Evaluer le degré de sévérité clinique et biologique

Conduite à tenir devant une neutropénie chronique de l’enfant

Publié le 20/10/2011
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Interprétation délicate

À peine 4 % des polynucléaires neutrophiles (PNN), dont le nombre est calculé sur la NFS, circulent dans le sang périphérique. Ils sont essentiellement, à 92 %, dans la moelle osseuse. Leur durée de vie est de 48 heures environ et leur renouvellement extrêmement rapide. Leur évolution « chaotique » chez un même individu et d’un individu à l’autre, rend l’interprétation de la formule délicate. Il existe notamment des variations ethniques (4,5 % des sujets noirs ont naturellement moins de 1 500 PNN contre 0,8 % des blancs).

Est-ce une neutropénie ?

La neutropénie est, chez l’enfant, qualifiée de modérée entre 500 et 1 500 PNN par mm3, profonde en deçà de 500, avec des variations selon l’âge (un enfant de moins d’un an est neutropénique à moins de 1 500 PNN/mm3, un enfant de 2 mois à 1 an, à moins de 1 000 PNN). En sachant que le taux est cyclique et chute parfois à 200 PNN par mm3. C’est à ces chiffres que surviennent les symptômes, bucco-dentaires en particulier.

Chronique

Au-delà de 3 mois d’évolution, la neutropénie est dite chronique ou permanente. Elle est d’origine centrale (la moelle osseuse) ou périphérique, accompagnée ou non de symptômes. Enfin, on la qualifie de sévère en cas de retentissement clinique, le risque principal étant infectieux, a fortiori si l’enfant reçoit des immunosuppresseurs : aphtes, parodontites, gingivostomatites, cellulite, zones de nécrose parfois (de la marge anale possiblement). L’hémogramme (pour le taux de monocytes et de PNN), complété par un frottis sanguin (pour la cytologie), permet de confirmer le diagnostic de neutropénie et de faire le diagnostic étiologique.

Acquise et modérée

Première hypothèse à évoquer, celle d’une neutropénie acquise, d’origine médicamenteuse, toxique (radiations ionisantes), secondaire à une infection (virale aiguë, choc septique, fièvre prolongée), une hémopathie acquise (leucémie aiguë, aplasie médullaire, etc.), une endocrinopathie (dysthyroïdie, insuffisance surrénalienne, etc.) ou des carences nutritionnelles (B12, folates et/ou cuivre).

La plus fréquente des causes de neutropénie chronique de l’enfant est la neutropénie auto-immune primitive où le système immunitaire fabrique des anticorps anti-PNN. Elle est souvent isolée, parfois associée à une monocytose, et découverte à l’occasion d’un épisode infectieux de gravité modérée chez un petit enfant (médiane à 8 mois). Elle régresse spontanément en 12 à 24 mois. La détection des anticorps doit être répétée, 75 % des cas seulement étant repérés au premier examen. Pour le reste des neutropénies, la prise en charge relève du spécialiste.

Hospitaliser si infection menaçante

Il s’agit donc d’évaluer le degré de sévérité clinique et biologique de la neutropénie, de mesurer le risque infectieux notamment (sur la CRP, et éventuellement la procalcitonine), voire d’hospitaliser pour une antibiothérapie d’urgence en cas d’infection menaçante. Si la neutropénie est profonde et prolongée, une antibioprophylaxie peut être envisagée. L’avenir des enfants porteurs d’une neutropénie profonde a été transformé par le G-CSF (pour Granulocyte-Colony Stimulating Factor).

D’après la communication du Dr Nizar Mahlaoui, Unité d’hémato-immunologie et de rhumatologie pédiatrique et Centre de référence Déficits immunitaires héréditaires (Necker-Enfants Malades à Paris), www.cerredih.fr (qui abrite le Registre national des neutropénies chroniques de l’enfant et de l’adulte)

 Dr BRIGITTE BLOND

Source : Le Quotidien du Médecin: 9029