Isolement et contention : l’Unafam met en lumière les dérives des procédures à partir des travaux de commissions mixtes, médecins et usagers

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Publié le 01/04/2021
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Crédit photo : S.Toubon

Alors que ses nouvelles modalités ne cessent de faire polémique, c’est une nouvelle charge que livre l’Unafam* contre le dispositif d’isolement et de contention en psychiatrie, dans un rapport établi à partir du travail des Commissions départementales des soins psychiatriques (CDSP), en même temps qu’une défense de ces structures méconnues.

L’association a épluché quelque 135 rapports annuels rédigés, pour les années 2017, 2018 et 2019, par 54 de ces commissions (sur 102 au total, mais qui ne sont pas toutes effectives). Celles-ci sont chargées d’examiner, sur dossier et à travers des visites, la situation des personnes admises en soins psychiatriques sans consentement au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes. Elles sont composées de deux psychiatres, deux représentants d’association et d’un généraliste, et c’est l’Agence régionale de santé (ARS) qui doit en assurer le secrétariat.

Des dérives dans les procédures

Sans surprise, par rapport aux travaux du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), l’Unafam pointe la vétusté (seau en guise de toilettes, pièces aveugles, etc.) et l’insécurité (installations électriques accessibles, absence de sonnette d’appel) des locaux où sont mises en œuvre ces pratiques d’isolement et de contention.

Mais surtout, elle dénonce des dérives dans l’utilisation des procédures pour établir une admission en soins sans consentement (également épinglées par le CGLPL et même des parlementaires dès 2017). Ainsi, les modalités prévues pour les admissions pour péril imminent ou soins à la demande de tiers en urgence, qui sont plus légères en autorisant une dérogation au principe des deux certificats nécessaires, sont utilisées en moyenne dans 68 % des cas, avec des pointes à 98 %.

L’Unafam dénonce une « tendance générale à établir des certificats médicaux vides de sens » tout au long du parcours : c’est-à-dire des certificats qui ne décrivent pas les motifs de recours aux procédures exceptionnelles (selon quatre commissions), des certificats médicaux identiques produits par copier-coller chaque mois (signalés par au moins huit commissions). Deux commissions notent l’absence de réunion du « collège médical » devant obligatoirement statuer sur la prolongation des soins sans consentement à intervalle de six mois.

Plus largement, les représentants des usagers et des familles regrettent une certaine inertie dans les efforts pour réduire ces pratiques, objectif fixé par la loi de santé de 2016. Une dizaine de CDSP observe ainsi que le registre et le rapport annuel institués pour assurer leur contrôle sont mal tenus ou tardent à être fournis aux organismes de contrôle, et qu’aucune réflexion en vue de réduire ces usages n’est engagée.

Défense des CDSP

Le rapport de l’Unafam fait aussi office de plaidoyer pour soutenir et renforcer ces commissions, incarnation de la démocratie sanitaire, qui dans les faits peinent à fonctionner. C’est notamment le cas pour un quart d’entre elles. L’Unafam met en cause les ARS qui ne les réunissent pas : « c’est comme si on voulait casser le thermomètre pour ignorer la maladie ».

Quant aux trois quarts des autres commissions qui se réunissent régulièrement (357 réunions et visites, 8 000 dossiers examinés, plus de 500 plaintes traitées et plus de 500 patients entendus en 2018), seulement une quarantaine vont jusqu’à signaler aux autorités des dysfonctionnements sources de violations des droits fondamentaux de personnes particulièrement vulnérables. Mais « aucune conséquence véritable ne résulte de leurs dénonciations, parfois graves ».

*Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques


Source : lequotidiendumedecin.fr