Cinq à 10 % des enfants sont étiquetés « allergiques aux antibiotiques ». Les antibiotiques les plus fréquemment incriminés sont les bêtalactamines. Cependant, les allergies ou hypersensibilités vraies sont rares. Lorsqu’un enfant est étiqueté allergique, il reçoit des antibiotiques alternatifs, souvent moins efficaces. Cela est associé à une augmentation de la morbidité et à l’acquisition de résistances bactériennes. En outre, les coûts de santé des patients étiquetés allergiques sont plus élevés que ceux de la population générale. « Il est donc important de lever l’étiquette "allergique aux antibiotiques" rapidement », souligne le Dr Guillaume Lezmi (Paris).
Chronologie et nature des symptômes
Les réactions aux antibiotiques se caractérisent par leur chronologie et leur nature. On distingue ainsi les réactions immédiates ou non. Les réactions immédiates surviennent dans l’heure suivant la dernière prise. Elles sont potentiellement IgE-médiées et exposent donc l’enfant au risque d’anaphylaxie en cas de nouvelle exposition. Les réactions non-immédiates, ou retardées, surviennent plus d’une heure après le début du traitement, en général dans les heures ou jours qui suivent. Elles sont médiées par des lymphocytes T, et n’exposent pas à un surrisque anaphylactique en cas de réexposition, par rapport à la population générale.
Les réactions IgE-médiées entraînent le plus souvent des manifestations cutanées, à type d’urticaire ou d’œdème, parfois respiratoires (asthme, rhinite), rarement anaphylactiques et exceptionnellement digestives. Les réactions médiées par les lymphocytes T sont plutôt à type d’urticaire ou d’exanthème maculopapuleux. Les toxidermies sévères (Dress, Lyell, etc.) n’entrent pas dans le cadre de cet article.
Réaction immédiate : bilan à quatre six semaines
En cas de réaction immédiate, le risque de réaction anaphylactique justifie un bilan allergologique, idéalement réalisé quatre à six semaines après la réaction index. Il se fonde sur la réalisation de prick-tests et intradermo-réactions à lecture immédiate, dont la sensibilité est modeste (60-70 %). Ce bilan est préférablement effectué dans un centre expert, car il est contraignant, chronophage, difficile à réaliser et à interpréter chez l’enfant.
Si le test est positif, l’allergie est confirmée. S’il est négatif, un test de provocation est effectué en hôpital de jour pour confirmer (rarement) ou éliminer (le plus souvent) une hypersensibilité immédiate.
Les réactions croisées entre pénicillines (amoxicilline, oracilline) sont relativement fréquentes car leurs chaînes latérales se ressemblent. Les réactions croisées entre pénicillines et céphalosporines (en dehors des C1G : oracefal, céfaclor, qui ne sont plus utilisés en France), sont rares (1-2 %). En cas de suspicion d’allergie/hypersensibilité aux pénicillines, les céphalosporines (C2G, C3G) peuvent être utilisées comme alternative dans l’attente du bilan. Il existe également des réactions croisées entre céphalosporines (C3G en particulier), en raison de la proximité de leur chaîne latérale.
Réaction retardée non sévère : analyse clinique
Face à une réaction retardée, il est indispensable de rechercher des signes de gravité ou d’alerte. Il s’agit en particulier de l’érythrodermie, la présence de bulles/vésicules, une érosion des muqueuses, une éruption douloureuse ou prolongée de plus de sept à dix jours. Leur présence impose une prise en charge spécialisée en urgence. Ces situations sont très rares.
Les réactions retardées les plus fréquentes sont les exanthèmes maculopapuleux ou les urticaires simples. Ces réactions retardées non sévères s’explorent par un test de provocation direct, sans tests cutanés préalables. Ses modalités sont encore débattues. La plupart des équipes le débutent en hôpital de jour, d’autres en consultation. Le test de provocation est positif dans environ 10 % des cas. Les réactions présentées sont alors le plus souvent bénignes et de nature comparable à la réaction initiale.
« Il est indispensable d’explorer toute réaction allergique, en particulier en raison des conséquences sur l’acquisition de résistances bactériennes. Tout retard d’exploration peut être préjudiciable à l’enfant », conclut le Dr Lezmi.
Entretien avec le Dr Guillaume Lezmi, Paris
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