Le bulletin épidémiologique hebdomadaire du 11 septembre 2018 atteste (1) d’une augmentation phénoménale des cas d’hépatite E autochtones (9 en 2002 ; 2 292 en 2016). Elle résulte en partie de tests plus fiables et plus fréquents depuis 2010 mais pas uniquement… car le nombre de cas importés demeure stable.
« Cette probable augmentation de la prévalence de l’hépatite E autochtone impose la recherche d’hépatite E devant une cytolyse aiguë au même titre que celle d’hépatite A, même chez une personne qui reste en France », estime le Pr Philippe Sogni, hépatologue à l’hôpital Cochin, à Paris.
Dans les formes autochtones (majoritairement de génotype 3) la contamination est essentiellement liée à l’ingestion de viande de porc, de foie de porc (figatelles), de sanglier, de cervidés et de lapins. Vingt minutes de cuisson à 71 °C sont nécessaires pour inactiver le virus de l'hépathite E (VHE). Chez l’immunodéprimé (transplantés, sous chimiothérapie, VIH), le risque de passage à la chronicité et d’évolution assez rapide vers la fibrose fait déconseiller la consommation de ces produits. Moins souvent, la contamination résulte d’un contact avec la viande (chasseur, vétérinaire, personnel d’abattoir). Exceptionnellement, une contamination par l’eau, les coquillages, les légumes ou la transfusion a été rapportée. Dans les cas importés (patient de retour du Maghreb, Moyen Orient, Asie), la contamination est oro-fécale, souvent de génotype 1 ou 2.
L’incubation dure 2 à 6 semaines. Le patient excrète le virus de quelques jours avant la maladie et pendant 3 à 4 semaines (2). Chez l’immunocompétent, le diagnostic repose sur les tests sérologiques (recherche des IgG et IgM anti-VHE) à confirmer en cas de positivité par PCR dans le sang ou les selles.
Penser au VHE
La forme aiguë souvent asymptomatique, peut être symptomatique ou à manifestations extra-hépatiques. L’hépatite E standard aiguë ne se traite pas. « Il faut savoir rechercher l’infection à VHE devant des manifestations extra-hépatiques, neurologiques (syndrome de Guillain-Barré, paralysie de Bell, myélite aiguë transverse, névralgie amyotrophiante notamment le syndrome de Parsonage-Turner, très évocateur), hématologiques (cryoglobulinémie, gammapathie monoclonale bénigne, thrombopathie, aplasie médullaire), pancréatiques (pancréatite aiguë), plus rarement rénales (glomérulonéphrites aiguë). Si elles posent la question de l’origine (virus ou réaction immunitaire au virus ?), la tendance est de les traiter par ribavirine », indique le Pr Sogni.
L’hépatite E autochtone peut entraîner une décompensation de l'hépatopathie chronique mais évolue exceptionnellement vers une hépatite fulminante. Celle-ci est surtout liée aux génotypes 1 ou 2 dans le Sud-Est asiatique (nombreux décès notamment chez la femme enceinte lors d’épidémies annuelles en Inde, au Bengladesh).
La forme chronique relève d’un traitement de 3 mois par ribavirine. La négativation de la PCR à 1 mois laisse présager la réussite du traitement, mais la guérison n’est affirmée (80% des cas) que si la PCR reste négative 3 mois après la fin du traitement.
Depuis 2015, la recherche de VHE est effectuée dans certains dons de sang pour disposer de sang non contaminé pour les patients immunodéprimés. L’introduction d’un dépistage génomique viral systématique des dons de sang en 2019 est à l’étude.
(1) E. Couturier et al., BEH, 28, 566, 2018
(2) L. Parlati et al., Lettre de l’infectiologue, 3, 120, 2017
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