« Cette nouvelle est comme un coup dans l’estomac ! » La pédiatre Hannah Gay du centre médical de Jackson, dans le Mississippi, n’a pas caché son désarroi au moment d’annoncer à la presse que des tests sanguins avaient finalement mis en évidence des signes d’infection à VIH chez le « Mississippi Baby », plus de deux ans après l’arrêt de son traitement antirétroviral. Les tests ont révélé une charge virale de 16 750 copies/mL confirmée 72 heures plus tard (10 564 copies/mL), une chute des CD4 et la présence d’anticorps signant une réplication active du virus. L’analyse génétique du virus a confirmé qu’il s’agissait bien du même virus transmis par la mère.
Cette petite fille avait beaucoup fait parler d’elle en mars 2013 lors de la 20e Conférence sur les rétrovirus et les maladies opportunistes (CROI) de Baltimore en étant le premier enfant infecté par sa mère lors de l’accouchement, chez qui a été évoquée une guérison fonctionnelle. En novembre 2013, un article du « New England Journal of Medicine », signé par Hannah Gay et ses collègues, avait cependant confirmé que, si la charge virale de l’enfant, maintenant âgé de 46 mois, était toujours indétectable, des traces d’ARN viral avaient été retrouvées dans des échantillons sanguins.
« Le cas de cet enfant du Mississippi montre que le traitement précoce aux antirétroviraux n’a pas complètement éradiqué le réservoir de cellules touchées par le VIH . Mais il pourrait avoir considérablement limité son développement et permis d’éviter qu’elle prenne des antirétroviraux pendant une longue période », a commenté Dr Fauci, directeur de l’Institut national de l’allergie et des maladies infectieuses (NIAID). La petite fille a été de nouveau mise sous traitement antirétroviral et se porte bien, selon le directeur du NIAID.
Une nouvelle guère surprenante
« C’est une nouvelle négative, mais qui n’est pas surprenante », estime le Dr Asier Saez-Cirion, chargé de recherche dans l’unité de régulation des infections rétrovirales de l’Institut Pasteur de Paris. « Malgré la charge indétectable, les chercheurs américains avaient à plusieurs reprises retrouvé des traces du virus dans les cellules du bébé. On savait donc qu’il contrôlait sa charge virale à un taux indétectable, mais que le virus pouvait resurgir à tout moment » souligne le coresponsable de l’action coordonnée 32 de l’ANRS « Réservoirs VIH : formation et contrôle ».
Les relations entre le virus et l’hôte encore mal connues
Le cas du Mississippi Baby met en lumière deux éléments importants : le besoin de mieux connaître la relation entre le virus et les réservoirs de l’hôte, et celui d’étudier la manière dont l’hôte contrôle ces réservoirs. On sait peu de chose les raisons qui font qu’un patient entre en rémission et un autre non. En France, les 14 patients de la cohorte Visconti parviennent à maintenir une charge virale indétectable en l’absence de tout traitement. Mais, selon le Dr Asier Saez-Cirion, leurs histoires sont très hétérogènes. Certains ont été traités, d’autres pas, avec des durées de traitement différentes. Rien ne permet de prédire chez ces patients le moment où le virus refera surface et s’il refera surface un jour. « L’induction d’une trithérapie quelques heures après la naissance reste une piste intéressante qu’il faut continuer à explorer », a estimé Asier Saez-Cirion qui juge que « l’expérience a été globalement positive : le bébé a contrôlé sa charge VIH pendant plus de 24 mois, ce qui n’est pas négligeable ! »
Le bébé de Los Angeles, un cas exagéré
Lors du congrès de la CROI en mars dernier, Deborah Persaud de l’université Johns Hopkins, à Baltimore, avait annoncé qu’un deuxième bébé, né à Los Angeles d’une mère séropositive, était parvenu en quelques jours à une charge virale indétectable (inférieure à 20 copies/ml) grâce à une trithérapie initiée quatre heures après sa naissance. La chercheuse, qui s’occupait déjà du Mississippi Baby, avait alors précisé que rien ne permettait de penser que l’enfant hébergeait toujours le virus.
Pour Asier Saez-Cirion, il y a beaucoup d’exagération autour de ce deuxième cas : « Nous n’avons pas de véritable preuve que cet enfant était bien infecté lors du début du traitement. Un seul prélèvement montrait une charge très faible, et il n’est pas exclu qu’il s’agisse de restes du virus de la mère. Chez le Mississippi Baby, la charge virale a été détectée dans plusieurs tests successifs. »
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