« NOTRE DISCUSSION ne date pas d’hier, commente pour « le Quotidien » le Dr Carmen Kreft-Jais, chef d’unité de pharmacovigilance à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Depuis de nombreuses années, les bénéfices des fluidifiants bronchiques chez les nourrissons sont remis en cause et leur prescription controversée. Il nous fallait de sérieuses données de pharmocovigilance avant de prendre la décision finale de contre-indiquer leur utilisation dans cette catégorie d’âge ». Ainsi à la date du 29 avril, les mucolytiques, les mucofluidifiants et l’Hélicidine ne seront plus délivrés en pharmacie pour les moins de 2 ans. Les spécialités spécifiquement destinées aux nourrissons sont retirées du marché.
Ces médicaments, qui ont pour but de fluidifier les sécrétions bronchiques, peuvent, en effet, aggraver un surencombrement respiratoire. « Du fait d’une certaine immaturité de leur arbre respiratoire, les enfants sont alors "noyés" dans leurs sécrétions, explique le Dr Kreft-Jais. Même si ce sont de "vieux" médicaments très utilisés et perçus comme anodins, il n’en reste pas moins que les effets secondaires peuvent être sérieux chez les plus petits ». D’après cette enquête, près de 70 cas de complications respiratoires liées à l’aggravation d’un encombrement bronchique ont en effet été rapportés chez les nourrissons, plus de la moitié étant survenus chez les moins de 1 an. La majorité de ces cas ont nécessité une hospitalisation.
De la kiné avant tout.
« Dans notre service de pneumo-pédiatrie, nous n’utilisons plus les mucolytiques chez les nourrissons depuis longtemps, explique pour le « Quotidien » le Dr Ralph Épaud, pédiatre à l’hôpital Trousseau (Paris). La pratique adoptée à l’hôpital est de respecter la toux comme moyen de défense de l’enfant. Le problème des fluidifiants bronchiques, c’est que davantage que fluifidier les sécrétions, ils en augmentent le volume. En l’absence de kiné pour les aider à expectorer, les nourrissons se noient alors dans leurs sécrétions. Ce d’autant que l’efficacité de ces médicaments n’a jamais été vraiment démontrée, hormis dans certaines pathologies très précises en pneumologie et en ORL ». Plus question ainsi d’essayer de « s’en sortir » en ville chez un bébé à l’aide d’un simple sirop et sans la kinésithérapie. « La situation est différente à l’hôpital et en ville, convient très volontiers le pédiatre. Les médecins de ville, généralistes et pédiatres, voient les bébés gênés à la phase aiguë. Ils se trouvent alors très démunis face à la toux des petits enfants. Pas évident de se retrouver face à un enfant encombré, ce d’autant que la prescription des antireflux vient d’être également limitée dans cette tranche d’âge ».
Lavages de nez, qualité de l’air.
Alors que faire ? « Il n’existe pas beaucoup de traitements disponibles chez l’enfant, poursuit le Dr Épaud. C’est dire l’importance de promouvoir les essais cliniques en pédiatrie !! La demande est forte et les besoins réels pour des médicaments efficaces dans cette indication. En attendant que cette requête soit entendue par l’industrie pharmaceutique, la kinésithérapie respiratoire reste la mesure pour soulager le nourrisson gêné. Il existe également d’autres petits moyens simples et très utiles pour améliorer le confort de l’enfant. La désobstruction rhino-pharyngée (DRP) vient en tête». Le lavage de nez au sérum physiologique pluriquotidien permet ainsi d’évacuer les sécrétions hautes et d’éviter l’écoulement postérieur vers les bronches. L’éviction du tabac doit être ferme, la chambre où dort l’enfant bien aérée et humidifiée. L’utilisation des antitussifs antihistaminiques chez les moins de 2 ans va également être réexaminée par l’Afssaps d’ici septembre 2010. Une mise au point sur la prise en charge de la toux chez l’enfant est attendue à la même date.
Documents disponibles sur le site www.afsaaps.sante.fr
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