On a considérablement progressé dans la prise en charge de la PR, avec depuis 20 ans le concept du « treat to target » qui amène à intensifier les traitements tant que la cible thérapeutique n’est pas obtenue. De plus, depuis une dizaine d’années, de nouveaux critères permettent de traiter vite et fort avant que la maladie ne soit installée. Ces progrès ont été rendus possibles par la multiplication des familles de médicaments. Après les anti-TNF, anti-IL6 récepteur, anti-CD80/86, anti-CD20, les inhibiteurs de JAK se placent désormais sur la même ligne de traitement. On dispose maintenant du tofacitinib, du baricitinib et de deux molécules plus sélectives vis-à-vis de JAK1, l’upadacitinib et le filgotinib. Ce dernier a obtenu l’autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne et devrait bientôt être disponible en France.
Concernant la tolérance des anti-JAK, un surrisque de thrombose veineuse et d’embolie pulmonaire n’a été mis en évidence que dans une seule étude avec le tofacitinib, donné à de fortes doses qui ne sont pas utilisées dans la PR. Il n’a pas été observé avec les autres anti-JAK. De même, le risque de zona retrouvé essentiellement dans les populations asiatiques serait faible avec le filgotinib.
Quelle molécule choisir ?
La question devant ce large arsenal thérapeutique est celui du choix de la molécule. En l’absence d’études de comparaison directe et de biomarqueurs individuels prédictifs de la réponse thérapeutique, la décision peut se fonder sur la voie d’administration et le recul dont on dispose pour chaque molécule (plus de 20 ans pour les anti-TNF et cinq ans avec les anti-JAK). À savoir également que si l’anti-TNF est pratiquement toujours associé au méthotrexate, on pourrait s’en dispenser avec les inhibiteurs de JAK, certaines études montrant que le bénéfice supplémentaire de l’association est modéré.
« Le défi dans un avenir proche sera de déterminer si, et dans quel cas, il est préférable de débuter le traitement par un anti-TNF ou un inhibiteur de JAK. Et en cas d’échec thérapeutique de celui-ci, quelle est la molécule la plus performante à prescrire ? », souligne le Pr Hubert Marotte (rhumatologue au CHU de Saint-Étienne). On sait déjà depuis l’étude ROC qu’en cas d’échec d’un anti-TNF dans la PR, il est préférable de changer de famille thérapeutique. Les registres mis en place autour des anti-TNF, de l’abatacept, du tofacitinib et prochainement des anti-JAK apporteront des éléments de réponse. Mais des études sont nécessaires afin d’identifier formellement la meilleure stratégie.
Autre stratégie possible, l’association de certains de ces traitements, comme un anti-TNF et un anti-JAK, afin de bloquer différemment le système immunitaire dans l’espoir de rémissions cliniques plus importantes, à condition que la tolérance soit bonne. En effet, un ancien essai combinant l’anakinra et l’etanercept n’avait amené qu’un bénéfice modeste pour un surrisque infectieux majeur.
Les outils connectés pourraient permettre de modifier rapidement le traitement si le patient ne répond pas. Ainsi, un algorithme utilisant les données fournies par une montre connectée pourrait montrer précocement si le patient répond ou non au traitement et prédire une poussée de PR ou de spondylarthrite.
Envisager la désescalade thérapeutique
L’étude STRASS, confirmée par d’autres essais, avait montré qu’on pouvait réduire les anti-TNF une fois la rémission atteinte. Mais, selon l’étude TOLEDO, si la désescalade thérapeutique est possible, elle serait plus difficile sous abatacept que sous tocilizumab. Une étude ancillaire de STRASS montre que le risque de rechute est faible si la concentration d’anti-TNF est élevée. Cette observation pourrait amener à mettre en place des stratégies thérapeutiques de désescalade éventuellement basées sur le dosage sanguin des biomédicaments, comme cela avait été montré dans les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin.
Et en cas d'infection Covid-19 ?
On sait maintenant que les biothérapies ou les petites molécules ne sont pas associées à plus de formes sévères d’infection par le SARS-CoV-2, sauf pour le rituximab. Chez les patients sous rituximab, en période de Covid, on diminue la fréquence d’injection des traitements et ils peuvent bénéficier de la vaccination dans les centres hospitaliers.
Un registre français montre que chez les patients atteints de PR les formes graves sont liées aux mêmes comorbidités que dans la population générale. Par contre, il est évident que la corticothérapie au long cours est défavorable. On sait depuis longtemps qu’elle est délétère vis-à-vis du risque cardiovasculaire et infectieux, et tout doit être mis en œuvre pour les arrêter ou éviter de les instaurer.
D’après un entretien avec le Pr Hubert Marotte (rhumatologue au CHU de Saint-Étienne)
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