Prise en charge très précoce

Cryptorchidie : examen clinique, explorations et conduite à tenir

Publié le 27/05/2011
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Crédit photo : DR

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Quelques notions de base 

Embryologie et migration

La gonade, indifférenciée jusqu’à la 7e semaine, va se détacher à ce moment du mésonéphros et commencer sa migration. Elle va traverser l’abdomen entre la 10e et la 23e semaines. Elle passe l’orifice inguinal entre la 26 et la 28e semaine. Un complément de descente peut se faire après la naissance, mais en aucun cas après l’âge de 4-6 mois.

Tout ceci est sous la dépendance des sécrétions hormonales et peptidique importantes. Ces deux éléments vont faire régresser le ligament suspenseur, et faire se développer et se contracter le gubernaculum testis.

La croissance testiculaire après la naissance

Elle est importante jusqu’à la 3e semaine, diminue jusqu’à un an puis est nulle jusqu’à 6 ans. Elle restera très faible de 6 ans à la période prépubertaire.

Les facteurs de risque de cryptorchidies sont multiples : prématurité, hypotrophie, association avec d’autres anomalies génitales (hypospadias). Il existe également des facteurs génétiques.

Le point le plus intéressant reste la possibilité de facteurs environnementaux, hormono-mimétiques : xéno-estrogènes, phtalates, herbicides, pesticides,

Les conséquences

Sur le volume : le testicule ectopique est toujours plus petit que l’autre.

Les conséquences cliniques sont de 2 ordres :

- les troubles de la fertilité : les anomalies du spermogramme varient entre 50 et 80 %. La chirurgie précoce (avant un an) améliore la fertilité ;

- le risque de cancer testiculaire : il est 4 fois celui de la population générale si le testicule a été abaissé, 50 à 100 fois s’il n’est pas abaissé. Le risque est d’autant plus important que le testicule était haut. Il porte sur les deux testicules même en cas de cryptorchidie unilatérale.

Différentes formes

Il faut d’emblée préciser les différentes formes de cryptorchidie (fig. 1) Le schéma permet de séparer les formes hautes (intra-abdominales où le testicule n’est pas palpé) et les formes basses où on peut retrouver la glande. À part, l’ectopie vraie (où le testicule « s’est trompé de chemin ») et le testicule ascenseur qui peut prendre sa place et y rester quelques instants.

L’examen clinique

Deux situations peuvent être opposées :

1. Le testicule est palpé : donc il existe. Il est plus ou moins abaissable. On cherchera une hernie associée.

2. Le testicule n’est pas palpé : des examens cliniques répétés permettront de confirmer cette première impression. Une première consultation avec le chirurgien pédiatre s’impose dès à présent.

On recherchera bien sûr toutes les anomalies locales, et en particulier l’hypospadias.

Après l’examen clinique

Évaluation hormonale : elle n’a d’intérêt formel que dans les formes bilatérales avec deux testicules impalpables. C’est une affaire de spécialistes car, en dehors d’un dosage de testostérone (qui n’a d’intérêt que dans les 3 premiers mois), les autres dosages sont plus spécialisés (AMH, inhibine, INSL3). Dans les formes unilatérales, il ne faut rien faire. Dans les situations intermédiaires, l’évaluation est a priori inutile.

L’imagerie : l’échographie n’a pas de pertinence, le scanner est irradiant pour des résultats faibles et l’IRM nécessite une sédation.

Le suivi

Plusieurs cas sont à distinguer selon que le testicule est ou non palpé :

1 il est palpé : s’il y a une hernie associée, l’indication opératoire est formelle, à tout âge. Sinon, réévaluation vers 6 mois et, soit surveillance simple par le pédiatre ou le généraliste traitant si le testicule est en place, soit il est difficilement ou non abaissable, et il faut l’abaisser vers 9 mois.

2 il n’est pas palpé : l’exploration cœlioscopique est alors la seule voie.

La chirurgie

1 Le testicule palpé

La chirurgie d’abaissement se fera en un temps, par deux incisions. La première inguinale permettra de libérer le plus possible les vaisseaux et le déférent, permettant un abaissement sans ou avec le minimum de tension. La seconde, scrotale, permettra de positionner le testicule dans la bourse homolatérale, en faisant en sorte qu’il ne puisse pas remonter.

Cette chirurgie se fera au mieux dans un entourage pédiatrique (chirurgien pédiatre et anesthésiste rompu à cette chirurgie), sous anesthésie générale, accompagnée d’une anesthésie locorégionale empêchant la douleur des premières heures.

2 Le testicule non palpé

C’est donc une exploration cœlioscopique qui s’impose vers 9 mois. Elle va avoir 3 buts :

- savoir si le testicule existe, et si oui quelle est sa taille et sa position

- l’abaisser si c’est possible

- préparer un abaissement secondaire si c’est impossible en un seul temps.

Cette cœlioscopie se fera au mieux avec des instruments de 3 mm. On pourra donc, par de mini-orifices, savoir si le testicule est dans le ventre, ou en est sorti : le pédicule spermatique et le déférent convergent vers l’orifice inguinal (photo 1) Si le testicule est au-delà de l’orifice inguinal, on arrête la cœlioscopie, et on revient au cas précédent : incision inguinale et abaissement si le testicule est de taille correcte, ou orchidectomie s’il est très hypotrophique.

Si le testicule est dans le ventre et atrophique, on fera également une orchidectomie. S’il a une taille correcte, soit on estime pouvoir l’abaisser et après préparation par voie cœlioscopique, on en revient au cas précédent ; soit il est haut et donc inabaissable, et l’on préparera un abaissement secondaire en sectionnant le pédicule spermatique pour permettre à la vascularisation déférentielle de se développer (intervention de fowler-stephens).

Dans un second temps, 6 mois plus tard, toujours par cœlioscopie 3 mm, on fera l’abaissement de ce testicule pédiculé sur le déférent. Cette technique permettra d’obtenir 80 à 90 % de résultats satisfaisants (visuels et palpatoires).

En cas d’agénésie, se pose la question de la fixation du testicule controlatéral, qui permet de préserver la fonction de ce testicule. Il faudra également veiller à prévenir traumatismes du testicule unique restant.

Suites immédiates et proches

Les suites immédiates sont très simples, indolores. À moyen terme, il sera utile de vérifier que le testicule reste en place, et ne remonte pas. Cela arrive en général si la tension est trop importante. Il faudra également suivre la croissance du testicule, pour repérer une éventuelle atrophie secondaire. Celle-ci peut également être due à la tension excessive, ou à une lésion des vaisseaux testiculaires qui sont très fins et délicats.

Les suites à distance

L’enfant doit être suivi annuellement jusqu’à la puberté par son chirurgien pédiatre, pour dépister une éventuelle atrophie secondaire, et pour bien faire comprendre, quand l’enfant est plus grand, que l’autopalpation testiculaire doit être régulière, à la recherche d’une anomalie de forme ou de consistance. En effet la survenue d’une tumeur testiculaire doit être dépistée précocement de façon à permettre une guérison, quasi constante, dans ce cas.

Les troubles de la fertilité sortent du cadre de cet article, mais il semble contre productif de mettre en garde l’enfant pour éviter d’ajouter des facteurs psychologiques. Il sera toujours temps, après une période d’essai

de procréations raisonnable, de consulter.

 Dr ROBERT POLITI Hôpital privé d’Antony et Centre Chirurgical de Boulogne-Billancourt. www.chirurgiepediatrique.r-politi.com

Source : Le Quotidien du Médecin: 8972