Le Sars-CoV-2 pourrait être dans sa dernière phase avant de devenir un virus bénin et saisonnier. Telle est l'hypothèse exposée, avec les réserves qui s'imposent, lors d'une audition devant les sénateurs par les Prs Bruno Lina (responsable du Centre national de référence des virus respiratoires, CHU de Lyon) et Éric Caumes (chef du service des maladies infectieuses et tropicales à la Pitié-Salpêtrière, Paris).
« Si l'on se base sur l'exemple historique de la grippe russe de 1889, il faut quelques années pour qu'une maladie infectieuse circule, devienne moins pathogène, puis que les pics épidémiques s'espacent et que l'on finisse par vivre avec, détaille le Pr Caumes. C'est ce qu'on observe avec le variant Omicron qui suit le cas général, il a gagné en transmissibilité ce qu'il a perdu en pathogénicité. J'avais prévu que la pandémie durerait 3 à 5 ans, même s’il faut être honnête : on n'en sait rien. »
Pour le Pr Lina, il y a traditionnellement quatre phases dans l'apparition d'une nouvelle maladie chez l'homme : la phase d'émergence (le virus est transmis à l'homme depuis un réservoir animal), la phase de diffusion (le virus mute pour gagner en infectiosité pour être transmise d'un homme à un autre), puis il y a la phase d'évolution par gain de « fitness » (le virus devient plus adapté, plus transmissible et plus infectieux) et pour finir la phase d'évolution avec échappement immunitaire.
Le vaccin, accélérateur de la transition
« La phase de diffusion a vu l'émergence du génogroupe G qui est devenu le génogroupe de référence, précise le Pr Lina. La phase de gain de fitness a été une phase de convergence évolutive observée simultanément partout sur le global avec les variants Alpha, Bêta, Gamma et Delta ». Contrairement aux trois variants cités précédemment, le variant Omicron a installé un système d'échappement immunitaire.
« Omicron échappe à la pression de l'immunité collective et l'on commence à voir apparaître un sous-variant BA.2, alors que les variants précédents tous issus des virus initiaux n'avaient pas donné de descendance à cause de la pression immunitaire, résume le Pr Lina. Mon hypothèse est que la vaccination a créé un niveau d'immunité collective, ce qui a eu un impact sur la vitesse de bascule entre les différentes phases de la pandémie. »
Le virologue reste toutefois prudent : « Le virus nous a déjà surpris, et il peut recommencer, prévient-il. Il faut garder en tête le risque de rétro-zoonose. On a décrit de nombreux cas de transmission du Sars-CoV-2 depuis l'homme vers les cervidés, les visons ou les animaux de compagnie. Le virus peut recommencer à évoluer, acquérir de nouvelles capacités évolutives et constituer la racine d'un nouveau virus. »
Des données encourageantes en France
Pour l'heure, les données présentées par Vittoria Colizza (équipe Maladies transmissibles : surveillance et modélisation de l'Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique) se veulent rassurantes. « La décrue est en cours, insiste-t-elle. Les vacances scolaires vont réduire les chances de propagation, mais il faut se méfier. Au Royaume-Uni, après une décrue assez rapide, le nombre de contaminations a connu un plateau suivi d'une nouvelle baisse et d'un nouveau plateau. »
« Les hommes politiques et la presse voudraient qu'on leur donne un calendrier de ce qui va se passer, mais ce n'est tout simplement pas possible, rappelle le Pr Lina. Nous ne disposons pas des indicateurs fiables qui ne pourront être fournis que par une analyse a posteriori de la situation. »
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?