Le diagnostic d’une infection pulmonaire aiguë peut s’avérer difficile. Des signes d’infection systémique (fièvre, syndrome de réponse inflammatoire systémique) s’associent classiquement à des signes fonctionnels respiratoires (toux, expectoration, dyspnée, douleur thoracique) et des signes physiques (syndrome de condensation, crépitants…). Mais parfois, la présentation clinique peut être trompeuse notamment chez le sujet âgé chez qui une confusion ou une décompensation d’une comorbidité peut être au premier plan (1,2). La radiographie thoracique est l’examen de première intention retrouvant des opacités alvéolaires floues, uniques ou multiples, parfois systématisée à un lobe, réalisant la pneumopathie franche lobaire aiguë, ou des opacités interstitielles localisées ou diffuses (1).
Une orientation conditionnée par les données cliniques...
L’orientation du patient est alors fondamentale car elle influence directement la mortalité (3). Des données cliniques et paracliniques associées à la mortalité ont été identifiées et doivent conditionner l’orientation initiale du patient (1) :
- données cliniques : le terrain (âge avancé, grabatisation, immunodépression, splénectomie, patient vivant en institution), la fréquence respiratoire > 30/min, le sepsis sévère ou le choc septique, la confusion, les troubles de la déglutition et une température < 35°C ou > 40°C
- données radiologiques : atteinte multilobaire, extension rapide, cavité, pleurésie
- données biologiques : acidose métabolique, leucopénie < 4 000/mm3 ou hyperleucocytose > 30 000/mm3, insuffisance rénale…
... et guidée par les scores de gravité
Des scores de gravité, visant à guider le clinicien dans l’orientation du patient, ont été validés. Ces scores sont nombreux et élaborés dans des buts différents (prise en charge ambulatoire versus hospitalière ; prise en charge hospitalière en secteur conventionnel versus soins intensifs). Tous ne prennent pas en compte les mêmes variables et notamment les comorbidités ne sont que rarement considérées alors que l’âge a, dans la plupart des scores, un poids parfois jugé trop important.
Le score PSI de Fine répartit les patients en 5 classes de probabilité croissante de mortalité (0 % pour la classe I, jusqu’à 30 % pour la classe V) [figure 1] (4). Ce score initialement prédictif de mortalité a été secondairement validé pour identifier les patients pouvant relever d’une prise en charge ambulatoire (1,4). Ainsi, les patients en classe I ou II voire III de Fine pourront être traités en ambulatoire en l’absence d’autres critères pouvant compromettre le succès de ce traitement (1). Le score CRB-65, simplification du CURB-65, est facilement utilisable en pratique et peut aider au choix d’une prise en charge ambulatoire versus hospitalière (figure 2) [5]. Les scores de la British Thoracic Society (CURB-65) et de l’American Thoracic Society (score ATS/IDSA) ont pour but essentiel d’identifier les PAC graves (1,5–7).
Cependant, aucun score n’a été considéré par les recommandations françaises comme assez robuste pour guider avec suffisamment de fiabilité l’orientation clinique initiale (1). En effet, certaines conditions préexistantes non intégrées dans les scores peuvent compromettre le succès du traitement ambulatoire comme une décompensation d’une comorbidité préexistante nécessitant l’hospitalisation, des problèmes d’ordre sociaux ou psychiatriques, l’incapacité à l’absorption d’un traitement per os… Enfin, le jugement clinique et/ou l’impression de particulière gravité du médecin doit primer sur les scores (1).
Pour conclure, l’orientation initiale d’un patient atteint d’infection pulmonaire aiguë est fondamentale car conditionne son pronostic. Le clinicien pourra s’aider de scores, tels que le Fine (ou PSI) ou le CRB-65, mais devra avant tout se fier à son jugement clinique.
Pneumologue, CHU Bordeaux
(1) SPILF, SPLF, AFSSAPS. 15 e conférence de consensus en thérapeutique anti-infectieuse prise en charge des infections des voies respiratoires basses de l’adulte immunocompétent 2006
(2) Metlay JP, Schulz R, Li YH, et al. Influence of age on symptoms at presentation in patients with community-acquired pneumonia. Arch Intern Med. 1997 Jul 14;157(13):1453–9
(3) Renaud B, Santin A, Coma E, et al. Association between timing of intensive care unit admission and outcomes for emergency department patients with community-acquired pneumonia. Crit Care Med. 2009 Nov;37(11):2867–74
(4) Fine MJ, Auble TE, Yealy DM, et al. A prediction rule to identify low-risk patients with community-acquired pneumonia. N Engl J Med 1997 Jan 23;336(4):243–50
(5) Lim WS, van der Eerden MM, Laing R, et al. Defining community acquired pneumonia severity on presentation to hospital: an international derivation and validation study. Thorax. 2003 May;58(5):377–82
(6) Mandell LA, Wunderink RG, Anzueto A, et al. Infectious Diseases Society of America/American Thoracic Society consensus guidelines on the management of community-acquired pneumonia in adults. Clin Infect Dis Off Publ Infect Dis Soc Am. 2007 Mar 1;44 Suppl 2:S27-72
(7) Salih W, Schembri S, Chalmers JD. Simplification of the IDSA/ATS criteria for severe CAP using meta-analysis and observational data. Eur Respir J. 2014 Mar;43(3):842–51
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024