« L’asthme est devenu en France et dans tous les pays industrialisés la première maladie chronique de l’enfant », a souligné le Pr Michel Aubier, chef du service de pneumologie à l’hôpital Bichat (Paris), lors d’une conférence parlementaire réunie ce jour au Sénat sur le thème « Allergies et climat, il est urgent d’agir ». « Son origine est dans près de 95 % des cas d’origine allergique », a-t-il rappelé. Pour le pays, le coût de la prise en charge atteint le milliard d’euros chaque année.
Les données scientifiques s’accumulent pour que plus rien ne s’oppose désormais à ce que le phénomène planétaire d’augmentation des allergies soit qualifié d’épidémique. L’élévation de la fréquence, de l’intensité et du nombre de personnes concernées par les allergies ont mené l’OMS à prévoir qu’une personne sur 2 dans le monde sera allergique en 2050. Aujourd’hui en France, 25 à 30 % des personnes souffrent d’allergie, soit deux fois plus qu’il y a 20 ans et la prévalence des allergies aux pollens semble avoir triplé en l’espace de 25 ans.
Pollution de l’air, produits phytosanitaires et dérèglements climatiques
À six mois de la 21e Conférence Climat (COP-21) qui se tiendra à Paris en décembre prochain, la fondation Stallergenes vient de dévoiler les résultats d’une enquête réalisée en février dernier par OpinionWay sur un échantillon représentatif de la population française de 1024 individus âgés de 18 ans et plus. Parmi eux, 37 % déclarent avoir souffert d’au moins une allergie au cours des 12 derniers mois (46 % chez les 25-34 ans) et plus de 3 sur 5 (63 %) estiment que les allergies sont en augmentation depuis 10 ans.
Interrogées sur les causes supposées de ces allergies, 74 % des personnes incriminent la pollution de l’air et notamment les particules fines. L’utilisation de produits chimiques dans l’agriculture est également pointée du doigt puisque 58 % pensent que ces derniers sont responsables de l’augmentation des allergènes. S’ils ne sont finalement que 16 % à citer les dérèglements climatiques, c’est pour Christine Rolland, directrice de l’association « Asthme et Allergies », lié au fait que « relativement peu de personnes font le lien entre changement climatique, pollution et augmentation des allergies ».
Plus de pollens, toujours plus allergisants, pendant plus longtemps
Exposés dans le 5e rapport du Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat (GIEC), l’augmentation du taux de CO2 atmosphérique et de celle des températures qui entraînent une modification des précipitations selon les régions, sont deux phénomènes majeurs des décennies en cours et à venir. Pour nombre de scientifiques, la conjugaison de ces facteurs environnementaux donne une explication plausible à l’augmentation de fréquence des allergies respiratoires.
« Le réchauffement climatique est à l’origine d’une augmentation de la longueur de la saison pollinique et l’augmentation de la température fait que les pollens se constituent en nombre plus important », explique le Pr Aubier. La distribution et la dispersion des pollens sont également modifiées par des tempêtes plus fréquentes, l’évolution des périodes de précipitation et les migrations d’espèces végétales. Le potentiel allergisant des grains de pollen est de surcroît modifié par la pollution atmosphérique au dioxyde d’azote et les nanoparticules essentiellement émises par les transports. « Ces polluants augmentent l’agressivité des pollens qui possèdent une antigénicité plus importante », précise le Pr Aubier.
Les Français veulent des mesures
Pour la grande majorité des Français interrogés, des mesures gouvernementales fortes associées à des mesures médicales ciblées sont souhaitables pour tenter d’enrayer l’augmentation des allergies. Ils sont 70 % à réclamer la diminution de la pollution industrielle et 54 % à demander des plans d’action pollution et climat pour l’amélioration de la qualité de l’air. Enfin, un tiers des Français estime que l’amélioration des traitements antiallergéniques passe par plus de personnalisation. Un souhait qui aura du mal à se réaliser si, comme le rappelle Christine Rolland, « la pénurie d’allergologues qui s’annonce » se confirme dans les années à venir.
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