Courrier des lecteurs

L'obligation de port du masque aurait rendu le confinement plus efficace

Publié le 26/05/2020

En prenant une mesure très simple pendant le confinement, on aurait pu approcher l’arrêt de l’épidémie au lieu de simplement la freiner. On aurait pu faire vraiment beaucoup mieux sans fournir plus d’efforts ! Le 16 mars, le confinement, mesure certainement nécessaire, était instauré. Aujourd’hui, nous en sortons. Quel est le bilan de l’opération ?

Le nombre des entrées dans les services de réanimation a diminué, ce qui a été salutaire. Mais il y a encore beaucoup d’incertitudes. À commencer par une sortie qui va être étalée dans le temps, de mauvaises nouvelles pour plusieurs catégories professionnelles, comme les restaurateurs, le monde du spectacle, et certainement beaucoup d’autres…

Ensuite, la crainte toujours possible d’une seconde vague. À titre préventif, des systèmes complexes sont en train d’être mis en place ; ils feront intervenir les médecins libéraux, les infirmières, la cpam, les ministères de la Santé, de l’Intérieur, de l’Education nationale…

Ajoutons à cela le fait qu’il faudra désormais prendre des précautions un peu partout et pendant très longtemps ; masques, gel hydroalcoolique. Diverses interdictions, de se réunir, de se déplacer, de voyager, etc. Sans compter les lourdes conséquences économiques, les déboires financiers des uns et des autres, des faillites à prévoir, des conséquences sociales…

J’ai beaucoup de mal à comprendre que l’on ne soit pas parvenu à un meilleur résultat. Et je me pose la question : pour quelle raison n’a-t-on pas ajouté d’emblée sur l’attestation de déplacement dérogatoire durant le confinement, une ligne supplémentaire mentionnant : « port du masque obligatoire lors de toute sortie du domicile; sanction financière en cas de manquement ».

Le ralentissement de l'épidémie à la clé

Une telle mesure, appliquée durant cette période pendant un mois (nous en avons eu deux), guère plus coercitive que le confinement lui-même, aucunement plus coûteuse, aurait permis d’obtenir un résultat beaucoup plus probant : sinon l’arrêt total, du moins le ralentissement considérable de l’épidémie. Est-il utile de rappeler qu’une personne n’est plus contagieuse en moyenne une vingtaine de jours après être entrée en contact avec le virus, et qu’en conséquence, une absence de nouveaux cas pendant cette durée signe la fin de l’épidémie faute de virus vivants pour l’alimenter.

Qu’on ne vienne pas me dire qu’on ne pouvait pas imposer aux Français de porter un masque puisqu’il n’y en avait pas. Il aurait suffi de donner un mode d’emploi de fabrication individuel et tout le monde en aurait porté un pour échapper à l’amende. Un rien de communication aurait rendu cette initiative très facile à mettre en place, et, bien expliquée, elle aurait été certainement très suivie… Quant à la moindre efficacité d’un masque de fabrication « artisanale », elle aurait été compensée par le fait que tout le monde (contagieux et non contagieux) en aurait porté un. De plus, en mesure complémentaire, on pouvait inciter à la distanciation. Ainsi, la lourde et coûteuse mesure qu’est le confinement, aurait eu une remarquable efficacité !

Quelle incohérence !

Le discours aussi peu crédible que dommageable du gouvernement, relatif au port du masque, a été massivement relayé les médias : « Il faut les masques pour les soignants, mais pour la population, ce n’est pas nécessaire ». On ne peut qu’être stupéfait par l’incohérence qui se dégage de cette phrase. Bien sûr qu’il fallait des masques pour les soignants afin qu’ils ne soient pas contaminés par les patients susceptibles d’être infectés et ne transmettent pas à leur tour le virus. Mais il était primordial de commencer par mettre un masque sur le visage des personnes potentiellement contagieuses. Car, c’était tout de même bien chez ces sujets que se trouvait le réservoir d’où il ne fallait pas que le virus s’échappe ! Le port du masque rendu obligatoire pour toute la population depuis le début du confinement, les autres mesures -distanciation, lavage des mains, large utilisation des tests- auraient évidemment été complémentaires.

On a la réussite de ses ambitions et de sa clairvoyance. Il y a des situations où il faut savoir passer outre à son amour propre et admettre ses erreurs. Seul point positif à reconnaître, le sérieux du travail fait pour la mise en place de la difficile sortie du confinement. Il ne reste plus qu’à souhaiter que demain la pandémie vire à l’épidémie saisonnière. Et, si l’adversité nous contraignait à faire face à une nouvelle vague, gageons que nous nous montrerions cette fois plus efficaces pour y faire face.

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Docteur Bernard Riou, Médecin généraliste, Vern-sur-Seiche (35)

Source : Le Quotidien du médecin