Il y a trois mois, le Dr Nancy Maugey exerçait en tant que médecin généraliste sur un navire de la marine nationale française. Suite à la mise en cale sèche de son bateau, elle se porte volontaire pour le centre de traitement des soignants (CTS) monté par le Service de santé des armées à Conakry, en Guinée.
« On en apprend beaucoup sur nous-même, confie-t-elle, nous avons découvert l’importance du contact avec les patients qu’il faut conserver malgré les mesures de protection. » Ce besoin de contact est aussi éprouvé par les familles des malades, qui peuvent compter sur des tablettes dotées de caméras mises à leur disposition. Opérationnel depuis le 23 janvier, et installé à proximité de l’aéroport international de Conakry, le CTS a déjà accueilli 18 patients, dont 7 cas confirmés, provenant de structures de soins classiques disséminées dans tous le pay.
L’épidémie dans une « phase lancinante »
Le centre comporte dix lits et offre les meilleurs soins possibles aux soignants guinéens, du médecin à l’employé qui manipule les dépouilles. « La prise en charge hors du lieu de travail habituel est appréciée, car ce n’est jamais simple d’être soigné par ses collègues », poursuit le Dr Maugey. Chaque malade bénéficie d’une chambre individuelle vinylisée à usage unique, détruite à chaque sortie de patient. Une telle intimité est inédite dans les centres de traitement déployés en Afrique de l’Ouest.
Le CTS est aux premières loges du rebond épidémique observé dans la région depuis le début de l’année. De retour d’une réunion OMS qui a rassemblé des représentants des centres de traitement d’Afrique de l’Ouest, le Dr Maugey note que l’épidémie est entrée « dans une phase un peu lancinante. Il y avait environ 60 cas par semaine il y a trois semaines, et entre 20 et 30 cas en ce moment, détaille-t-elle. Cette augmentation semble liée à une levée des réticences des malades qui viennent plus facilement dans les centres de traitement. »
Des soins intensifs limités
Une zone d’accueil de transit est dédiée aux patients symptomatiques qui n’ont pas encore de confirmation biologique de leur infection par Ebola. Grâce à son laboratoire P3 les médecins peuvent réaliser rapidement des tests de diagnostic, mais aussi une numération formule sanguine et des examens biochimiques simples (CRP, ionogramme, fonction rénale et hépatique). Le CTS a ainsi pu diagnostiquer un cas de paludisme et plusieurs diarrhées tropicales fébriles. En complément du traitement symptomatique, un traitement antipalustre est prescrit si nécessaire. Un traitement antiparasitaire est systématiquement associé ainsi qu’un traitement antibiotique pour tous les patients présentant des signes digestifs.
Le centre dispose également d’un lit de soins intensifs qui n’a servi qu’à son unique patient décédé à ce jour. Le Dr Maugey note à quelle vitesse son état s’est dégradé : « il rentre sur ses pieds et en moins de 48 heures, on se retrouve face à une insuffisance cardiaque et une défaillance multiviscérale. Dans ces cas-là, nous ne pouvons pas donner de soins de réanimation comme dans les pays occidentaux. On pose une voie centrale et un scope pour avoir des informations sur les constantes hémodynamiques mais on ne fait pas de massage cardiaque car les patients sont trop dégradés. »
Trois patients ont déjà quitté le centre après guérison, mais aucun n’a encore entamé la délicate phase du retour à l’activité. « On les revoit un petit peu à distance, explique le Dr Nancy Maugey, l’un d’entre eux devait retourner dans son école de formation, mais il craint le regard des autres. Les retours dans la communauté se passent en général bien car les patients sont bien accompagnés. »
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