Parue en mars dernier dans le JAMA, une étude randomisée avait évalué l’effet sur la survenue de la fibrillation atriale (FA) d'une supplémentation en oméga-3 et/ou en vitamine D. Elle était menée chez 25 000 sujets de plus de 50 ans, sans antécédents cardiovasculaires (1). Les résultats n'avaient pas mis en évidence de bénéfice à cinq ans : 3,7 % de FA sous oméga-3 versus 3,4 % sous placebo. Pour l'éditorialiste commentant cette étude, ce n’était pas une surprise. « Les quatre essais parus ces deux dernières années – STRENGH, REDUCE IT, OMEMI et VITAL - suggèrent plus une augmentation des FA sous oméga-3 avec un effet dose dépendant » (2). Fin avril, une méta-analyse présentée au congrès 2021 de l’EHRA est venue confirmer cet impact délétère (3). « Même si un essai a mis en évidence un bénéfice cardiovasculaire des oméga-3 chez ces patients à risque cardiovasculaire (CV) élevé, leur impact négatif sur les FA doit être pris en compte dans leur prescription et/ou leur achat en vente libre », soulignent les auteurs.
Une vaste méta-analyse chez des hyper-lipidémiques
La méta-analyse porte sur cinq essais randomisés, versus placebo, menés chez des sujets hyper-lipidémiques présentant un antécédant CV, ou à haut risque CV. Les oméga-3 sont en effet recommandés chez les sujets présentant une hypertriglycéridémie. Il s'agit des études REDUCE-IT, ASCEND, R&P, STRENGTH et OMEMI. Cette méta-analyse rassemble ainsi plus de 50 000 sujets supplémentés en oméga-3 à des doses allant de 0,84 à 4 g/j. Leur suivi cardiovasculaire va de 2 à 7,4 ans. Le critère primaire est l'incidence des FA sous oméga-3.
Un surrisque de FA confirmé dans toutes les études
Globalement, la supplémentation en oméga-3 est associée à un surrisque de FA. Chez ces patients hyperlipidémiques à haut risque CV, ce surrisque est de l'ordre de 40 % (RR = 1,37; 1,2-1,5; p < 0,001). Cet impact est retrouvé dans toutes les études : il n'y a pas d'hétérogénéité. Dans une analyse de sensibilité, les auteurs ont ajouté l'étude de rythmologie VITAL. À nouveau, la supplémentation est associée à une augmentation des FA (RR = 1,29; 1,1-1,5; p = 0,0002).
Pédale douce sur la supplémentation en oméga-3
« Les données sur le bénéfice cardiovasculaire de la supplémentation en oméga-3 sont peu consistantes. Certes, dans l'étude REDUCE-IT, une haute dose d'oméga-3 contenant de l'icosapent éthyl hautement purifié était associée à une réduction du critère cardiovasculaire primaire composite. Mais ce bénéfice n'a pas été retrouvé dans l'étude STRENGTH utilisant la même dose d'oméga-3, avec une formulation différente puisqu'il s'agissait d'un mélange d'acide eicosapentaenoic (EPA) et d'acide docosahexaenoic (DHA). Ni dans aucune des études menées avec de plus faibles doses d'oméga-3, rappellent les auteurs. Alors que le bénéfice cardiovasculaire est inconsistant, presque toutes les études mettent en évidence un surrisque de FA, même à faibles doses. Un surrisque confirmé par cette méta-analyse. Il est donc indispensable de garder en mémoire ce ratio bénéfice/risque avant d'envisager une supplémentation en oméga-3 ».
En bref, pédale douce sur la supplémentation en oméga-3 !
(1) Albert CM et al. Effect of Marine Omega-3 Fatty Acid and Vitamin D Supplementation on Incident Atrial Fibrillation : A Randomized Clinical Trial. JAMA 2021;325:1061-73
(2) Curfma G. Omega-3 Fatty Acids and Atrial Fibrillation. JAMA 2021;325:1073
(3) Lombardi M et al. Omega-3 fatty acids supplementation and risk of atrial fibrillation: an updated meta-analysis of randomized controlled trials. Eur Heart J Cardiovasc Pharmacother. 2021; doi:10.1093/ehjcvp/pvab008.
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