Première étape, la consultation d’anesthésie se doit d’évaluer les risques et d’en informer parents et enfants. Cette chirurgie expose à deux risques particuliers. Le risque hémorragique, présent les premières heures et surtout au 7- 8e jour, à la chute d’escarre, impose un bilan d’hémostase si l’enfant n’a pas acquis la marche ou si l’examen clinique ou l’interrogatoire des parents fait suspecter un trouble de l’hémostase.
Le risque respiratoire est lié à la chirurgie sur les voies aériennes et à un terrain à risque (SAOS ou hyperréactivité bronchique). La polysomnographie qui permettrait le diagnostic de certitude et de gravité du SAOS n’est disponible que dans 5 % à 10 % des SAOS. D’où l’importance de rechercher des signes indirects (cassure de la courbe staturo-pondérale, transpiration nocturne, agitation diurne, respiration bouche ouverte…) et de réaliser une échographie cardiaque au moindre doute, pour évaluer le retentissement cardiopulmonaire (HTAP, insuffisance cardiaque droite).
Que faire en cas de rhume ? « L’intervention peut régler ce problème récurrent. On ne la reporte (de 2-3 semaines) que si les critères d’opérabilité ne sont pas réunis (présence de sibilants, laryngite, température supérieure à 38 °C, toux grasse ou rhinite purulente) », répond le Pr Orliaguet.
Le geste est douloureux. Pour éviter mémorisation et douleur, l’anesthésie doit assurer hypnose et analgésie (morphinique) suffisantes. On endort les petits par gaz inhalé, les plus grands par perfusion et injection intraveineuse. Intuber avec une sonde à ballonnet réduit le risque d’inhalation de sang pendant l’intervention. Le Pr Orliaguet prévient : « en cas de grosses amygdales linguales jointives, il faut être prêt à déployer des manœuvres face à des situations extrêmement préoccupantes : désaturations difficiles à contrôler suite à des difficultés d’intubation parfois associées à une ventilation au masque facial difficile ».
L’antibioprophylaxie n’est pas indispensable (aucune preuve d’efficacité). La perfusion de soluté isotonique en sel suit la règle des 4-2-1 (4 ml/kg/h si poids‹10 kg, +2 ml/kg/h si poids : 10-20 kg, +1 ml/kg/h si poids› 20 kg). Une pompe évite les débits inappropriés. L’intervention courte et douloureuse nécessite d’anticiper l’analgésie postopératoire par corticoïdes (Dexaméthasone, 0,1 à 0,15 mg/kg) et paracétamol dès l’induction anesthésique pour être au pic d’action en fin d’intervention.
L’enfant est extubé au réveil complet défini par l’ouverture des yeux spontanée ou à la demande. L’extubation doit être réalisée en présence d’un médecin anesthésiste.
À l’hôpital on utilise la morphine (ou les dérivés morphiniques) en titration (bolus répétés jusqu’à soulager la douleur) pour donner la bonne dose au bon patient. Les formes graves de SAOS ont des besoins en morphiniques réduits : attention au risque de surdosage aux doses habituelles !
En dehors des SAOS graves, dès que les critères de réveil sont normaux et que l’ORL a vérifié l’absence de saignement l’enfant quitte la salle de réveil. Dès la 2e heure post opératoire, il peut boire des liquides clairs (jus de pomme, eau ou eau sucrée). En absence de complication (respiratoire, saignement, vomissement) il faut déperfuser l’enfant. A partir de la 6e heure, il peut manger. Quand l’anesthésiste et l’ORL ont vérifié qu’il va bien et ne saigne pas, il peut sortir de l’hôpital.
En cas de SAOS grave, une surveillance intensive de 24 heures en unité de surveillance continue (ou salle de réveil) est requise : il y a en effet durant la première nuit un risque d’apnée à dépister et traiter sans délai.
La codéine interdite avant 18 ans en cas de SAOS
La chirurgie est souvent ambulatoire. Au retour à la maison il incombe aux parents d’évaluer et de traiter la douleur. Celle-ci est maximale les trois premiers jours, souvent difficile à contrôler, et dure parfois 8 jours. Or l’agence Européenne du médicament déconseille depuis juin 2013, la codéine (Codenfan), usuellement associée au paracétamol, chez tous les enfants (âgés de moins de 18 ans) dans l’amygdalectomie (et l’adénoïdectomie) pour SAOS en raison d’un surrisque de complications respiratoires (apnée). Le polymorphisme génétique du cytochrome P2D6 qui transforme cette prodrogue en morphine peut être à l’origine d’inefficacité ou de surdosages (métaboliseurs ultrarapides : apnée, arrêt respiratoire voire décès). Quelles alternatives ? La morphine est délicate à gérer en ville. Le tramadol utilise en partie la même voie du CYP2D6, fait vomir et a peu été étudié en pédiatrie. Les AINS majorent le risque de réintervention pour saignement postopératoire. Utilisés au Royaume Uni, ils sont controversés en France. Une réflexion SFAR et SFORL est en cours.
D’après un entretien avec le Pr. Gilles Orliaguet, Département d’Anesthésie-Réanimation, Hôpital Necker, Paris.
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