La chloroquine, substitut synthétique de la quinine, est un vieux médicament commercialisé en France depuis 1949 pour faire le traitement et la prévention du paludisme. Elle est à nouveau d’actualité depuis que les médecins chinois ont écrit l’avoir l’utilisée avec une certaine efficacité chez les patients infectés par le COVID-19, même si leurs publications n’apportent pas de données précises et objectives.
En France, c’est son dérivé hydroxylé, l’hydroxychloroquine, indiqué pour traiter les maladies articulaires d'origine inflammatoire, telles que la polyarthrite rhumatoïde ou le lupus, qui a été utilisé dans un essai ouvert et non randomisé. Les résultats détaillés de cette étude* ont été publiés et il est donc possible de les analyser et d’en critiquer la méthodologie. Vingt-six patients ont été inclus pour recevoir l’hydroxychloroquine (600 mg/j pendant 7 jours) associée chez six d’entre eux à l’azithromycine pendant 5 jours (500 mg le premier jour et 250 mg les 4 jours suivants).
Sous-estimation possible des tests négatifs
La négativation du test PCR détectant le virus sur un écouvillon pharyngé réalisé au 6e jour a été observée chez 70 % des patients, contre seulement chez 20 % des témoins ; cependant la comparaison est historique, la comparabilité des deux groupes n’étant pas assurée par la méthodologie. De plus, sur les 16 témoins, 7 n’ont pas été testés au 5e jour et 5 au 6e jour, d'où une possible sous-estimation des tests négatifs à la fin de l'étude dans ce groupe. Dans le groupe de 26 patients inclus pour être traités, 6 patients sont déclarés perdus de vue, alors qu’il s’agit d’arrêts prématurés, puisqu’on connaît leur devenir ; quatre d’entre eux sont sortis de l’étude pour aggravation de leur état ( 3 passages en soins intensifs et 1 décès) ; ils n’ont pas été pris en compte dans l’analyse et ceci a peut-être surestimé le pourcentage de négativation sous traitement.
Il aurait fallu réaliser une analyse dite en intention de traiter prenant en compte tous les patients inclus pour être traités. Une telle analyse ramène le pourcentage de négativation des tests de 70 % à 50 %. Ce pourcentage est plus élevé dans le sous-groupe traité par hydroxychloroquine et azithromycine, mais le nombre des patients est faible (6).
Ces réflexions ne doivent pas nier l'intérêt potentiel du traitement par hydroxychloroquine et l’utilité de l’étude préliminaire du Pr Raoult et de son équipe. À ce titre, il est certain que les résultats d'essais comparatifs et randomisés seront les bienvenus. Ce médicament existant sur le marché, cela n'empêche pas son utilisation à titre compassionnel à condition d'une surveillance médicale stricte, en particulier cardio-vasculaire et d'un consentement éclairé du patient.
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* Gautret et al. (2020) Hydroxychloroquine and azithromycin as a treatment of COVID-19: results of an openlabel nonrandomized clinical trial. International Journal of Antimicrobial Agents – In Press 17 March 2020 – DOI : 10.101 6/j.ijantimicag.2020.105949
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