COMMENT améliorer le pronostic du syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), dont la mortalité reste toujours effroyable, oscillant entre 40 et 60 % selon les études ? Une piste se précise avec l’essai randomisé en double-aveugle mené par des réanimateurs français sur le bénéfice des bloqueurs neuromusculaires dans les SDRA sévères. Selon l’étude française, les curares administrés à la phase précoce du SDRA amélioreraient de façon significative la mortalité à 90 jours, avec une diminution de près d’un tiers. De plus, le temps de ventilation mécanique serait écourté, et ce sans augmenter le risque de myopathie de réanimation. C’est une donnée nouvelle et importante en réanimation, puisqu’il était recommandé jusqu’alors de réserver l’utilisation des curares dans les SDRA aux sédations difficiles. Cet essai mené dans 20 centres de réanimation français sous la direction du Dr Laurent Papazian (Marseille) est ainsi le premier à prouver les bénéfices sur la mortalité à 90 jours. De plus, cette pratique ne semble pas présenter davantage de myopathie de réanimation, très redoutée avec l’utilisation des curares, probablement en raison de la durée de traitement très courte.
Deux jours de traitement
Ce travail français sur le cisatracurium est d’une très bonne qualité méthodologique. Essai randomisé, double aveugle versus placebo, protocole d’étude bien défini, suivi complet et analyse en intention de traiter sont autant de critères, qui ont permis de réduire les biais au minimum. De mars 2006 à mars 2008, 340 patients ayant un SDRA depuis moins de 48 heures ont été inclus et randomisés pour recevoir pendant 2 jours, soit du cisatracurium (178 patients), soit un placebo (162 patients). La mortalité dans le groupe cisatracurium était diminuée de près d’un tiers par rapport au placebo, avec un risque relatif après ajustement de 0,68 (IC 95 %, 0,48 à 0,98 ; p = 0,04). La mortalité brute était ainsi de 31,6 % dans le groupe curare et de 40,7 % dans le placebo. À noter que le SDRA sévère était défini par un rapport PaO2/FIO2<150, avec une PEEP≥5 cm d’eau et un volume courant de 6-8 ml/kg.
Les bénéfices des curares restent à confirmer aux stades plus avancés du SDRA, puisque l’étude s’est limitée à l’administration en phase précoce. Il reste à démontrer que les bloqueurs neuromusculaires sont bénéfiques également après 48 heures d’installation. D’autre part, il est possible également qu’une durée de traitement plus courte de 24 heures se révèle tout aussi profitable que les 48 heures de l’essai. D’après les auteurs, une courte période de paralysie en phase précoce du SDRA faciliterait la synchronisation avec le ventilateur. Elle limiterait également le collapsus et la surdistension alvéolaires, en permettant d’ajuster au mieux les volumes et les pressions de ventilation. Les bloqueurs neuromusculaires pourraient également contribuer à diminuer l’inflammation pulmonaire et systémique.
N Engl J Med 2010; 363:1107-16.
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