Par le Dr Jérémie Sellam*
LA COMPOSANTE inflammatoire de l’arthrose, bien que moins importante comparativement à celle de la polyarthrite rhumatoïde, est directement impliquée dans la dégradation du cartilage. On peut donc envisager de bloquer diverses cytokines pro-inflammatoires telles que le TNF alpha ou l’interleukine 6 (IL-6).
Cibler le TNF dans l’arthrose digitale.
En 2011, a été publié un essai randomisé contre placebo qui a évalué, chez 60 patients, l’efficacité et la tolérance d’un anti-TNF, l’adalimumab (40 mg/2 semaines) pendant 1 an dans l’arthrose digitale érosive (1). À un an, la progression structurale n’était globalement pas différente entre les deux groupes de traitement. Cependant, dans le sous-groupe de patients ayant des synovites palpables à l’inclusion, la progression structurale était significativement moins importante que dans le groupe placebo (figure). En revanche, il n’y avait pas de supériorité clinique de l’adalimumab comparativement au placebo sur l’ensemble de la population. Nous attendons maintenant les résultats de l’étude française DORA (NCT00597623) qui a également évalué l’adalimumab dans l’arthrose afin de savoir si les anti-TNF ont un avenir dans cette pathologie.
Cibler le signal douloureux.
Le nerve growth factor (NGF) est un médiateur impliqué dans la transmission de la douleur nociceptive. Un anticorps monoclonal, le tanezumab, a été évalué dans l’arthrose réfractaire.
Un effet clinique antalgique très important avait déjà été rapporté en 2009 dans la gonarthrose versus placebo (2). L’effet du tanezumab semble même supérieur à la morphine (oxycodone) ou au diclofenac dans l’arthrose (3, 4). Un essai positif a également été publié dans la lombalgie chronique commune sans radiculalgie avec une supériorité nette du tanezumab comparativement au placebo et au naproxène (5). Ces données sont très enthousiasmantes, mais le développement de la molécule est actuellement en suspens du fait d’arthropathies destructrices rapides qui ont conduit à des poses de prothèses plus fréquentes chez les patients recevant la molécule active.
Déception avec le blocage du TNF et expectative avec l’anti-NGF : nous sommes dans une situation d’attente vis-à-vis de l’utilisation des biothérapies dans l’arthrose. Faut-il cibler l’interleukine 6 ? L’os sous-chondral ? Le cartilage ? En 2012, nos traitements « classiques » restent de mise, mais ces travaux illustrent bien l’intérêt de progresser dans la compréhension de la physiopathologie de l’arthrose pour identifier de nouvelles cibles thérapeutiques.
*Service de rhumatologie, AP-HP, hôpital Saint-Antoine, université Pierre-et-Marie-Curie Paris VI, Paris.
(1) Verbruggen G, Wittoek R, Cruyssen BV, et coll. Tumour necrosis factor blockade for the treatment of erosive osteoarthritis of the interphalangeal finger joints: a double blind, randomised trial on structure modification. Ann Rheum Dis. 2011 Nov 29. [Epub ahead of print].
(2) Lane NE, Schnitzer TJ, Birbara CA, et coll.Tanezumab for the treatment of pain from osteoarthritis of the knee. N Engl J Med. 2010;363:1521-31.
(3) Congrès de l’ACR 2011 - D’après Fidelholtz (1095)
(4) Congrès de l’ACR 2011 - D’après Feist (1096)
(5) Katz N, Borenstein DG, Birbara C, et coll. Efficacy and safety of tanezumab in the treatment of chronic low back pain. Pain. 2011;152:2248-58.
Légende figure (envoyée par mail le 27/03)
Figure. Pourcentage d’articulations présentant une progression érosive sous adalimumab ou placebo en fonction de la présence de synovite palpable à l’inclusion
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