Avec environ 100 000 milliards de micro-organismes, le microbiote intestinal est composé de 500 à 1 000 espèces bactériennes différentes (dont principalement Firmicutes, Bacteroidetes, Proteobacteria et Actinobacteria). Si cette flore intestinale, dont l'acquisition débute dès la naissance, reste relativement stable au cours du temps, son équilibre peut néanmoins être perturbé par différents facteurs (âge, stress…) et créer une dysbiose, impliquée dans un grand nombre de maladies (cancer colorectal et diabète notamment).
Un lien avec la croissance
Un lien entre microbiote et croissance osseuse vient d'être confirmé par une étude (1) réalisée chez des souris de la lignée Balb/C germ-free. L'absence de microbiote chez ces souris convenablement nourries entraîne un défaut de croissance, un poids et une taille inférieurs à ceux des animaux normaux. Alors qu'une diminution des protéines alimentaires provoque un arrêt de croissance, l'ajout à l'alimentation de probiotiques de la famille des lactobacilles permet à ces souris de retrouver une croissance identique à celle des animaux normaux.
Dans un essai précédemment réalisé (2), des chercheurs ont sélectionné des paires de jumeaux du Malawi dont l'un était dénutri et l'autre non. « Ils ont prélevé des échantillons fécaux de chaque enfant et les ont administrés à une souris. Après trois semaines, ils observent que la souris germ-free qui reçoit le microbiote de l'enfant malnutri a une croissance ralentie, alors que la souris recevant le microbiote de l'enfant bien nourri a une croissance harmonieuse. On peut donc transférer le phénotype de malnutrition uniquement avec le microbiote », explique le Pr René Rizzoli (Genève). La croissance de la souris ayant reçu le microbiote de l'enfant dénutri peut ensuite être normalisée par la transplantation du microbiote de l'autre souris.
Rôle des probiotiques
Une expérience chez des souris ovariectomisées a mis en évidence le potentiel des probiotiques à corriger la perte osseuse au niveau du fémur et des vertèbres (3). De plus, une étude chinoise sur six patients normaux, six ostéopéniques et six ostéoporotiques montre des microbiotes différents dans chaque groupe de patients, notamment un rapport Firmicutes/Bacteroidetes significativement plus élevé en cas d'ostéoporose (respectivement 1,3 vs 1,75 vs 3,3). Et certaines bactéries anormalement présentes pourraient s'avérer des marqueurs spécifiques d'une faible masse osseuse (4). « On en est au balbutiement du domaine, mais des données intéressantes commencent à apparaître, commente le Pr Rizzoli. Une étude danoise réalisée versus placebo chez 90 personnes, rapportée cette année lors du congrès international de l'ostéoporose, a mis en évidence une réduction de la perte osseuse survenant avec l'âge grâce à l'administration d'un lactobacille pendant un an. »
En effet, la consommation quotidienne de yaourts diminuerait le risque d'ostéoporose de 40 % chez les femmes et 50 % chez les hommes (5). Selon un essai suédois mené chez plus de 60 000 femmes suivies pendant vingt ans, la prise quotidienne de produits laitiers réduirait le risque de fracture de la hanche, à hauteur de 10 à 15 % par portion de yaourt (200 g) ou de fromage (20 g) [6]. Cette baisse atteindrait 20 % en associant des fruits et légumes aux produits laitiers fermentés (7).
D’après une conférence de presse du centre de recherche et d’information nutritionnelles (Cerin), avec la participation du Pr René Rizzoli (CHU de Genève), lors du congrès international de l’ostéoporose (21 avril 2018)
(1) Schwarzer M. et al. Calc Tissue Int. 2018;102(4): 387-405
(2) Blanton LV et al Science. 2016 Jun 24;352(6293):1533
(3) Britton RA et al. J Cell Physiol. 2014 Nov;229 (11):1822-30
(4) Wang J et al. PeerJ. 2017
(5) Laird E et col. Osteoporos Int. 2017 Aug;28(8):2409-19
(6) Michaëlsson K et al. BMJ. 2014;349:g6015
(7) Michaëlsson K et col J Bone Miner Res. 2018 Mar;33(3):449-57
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