Rappelons en préambule, s’il le fallait, que devant une symptomatologie évocatrice de pneumonie associant toux et fièvre, seule la radiographie de thorax ([RT], cliché de face, debout) affirme le diagnostic en mettant en évidence un foyer de condensation alvéolaire… et aussi que la tomodensitométrie thoracique n’a pas d’intérêt dans les situations infectieuses simples.
Différences d'appréciation
En France, les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) de 2009 précisent que le diagnostic de pneumonie communautaire de l’enfant impose une RT, seule à même de référencer l’atteinte parenchymateuse. « Cependant, explique le Pr Dubus, d’autres pays (Grande Bretagne, États-Unis) n’imposent pas la RT pour ce diagnostic. Ils réservent les indications de la RT aux cas cliniques compliqués (détresse respiratoire, échec de traitement initial, hypoxémie…) ».
En cas d’hospitalisation pour pneumonie, les Britanniques vont même plus loin, poursuit-il : « si Français et Nord-Américains s’accordent sur l’importance d’une RT chez ces enfants hospitalisés, pour les Britanniques la RT peut avoir un intérêt mais ne saurait pour autant constituer un examen de routine ».
Pourquoi ces différences d’appréciations actuelles sur l’intérêt de la RT dans le diagnostic de la pneumonie communautaire de l’enfant ? La prescription systématique d’une RT apporte certes le diagnostic formel, mais elle ne fournit pas pour autant le diagnostic microbiologique. Elle irradie, a un coût et pousserait à une plus grande prescription d’antibiotiques du fait de la mise en évidence d’un foyer.
Tous s’accordent sur l’intérêt d’une RT en cas de forme sévère. En revanche, lorsque le tableau clinique est évocateur (toux grasse, fièvre, anomalie du rythme respiratoire), la présomption d’une atteinte des voies aériennes respiratoires basses est forte. Si l’enfant est peu altéré et si sa saturation est normale (forme non compliquée), la RT a peu d’intérêt : elle ne change pas la prise en charge.
Une méta-analyse (1) de 2011 est également en faveur d’une limitation des indications de la RT d’emblée, la réservant aux cas suivants : tableau clinique « ambigu » (comme une fièvre nue avec altération de l’état général), signes de pleurésie à l’examen clinique, symptômes non améliorés à 48 heures, suspicion de corps étranger, pneumonie récidivante, hémoptysie, perte de poids significative, contage tuberculeux, toux > 15 jours, immunodépression, pathologie sous-jacente (pulmonaire, cardiaque, neurologique…), drépanocytose.
La question de la radio de contrôle
Si la RT a été demandée au stade du diagnostic, est-il nécessaire de faire un contrôle après guérison pour s’assurer de la normalité du cliché ?
Les différentes recommandations proposent de ne pas faire de RT de contrôle en cas de pneumonie non compliquée et d’évolution simple sous prise en charge adaptée, chez un enfant sans antécédent.
Elles s’accordent sur l’intérêt de la RT de contrôle quand les symptômes persistent sous traitement bien conduit ou en présence d’autres éléments qui varient selon les pays mais recouvrent : les complications au cours du suivi, la gravité de la présentation initiale, le risque de séquelle pulmonaire liée à l’agent infectieux (bronchiolite oblitérante et adénovirus par exemple), et l’existence d’une maladie sous-jacente.
« Si l’on décide de faire un contrôle radiographique (ce qui n’a probablement pas d’intérêt si l’enfant va bien et n’a pas de maladie sous-jacente), il convient d’attendre au minimum 4 à 6 semaines après le début de l’épisode. La pratique fréquente d’une RT précoce à J8, pour voir l’évolution n’a aucun intérêt si l’enfant s’améliore. Plusieurs études ont en effet montré qu’après une pneumonie, la RT met longtemps à se normaliser », précise le Pr Dubus.
En pratique de nombreux pédiatres libéraux traitent sur présomption clinique. Ils s’affranchissent des recommandations françaises de 2009. Mériteraient-elles d’être à nouveau examinées par la HAS, ou les sociétés savantes ?
D’après un entretien avec le Pr Jean-Christophe Dubus, CHU de Marseille
(1) Bourayou R et al. Arch. Pédiatr. 2011;18:1251-4
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