Pour la clozapine, médecins et patients demandent un assouplissement des règles de prescription à l’ANSM

Par
Publié le 05/07/2024
Article réservé aux abonnés

Un collectif de médecins et de patients porté par la Task Force clozapine demande à l’ANSM d’adapter les conditions de prescription et de surveillance de l’antipsychotique face à l’évolution décroissante de la démographie médicale des spécialistes.

Crédit photo : GARO/PHANIE

« Il nous paraît intenable de maintenir les règles de prescription actuelles de la clozapine ». Conseils nationaux professionnels (CNP), sociétés savantes de gériatrie, neurologie, pharmacie, pharmacologie et thérapeutique, médecine générale et psychiatrie, associations de patients, une quinzaine d’instances* se sont regroupées autour de la Task Force clozapine pour appeler à la révision des modalités de prescription et de surveillance de l’antipsychotique, alors que la démographie des médecins spécialistes est en décroissance.

La clozapine est un traitement en deuxième intention de la schizophrénie résistante et des symptômes psychotiques de la maladie de Parkinson.

Le collectif demande que : l’initiation et le renouvellement annuel du traitement soient possibles par tout médecin gériatre, neurologue et psychiatre, quel que soit son statut d’exercice (y compris non hospitalier) ; et que le renouvellement intercurrent lié au rythme de surveillance hématologique puisse être effectué par tout médecin, notamment généraliste.

Sous-prescription

« Les limitations de prescription sont à l’origine d’une sous-prescription de la clozapine mais également d’un recours non nécessaire à des consultations fréquentes avec des médecins spécialistes pour de simples renouvellements d’ordonnance, consultations qui pourraient bénéficier fort plus utilement à d’autres patients », explique le communiqué.

Actuellement, la prescription est soumise à une initiation et un renouvellement annuel par un médecin hospitalier psychiatre, gériatre ou neurologue ; le renouvellement intercurrent l’est par ces mêmes spécialistes sans distinction de statut d’exercice.

Pourtant, fait valoir le collectif, « après la phase d’initiation et quand le traitement est stabilisé, le renouvellement intercurrent de la prescription de clozapine nécessite essentiellement la lecture d’une numération formule sanguine (NFS), examen que tout médecin est en capacité d’interpréter, notamment le médecin spécialiste en médecine générale ».

Ce d’autant que l’évolution des délégations de tâches médicales entraîne « des situations paradoxales » : « un infirmier en pratique avancée en psychiatrie et santé mentale peut renouveler une ordonnance de clozapine tout comme des infirmiers diplômés d’État dans le cadre de protocole de coopération », est-il rappelé.

Des études qui permettent d’espacer la surveillance

Pour ses propositions, la Task Force se fonde sur des études récentes, notamment une méta-analyse montrant que « 38 % des cas d’agranulocytose surviennent le premier mois après l’initiation, 56 % dans les deux mois, 84 % dans les dix-huit premières semaines et 89 % dans la première année », lit-on. Une autre étude, fondée sur des données australiennes et néo-zélandaises, conclut à un risque négligeable de neutropénie sévère au bout de deux ans, qui devient alors comparable à celui d’autres psychotropes voire inférieur à certains, comme la carbamazépine.

À l’étranger, de nombreux pays ont des modalités de prescription plus souples, lit-on dans le communiqué. Les NFS ne sont pas obligatoires dans certains pays européens (Albanie, Bulgarie, Espagne, Finlande, Islande, Pologne, Portugal). Aux Pays Bas, la surveillance hématologique peut être stoppée ou espacée à trois mois au bout de six mois de traitement. En Islande, après dix-huit semaines de traitement, les NFS non obligatoires sont réalisées environ tous les quatre mois.

Propositions de surveillance hématologique

Première année de traitement : – maintien de la surveillance hématologique hebdomadaire les dix-huit premières semaines ; – maintien de la surveillance mensuelle.

Deuxième année de traitement : – surveillance trimestrielle chez les patients n’ayant pas eu de neutropénie sévère.

Après la deuxième année : surveillance annuelle chez les patients n’ayant pas eu de neutropénie sévère.

Comme d’autres pays l’ont déjà fait, le collectif demande également d’adapter les normes pour la neutropénie bénigne ethnique avec arrêt de la clozapine si les neutrophiles < 1 000/mm3 au lieu de 1 500/mm3.

*Conseil national professionnel de gériatrie, Collège de médecine générale, Fédération française de neurologie, Association des aidants et malades à Corps de Lewy (A2MCL), Association française de psychiatrie biologique et neuropsychopharmacologie (AFPBN), Association des jeunes psychiatres et jeunes addictologues (AJPJA), Collectif Schizophrénie, France Parkinson, Fédération française de soins psychiatriques intensifs (2FSPI), Réseau national des Centres de ressources et d’expertise en psychopharmacologie (Crepp), Réseau PIC psychiatrie information communication, Société francophone pharmaciens et psychiatres (SF2P), Société francophone de psychogériatrie et psychiatrie de la personne
âgée (SF3PA), Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG), Société francophone des mouvements anormaux (Sofma), Société française de pharmacologie et thérapeutique (SFPT)


Source : lequotidiendumedecin.fr