« L’hypothèse d’une réaction sarcoïdose-like induite par un médicament (réaction systémique avec des lésions similaires à celles observées dans la sarcoïdose, à type d’infiltrats et d’adénopathies médiastinales, d’uvéites, d’atteintes cutanées et neurologiques) se pose dans trois grands contextes cliniques. Face à un patient présentant un tableau de sarcoïdose thoracique ou extra-thoracique, face à la découverte d’adénopathies médiastinales lors d’une imagerie réalisée dans le cadre d’un bilan de cancer – ou autre – et enfin face à un granulome touchant un autre organe », rappelle le Pr Philippe Bonniaud (Dijon).
Il faut avant tout éliminer une autre cause, notamment un cancer ou une maladie infectieuse (lire ci-contre), et ce d’autant plus que certains médicaments à l’origine de ce type de réaction peuvent aussi induire des infections.
Une quarantaine de molécules
Quatre grands groupes de médicaments peuvent être à l’origine de sarcoïdose-like. Une quarantaine est associée au développement de granulome.
• Depuis le premier cas de sarcoïdose-like induite par un anti-TNF alpha, rapporté en 2002, une centaine d’autres ont été publiés. Paradoxalement, les anti-TNF α peuvent être indiqué dans le traitement de certaines sarcoïdoses graves. Il s’agit d’un effet indésirable rare – 1/3 000 patients – observé avec tous les anti-TNF dans toutes leurs indications mais plus fréquemment avec l’étanercept, qui cible le TNF α soluble. L’atteinte respiratoire concerne les trois quarts des patients. Le mécanisme est mal connu, probablement en lien avec l’orientation TH1 du système immunitaire. Les lésions s’améliorent ou régressent à l’arrêt du traitement chez une majorité de patients, avec ou sans corticoïdes. En cas de prise d’un autre anti-TNF, une récidive ne survient que dans 20 % des cas.
• Pour les interférons, aujourd’hui quasiment plus utilisés, le mécanisme est clair, lié à l’administration d’une dose élevée de cytokines ce qui crée une sarcoïdose expérimentale. Plus de 120 cas ont été décrits, avec des atteintes pulmonaires chez 60 % des patients et cutanées une fois sur deux. L’analyse de l’imputabilité est souvent difficile car ces traitements sont souvent prescrits dans des maladies volontiers associées à une sarcoïdose.
• Les antirétroviraux prescrits chez les patients infectés par le VIH peuvent entraîner un syndrome de reconstitution immunitaire, où l’augmentation du nombre et de l’activité des lymphocytes CD4 peut induire des granulomes et induire ou aggraver une sarcoïdose pré-existante. « Sauf cas particulier, le traitement ne doit pas être interrompu », souligne le Pr Bonniaud avant de préciser que le recours aux corticostéroïdes n’est nécessaire que dans 40 % des cas.
• Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (anti-CTLA 4, anti-PD-1 PD-1, anti-PDL-1), dont les indications en oncologie ne cessent de s’élargir, stimulent le système immunitaire et ont de nombreux effets secondaires, dont des atteintes pulmonaires à type de sarcoïdose. La découverte d’adénopathies médiastinales ou d’autres anomalies du parenchyme pulmonaire pose le problème diagnostique de la reprise évolutive de la maladie cancéreuse. Les symptômes sont souvent modérés, permettant généralement de poursuivre le traitement. « Il faut rester vigilant car quelques cas de tuberculose ont été rapportés sous immunothérapie », indique le Pr Bonniaud.
• À côté de ces sarcoïdoses like, d’autres atteintes granulomateuses induites par les médicaments peuvent être observées. C’est le cas de certaines réactions systémiques induites par la BCG-thérapie utilisée en intravésical pour le traitement des tumeurs superficielles de vessie. Il faut également citer les granulomatoses systémiques survenant dans le cadre de vascularites iatrogènes.
• Enfin, on observe des granulomes sur fausse-route mais aussi sur « mauvaise-route » chez des toxicomanes qui inhalent ou s’injectent des médicaments pillés afin d’en faire une poudre et dont les excipients, notamment le talc, peuvent être à l’origine de granulomes.
exergue : Des traitements prescrits dans des maladies associées à une sarcoïdose, voire paradoxalement indiqués dans la sarcoïdose
Entretien avec le Pr Philippe Bonniaud, Centre constitutif de référence des maladies pulmonaires rares de l'adulte (CHU Dijon).
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