Après 50 ans de médecine de campagne, j'exprime mon admiration pour celles et ceux qui œuvrent de façon héroïque dans les services de réanimation. Pour éviter l'engorgement, il fallait absolument imposer pendant quelques semaines une sorte de confinement ; encore convenait-il que celui-ci fût intelligent et que l'on eût des masques qu'un certain gouvernement (des noms !) avait fait disparaître.
Je n'aurais jamais eu le courage d'assumer le travail des réanimateurs, et il m'est dans la vie arrivé d'être lâche. Mais 30 ans après, j'en ai encore tellement honte, qu'à l'âge de 76 ans et demi, j'ai décidé, un an seulement après ma retraite, de reprendre a minima du service par amour du métier. J'ai donc soigné des Covid 19 chez des proches et, par bravade (ou esprit suicidaire ?), j'ai décidé de ne pas me protéger davantage que je ne l'avais fait pendant 50 ans pour des épidémies tout aussi ravageuses.
Alors que j'ai perdu 30 % de capacité respiratoire dans un accident il y a 30 ans, et bien que je souffre d'asthme, à près de 77 ans, j'ai chopé ce fameux Covid 19 avec l'indéniable fierté d'un esprit «pied de nez». Vivant seul, j'ai vécu quelques nuits difficiles à cause de la maladie et du risque de mort…
Le traitement de Raoult et des gargarismes au whisky
D'emblée j'ai suivi le traitement de Raoult (comme je l'avais fait pour mes proches), en y ajoutant de brûlantes inhalations d'eau et de thym, des gargarismes au whisky (que je n'avale pas) et des marches forcées en forêt. Au bout de cinq-six jours, j'étais guéri.
Alors, quand j'entends une Européenne éclairée (et bien d'autres !) déclamer «qu'il faudra continuer de confiner les plus de 65 ou 70 ans», je vois rouge ! Les conneries, ça suffit ! Par exemple : j'ai le droit de faire l'amour à ma compagne, mais je ne peux pas l'emmener en voiture… Les magasins des grandes surfaces vendent du miel (souvent frelaté) de Chine, mais le merveilleux apiculteur de montagne chez lequel je m'approvisionne n'a pas le droit, de vendre le sien en plein air au marché(!!!). J'habite un hameau mais si je vais me promener dans un pays de bocages ou dans la forêt proche de mon domicile, je dois présenter un document et ne pas m'éloigner plus d'une heure et à plus d'un km.
Une voisine a été verbalisée récemment, seule en rase campagne, à 800 mètres de son domicile par des gendarmes mobiles parce qu'elle ne possédait pas le fameux sésame. Des gendarmes mobiles envoyés par les mêmes inconscients qui ont laissé venir en pleine épidémie 10 000 Italiens de Lombardie au stade des Lumières (merci Aulas) pour un certain Lyon-Juventus de Turin… Ou par ceux qui ont maintenu le premier tour des municipales et aujourd'hui nous balancent sans complexes des ordres, des leçons, et pour finir, des stratégies boiteuses.
Ceux qui dans leur microcosme parisien décident de tout, continueront de percevoir leur salaire hors normes comme je vais continuer de percevoir ma modeste retraite de toubib. Mais quand je pense aux restaurateurs, aux coiffeurs, aux esthéticiennes et à des milliers d'autres professionnels qui vont financièrement crever la bouche ouverte, alors je crie : «Maintenant, ça suffit !»
A 77 ans, je suis assez lucide et responsable pour décider si je veux demeurer confiné ou partir changer d'air. Et aller voir ma mère (âgée de bientrôt 100 ans) qui se morfond sur le lit-cage d'un EHPAD de ne plus voir enfants ni petits-enfants, et que nous ne pourrons enterrer qu'en catimini si elle décède demain.
Cessez de nous infantiliser, de jouer sur la hantise d'une population immature paniquée par la hantise de la maladie ! D'autant qu'après le 11 mai comme après le 11 décembre 2020, le virus sera toujours là. Et moi, plus que jamais, je veux rester libre de mon sort : libre ! Quant à mon âge, c'est moi que ça regarde !
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