapeutiques (couplage imagerie des ultrasons et imagerie type IRM, TEP-TDM ou TEP-IRM).
– Des accessoires peuvent être utiles, comme le bras articulé permettant le maintien de la sonde dans une position donnée. Ce bras peut être commandé à distance et permet à certains, de manière encore expérimentale, de faire de l’anesthésie locorégionale robot-assistée. Cet outil ne demande qu’une courte période d’apprentissage. Ainsi, il semble que l’apprentissage de l’anesthésie locorégionale soit plus rapide avec l’échographie qu’avec l’utilisation de la neurostimulation seule.
Cette expertise va rapidement s’étendre à d’autres domaines comme l’évaluation du débit cardiaque, de l’état de réplétion de l’estomac ou de la vessie, le contrôle de l’intubation, etc. Aussi, le profil de la machine devra évoluer avec l’expérience des praticiens. Il convient donc, au minimum, de demander aux constructeurs d’inclure dans le contrat d’achat de la machine un service d’entretien, de mise à jour et des possibilités d’extension non prévues au départ. Ces promesses d’évolution technologiques poussent certains praticiens à choisir d’acheter leur appareil en leasing.
* CHU de Rennes.
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