La dénutrition est caractérisée par un bilan énergétique et/ou protéique négatif. Elle peut être liée à un déficit d’apport isolé, une augmentation des dépenses ou des pertes énergétiques et/ou protéiques ou leur association et se traduit par une perte de poids involontaire.
Ce déséquilibre nutritionnel fragilise l'organisme : risque augmenté d’infection, diminution de la force musculaire et de la mobilité (donc l’autonomie), augmentation de la morbimortalité de nombreuses maladies (pathologies cardio-vasculaires, obésité, diabète, cancers, maladies infectieuses, infections nosocomiales postopératoires, défaillances chroniques d’organes, maladies neurodégénératives, anorexie mentale). Une personne en surpoids ou obèse peut être dénutrie (chirurgie bariatrique, autre maladie).
La dénutrition en oncologie adulte est un facteur pronostique majeur. Dans ce contexte particulier, c’est la conjonction de l’indice de masse corporelle (IMC) et de la perte de poids (sans notion de durée) qui permet le pronostic le plus précis. La dénutrition, qui contribue à l’augmentation de la toxicité des chimiothérapies et des radiothérapies, est responsable d’un doublement du nombre de réhospitalisations.
La dénutrition sous toutes ses formes est un facteur important de morbidité et de mortalité prématurée de la mère et de l’enfant.
Les questions à se poser
1. Le patient est-il à risque de dénutrition ?
Dans toutes les situations à risque, le poids doit être mesuré à chaque consultation et/ou hospitalisation et renseigné dans le dossier médical. La masse maigre peut être évaluée au cabinet par un impédancemètre multifréquence ; la masse musculaire par la force de préhension voire la mesure de la circonférence brachiale. Une réglette, type échelle visuelle analogique (SEFI disponible sur le site sefi-nutrition.com), permet au patient d’évaluer ses ingestats. Le diagnostic de dénutrition est clinique et repose sur la présence d’au moins un critère étiologique et d’un critère phénotypique.
2. Présente-t-il des critères phénotypiques de dénutrition ?
Perte de poids ≥ 5 % en 1 mois ou ≥ 10 % en 6 mois ou ≥ 10 % par rapport au poids habituel avant le début de la maladie ; réduction de la masse et/ou de la fonction musculaires ; IMC < 18,5.
3. Pourquoi est-il dénutri ? Identifier les critères étiologiques de dénutrition :
- Réduction de la prise alimentaire ≥ 50 % pendant plus d’une semaine ou toute réduction des apports pendant plus de deux semaines par rapport à la consommation alimentaire habituelle quantifiée ou aux besoins protéino-énergétiques estimés.
- Absorption réduite (malabsorption/maldigestion).
- Situation d’agression (hypercatabolisme protéique avec ou sans syndrome inflammatoire)
- Pathologie aiguë ou chronique évolutive ou maligne évolutive.
4. Cette dénutrition est-elle sévère ?
Si la dénutrition est confirmée, l’évaluation de la sévérité est fondée sur les critères phénotypiques. Elle est dite sévère si l’IMC ≤ 17 kg/m2, et/ou la perte de poids ≥ 10 % en 1 mois ou ≥ 15 % en 6 mois ou ≥ 15 % par rapport au poids habituel avant le début de la maladie et/ou si la mesure de l’albuminémie par immunonéphélémétrie ou immunoturbidimétrie ≤ 30 g/L (dosage par méthode classique d’électrophorèse des protéines non valable). La présence de plusieurs critères de dénutrition modérée suffit à la qualifier de sévère.
Ce qu’il faut faire
- Évaluer à chaque consultation en ambulatoire l’état nutritionnel : si un patient apparaît dénutri, il s’agit d’abord de comprendre pourquoi (difficultés de déglutition, douleurs, syndrome sec, perte de goût, etc.) et tenter de corriger.
- Mettre en place une prise en charge nutritionnelle, complémentaire des traitements de la maladie causale, en augmentant la valeur énergétique et protéique des ingestats, en tenant compte des préférences alimentaires, en fractionnant les repas et en proposant des compléments nutritionnels oraux, remboursés si l’IMC est inférieur à 18,5.
- Adapter selon le degré de sévérité pour prévenir un syndrome de renutrition : plus l’IMC est bas, plus ce risque est grand. La renutrition doit être progressive avec surveillance régulière du phosphore, de la calcémie et du magnésium et éventuelle supplémentation. La dénutrition n’est pas synonyme de carences : la supplémentation par vitamines ou minéraux impose d’objectiver biologiquement les déficits et être sélective.
- Réévaluer systématiquement et régulièrement.
Ce qu’il faut retenir
- Un patient en surpoids peut être dénutri : il faut l’identifier et comprendre pourquoi.
- L’évaluation de l’équilibre nutritionnel doit faire partie de la consultation du médecin généraliste.
- Plus la dénutrition est sévère, plus la renutrition doit être progressive.
- La dénutrition est un facteur de morbimortalité.
- Quelle que soit la maladie causale, la renutrition peut en améliorer le pronostic.
Recommandations HAS, Dénutrition de l’enfant et de l’adulte de moins de 70 ans, 2019 D'après un entretien avec le Pr Jacques Delarue, CHRU/Faculté de médecine de Brest
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