Lors de chaque consultation, le poids d'un patient doit être mesuré et noté dans son dossier médical. C'est l'un des messages clés des nouvelles recommandations de bonne pratique de la Haute autorité de santé (HAS) sur le diagnostic de la dénutrition de l'enfant et de l'adulte (jusqu'à 70 ans).
La définition de la dénutrition est complexe. Elle est définie ici comme « l'état d’un organisme en déséquilibre nutritionnel ». « La dénutrition est une perte de la masse musculaire qui aggrave le pronostic des maladies associées », complète pour « le Quotidien » le Pr Éric Fontaine, membre du groupe de travail et nutritionniste à Grenoble.
Une personne obèse peut être dénutrie
La variation de poids est un paramètre essentiel à évaluer pour repérer une personne dénutrie, d'où l'importance de bien noter le poids d'une consultation à l'autre. « Une perte “spontanée” de poids de plus de 3 kg n'est jamais anodine », souligne le nutritionniste.
À noter qu'une personne en surpoids ou obèse peut souffrir de dénutrition. « C'est même très fréquent : l'IMC moyen à l'hôpital est de 26, et un tiers des patients y sont dénutris, rapporte le Pr Fontaine. En cas d'inflammation, les réserves de graisses ne sont pas mobilisées. Ce sont donc les réserves de muscles qui s'épuisent. »
Baisse de la prise alimentaire
Le diagnostic de la dénutrition repose sur la présence d'au moins un critère phénotypique et d'un critère étiologique.
Les critères phénotypiques les plus fréquents sont basés sur la perte de poids (perte de poids supérieure ou égale à 5 % en 1 mois ou bien une perte supérieure ou égale à 10 % en 6 mois ou par rapport au poids avant le début de la maladie) et l'IMC (inférieur à 18,5 kg/m2 chez les adultes ou inférieur à la courbe IOTF* 18,5 pour les enfants).
« Concernant les critères étiologiques, la dénutrition est associée à une baisse de la prise alimentaire dans la grande majorité des cas. Cette diminution des ingesta est souvent consécutive à une maladie inflammatoire », indique le Pr Fontaine.
L'albuminémie n'est pas un critère diagnostique
Par ailleurs, l'albuminémie ne doit pas être considérée comme un facteur diagnostique. « Cela va changer les pratiques, car elle reste encore très utilisée en ce sens, précise le nutritionniste. Elle est toutefois recommandée pour évaluer la gravité de la dénutrition. Un taux d'albumine inférieur à 30 g/l chez une personne dénutrie témoigne d'une dénutrition sévère. »
Quant à la prise en charge, elle est variable d'une situation à l'autre. « Mais elle est d'autant plus efficace que le diagnostic est fait tôt », note le nutritionniste. La prise en charge repose sur un enrichissement nutritionnel, à base de gras et de protéines. « C'est en fait l'opposé du message sanitaire de prévention de l'obésité. » Si cela n'est pas suffisant, une nutrition artificielle est mise en place. « La nutrition artificielle doit débuter à l'hôpital, avant de se poursuivre à domicile », explique le Pr Fontaine.
En cas d'hospitalisation, une évaluation du patient doit être réalisée au moins une fois par semaine. La surveillance est plus espacée en ambulatoire (dans le mois suivant pour les enfants et dans les 3 mois pour les adultes).
La prise en charge en attente de recos
Les détails de la prise en charge n'ont pas été intégrés à ces recommandations, uniquement centrées sur le diagnostic. « Il n'existe pas encore de recommandations sur la prise en charge, mais nous espérons que la HAS en demandera dans les années à venir », avance le Pr Fontaine.
Les recommandations sur la dénutrition sont une mise à jour des recommandations de 2003 pour les adultes de 18 à 70 ans. Il s'agit en revanche des premières pour la pédiatrie. Le diagnostic de la dénutrition chez les plus de 70 ans a fait l'objet de recommandations en 2007, qui seront prochainement actualisées.
* International Obesity Task Force (courbes d'IMC utilisées chez les enfants)
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