Les rhumatismes inflammatoires sont des maladies fréquentes et multifactorielles qui résultent d’interactions de facteurs environnementaux et de facteurs de susceptibilité génétique. « Dans la polyarthrite rhumatoïde, par exemple, l’exposition au tabac constitue un des facteurs environnementaux les plus connus. Bien d’autres, difficiles à appréhender, restent à identifier. Quant aux facteurs de susceptibilité génétique, le poids de la plupart des variants pris isolément est relativement modeste, avec un odds ratio généralement compris entre 1.1 et 2.0 », souligne le Pr Philippe Dieudé, rhumatologue à l’hôpital Bichat (Paris).
Ces faibles odds ratios expliquent le manque de pertinence de ces marqueurs génétiques comme outil diagnostique. Seuls de rares locus portés par les allèles HLA font exception, comme HLA B27 (odds ratio pour la spondyloarthrite supérieur à 130). « Ces 15 à 20 dernières années de recherches en génétique n’ont pas permis d’identifier de nouveaux marqueurs diagnostiques. Il fallait s’y attendre, avec ces maladies complexes où un ou plusieurs facteurs environnementaux s’allient à un ou plusieurs facteurs génétiques », précise le spécialiste.
Classification, pronostic, médecine personnalisée
La génétique pourrait permettre d’améliorer la classification des rhumatismes inflammatoires en démembrant des maladies aujourd’hui rassemblées sous un même nom. « Dans la polyarthrite rhumatoïde, par exemple, les anticorps anti-CCP constituent un marqueur sérologique très sensible et très spécifique. Or, les patients anti-CCP négatifs aujourd’hui classés comme souffrant de polyarthrite rhumatoïde diffèrent génétiquement des patients anti-CCP positifs, explique le Pr Dieudé. Ces deux formes de la maladie pourraient être issues de voies physiopathogéniques distinctes, et donc constituer en fait deux pathologies distinctes. »
Aucun outil de pratique courante ne permet aujourd’hui d’évaluer le pronostic des rhumatismes inflammatoires chroniques. Cependant, des marqueurs commencent à apparaître comme étant hautement prédictifs soit de mauvais pronostic, soit de complication de la maladie. « Dans certaines manifestations extra-articulaires (notamment pulmonaires ou cardiovasculaires), des marqueurs associés à des variants génétiques émergent. Mais ici encore, aucun variant n’a de poids suffisant pour être utilisé en routine », note le rhumatologue.
La génétique peut-elle s’intégrer dans la médecine personnalisée de ces maladies complexes pour prédire la réponse au traitement ou la survenue d’effets secondaires à un médicament ? « Les résultats sont plutôt décevants. Les quelques variants d’intérêt connus, par exemple pour des médicaments de la goutte, restent à la marge », regrette le Pr Dieudé. Là non plus, des années de recherches n’ont pas permis de développer d’outils prédictifs de réponse ou de survenue d’effets secondaires, que ce soit pour les traitements classiques ou pour les biothérapies.
D’après un entretien avec le Pr Philippe Dieudé, rhumatologue à l’hôpital Bichat (Paris)
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