Tous les médecins connaissent les douleurs dites de « membre fantôme » décrites par les patients amputés. Est-il possible de rapprocher ce phénomène des illusions rapportées par de nombreux patients sous anesthésie régionale? C’est à cette question qu’ont tenté de répondre des chercheurs de l’Inserm à Toulouse dirigés par Stein Silva (unité 825 « Imagerie cérébrale et handicaps neurologiques ») en collaboration avec l’Équipe d’Accueil « Modélisation des agressions tissulaires et nociceptives ».
Dans leur étude, l’équipe dirigée par Stein Silva a suivi 20 personnes devant subir une anesthésie du bras avant une intervention chirurgicale. Des images 3D de mains sous différents angles de vue leur ont été soumises. Leur capacité à reconnaître une main droite d’une main gauche a été évaluée, ce qui est censé refléter la représentation de leur schéma corporel.
Au cours de ces expériences, les scientifiques ont constaté trois éléments. Premièrement, tous les patients anesthésiés décrivent des sensations illusoires de leur bras (sensation de gonflement, différence de taille et de forme, posture imaginée). Deuxièmement, par rapport aux témoins, ils sont beaucoup plus lents à reconnaître leur main droite de leur main gauche et font beaucoup plus d’erreurs. Enfin, la vision du memebre anesthésie améliore les performances obtenues.
L’anesthésie d’un bras modifie l’activité du cerveau et altère rapidement notre façon de percevoir notre corps. Selon eux, la genèse de ces illusions serait en rapport avec la plasticité cérébrale à court terme. Depuis quelques années, les neurosciences montrent que le cerveau est une structure dynamique et que la plasticité permet l’apprentissage, la mémorisation ou la récupération après une agression.
Autrement dit, l’anesthésie régionale, c’est-à-dire la déafférentation périphérique, modifie l’activité du cerveau. Reste aux chercheurs à caractériser précisément les régions cérébrales impliquées et de comprendre comment les circuits neuronaux se réorganisent. À terme, l’équipe vise une utilisation de l’anesthésie à but thérapeutique pour traiter les douleurs du membre fantôme. Pour Stein Silva, il faudra certainement « développer des techniques d’anesthésie nouvelles qui permettront d’inhiber ou de stimuler directement certaines représentations cérébrales ».
Anesthesiology, janvier 2011.
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