Courrier des lecteurs

Sanofi : une polémique prématurée

Publié le 26/05/2020

Il y a quelques jours de cela une « terrible » nouvelle a agité le monde des médias. Le laboratoire SANOFI, ancien joyau de l’industrie pharmaceutique française, a décidé (point de vue de son directeur général) de mettre sur le marché son vaccin concernant le COVID-19 en priorité aux États Unis. Très rapidement, de nombreux politiques de notre pays ont pris la parole pour dénoncer cette prise de position qui met à l’écart la vieille Europe. Ainsi, nous avons pu assister à des joutes verbales sur les plateaux télévisés des principales têtes pensantes de l’opposition politique à LAREM.

Cependant, plusieurs questions méritent d’être posées suite à cette information « capitale ». Sommes-nous sûrs que le laboratoire SANOFI sera capable de mettre sur le marché un vaccin pour le COVID-19 ? Lorsque ce vaccin sera commercialisé (sa date de mise sur le marché est prévue pour la fin 2020), sera-t-il efficace pour lutter contre le COVID-20 car une mutation est probable ? D’autres laboratoires pharmaceutiques n’auront-ils pas l’opportunité de commercialiser d’autres vaccins plus efficaces ?

Bref, tout cela pour dire que les journalistes et les politiciens discutent en prenant une option sur un avenir hypothétique. Le plus grave dans cette histoire, ce sont les conséquences sur le citoyen français de base qui croit dans de telles supputations.

Une réalité bien différente que les envolées lyriques de M. Macron

Notre président choqué par l’attitude du laboratoire s’est permis de faire de belles envolées lyriques en mettant en avant la nécessité d’une protection des êtres humains de manière générale. Cependant, cette attitude très humaniste de notre dirigeant, mériterait une mise au point sur la politique de santé en France. En effet, depuis des décennies la France s’illustre par ses prises de position dans sa politique d’achat de médicaments. En effet, en Europe, notre pays est celui où les médicaments sont les moins onéreux.

Cela bien entendu engendre un « juste » retour des choses de la part de l’industrie pharmaceutique qui ne donne pas la priorité dans la vente de ses médicaments à notre beau pays. Cette attitude est à l’origine de nombreuses ruptures de stocks ; ruptures qui concernent parfois des thérapeutiques essentielles ! Nombreux sont les cliniciens qui doivent s’adapter à cette nouvelle donne qui oblige ces praticiens à prendre plus de risques pour les patients.

N’est-il pas plus important d’intervenir sur cette situation intolérable et pouvant se résoudre en un tour de main (il faut mettre la main au portefeuille), plutôt que de philosopher sur la venue d’un hypothétique vaccin ?

« La priorité d’une chose se mesure en fonction du besoin immédiat » Ghosn Talal.

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Pierre Frances, Médecin généraliste, Banyuls-sur-mer (66)

Source : Le Quotidien du médecin